Italie: el pueblo unido…
Italie: el pueblo unido
Les 12 et 13 juin dernier les
Italien·ne·s étaient appelés aux urnes pour
se prononcer par référendum abrogatif sur trois
questions : le nucléaire, la privatisation de leau
et l« empêchement
légitime » (permettant aux ministres de ne pas
comparaître devant la justice). Depuis 16 ans, aucun
référendum navait passé la barre fatidique
du quorum (50 % + 1 voix ; celle des
Italien·ne·s de létranger comprise). Les
résultats (plus de 57 % de participation et plus de
90 % de OUI aux quatre questions posées) ont
dépassé toutes les espérances.
De la société civile italienne sest levée
la voix de celles et ceux qui, depuis des mois, occupent
régulièrement les places et les rues (cf.
solidaritéS nº 186). Aux élections
municipales de fin mai dernier, ils-elles avaient déjà
obtenu une première victoire : Milan, bastion historique
de Berlusconi passait aux mains du Parti démocrate. Et le
Manifesto titrait, sans doute avec une emphase un peu
excessive : « Una mattina mi son svegliato »
[premières paroles de la fameuse chanson Bella ciao]. La rue
bougeait et avec elle les lignes de force et les horizons
dattente.
Mais on ne peut pas réduire ce vote à
la seule lutte contre le gouvernement Berlusconi. Il sagissait
aussi denvoyer un signal clair à la « classe
politique » italienne dans son ensemble : de
lItalie de Berlusconi, on nen veut plus ; la solution
viendra de la rue.
Du bien commun
Les Italien·ne·s étaient appelés à
se prononcer sur les plans du gouvernement Berlusconi de construire des
centrales nucléaires à partir de 2014. Vingt-quatre ans
après le premier vote sur latome, ils·elles
navaient aucune raison de changer davis et pour cause.
Fukushima dabord, et lannonce par lAllemagne de sa
sortie du nucléaire pour 2022 ne pouvaient que renforcer leur
détermination. Le retour à latome a ainsi
été balayé par plus de 94 % des
votant·e·s. Les deux votes contre la privatisation de
leau et contre les profits des entreprises sur leau ont
réuni plus de 30 millions
délecteurs·trices. Sauver le bien commun en
refusant de la brader aux privés, tel a été le
réflexe dune société civile qui se
soulève tant contre les politiques de Berlusconi que contre
celles des gouvernements de centre-gauche. Un signe clair de la
volonté de se réapproprier lespace public (plus de
95 % de oui aux deux questions posées). Enfin le dernier
vote (celui qui visait le plus directement le système
Berlusconi) permettait de réaffirmer un principe
démocratique fondamental : légalité
de toutes et tous face à la loi; un principe largement
oublié au cours de ces vingt dernières années.
Une victoire par en bas
Une chose est sûre: rien en Italie ne sera plus comme avant ce 13
juin 2011. La société sest soulevée et a
réussi à imposer sa voix. Elle a pu lutter contre un
système dinformation inféodé au pouvoir
grâce aux nouvelles technologies de la communication (Internet,
arme privilégiée de rassemblement de la jeunesse,
sest imposé face à la télévision
désormais obsolète de Sua Emittenza). Elle a pu combattre
la mollesse, voire lhostilité larvée, des partis
de centre-gauche grâce à une mobilisation horizontale sans
précédent dans les rues, les quartiers, les
collectivités, les associations, les villages
La
campagne politique pour le référendum a voulu être
un modèle de bataille anti-institutionnelle. Elle a
imposé une victoire par en bas et une autre manière
denvisager la politique.
« El pueblo unido jamas sera
vencido », scandaient, après le résultat du
vote, toutes celles et ceux qui sétaient battu
jusquau bout pour faire entendre leurs voix. Les 4 oui obtenus
à plus de 90 % des électeurs·trices
lont clairement confirmé. LItalie en avait bien
besoin. Ce nest quun début
Stéfanie Prezioso