Une médaille d'or au promoteur de l'ajustement structurel en Europe
La Fondation Jean Monnet, logée au cœur du campus de Dorigny, bénéficie du soutien de la Confédération, de l'Etat de Vaud et de la Ville de Lausanne. Raison de plus pour Claude Calame, professeur honoraire à l'UNIL, d'exprimer son indignation face à la remise, par cette institution, d'une médaille d'or au promoteur de l'ajustement structurel en Europe.
Monsieur le Directeur, Madame, Monsieur,
chères et chers Collègues,
Votre invitation à prendre part à la remise de la Médaille d’or de la Fondation Jean Monnet à Monsieur José Manuel Barroso m’est bien parvenue et je vous en remercie.
Helléniste, je n’ai cessé de me sentir proche de l’histoire de la Grèce contemporaine. À cet égard vous pouvez vous imaginer combien j’ai été choqué par le régime d’austérité destructrice auquel la Commission européenne, en collaboration avec la BCE et le FMI, a soumis ce pays. La Grèce avait pourtant admise dans la Communauté européenne puis associée à l’Euro sans que ne soit soulevée la moindre objection quant à son régime fiscal et quant à un budget truqué avec l’aide de la banque d’affaires Goldman Sachs.
Monsieur Barroso a été l’un des promoteurs de cette politique systématique de restrictions budgétaires destructrices, touchant en particulier le système de formation et le système de santé dont le pays avait su se doter; et ceci au profit des intérêts privés des grandes banques, des multinationales et des grandes fortunes.
Ce n’est là que l’une des pièces de la politique de concurrence fiscale et de sous-enchère salariale et sociale dont Monsieur Barroso a été l’artisan durant les trois mandats qu’il a brigués en dépit des réticences exprimées dans son propre parti à chaque nouvelle « élection ». Le constat de l’échec d’une politique qui n’a pour objectif qu’une croissance fondée sur profit et accumulation du capital ne s’applique pas uniquement aux pays jouxtant la Méditerranée, mais aussi aux pays de la partie orientale de l’Europe. Elle y a entraîné privatisation des services publics, chômage à large échelle, amenuisement du soutien social et culturel, augmentation de la pauvreté au profit des plus riches et accentuation de la crise climatique, avec pour conséquence la montée inquiétante des partis d’extrême-droite tel Aube Dorée en Grèce même.
Dans la conduite de cette politique destructrice d’inspiration néo-libérale, le pâle Herman Van Rompuy semblait faire office de simple lieutenant. Lui conférer à lui aussi une médaille c’est honorer la médiocrité, sinon la complicité.
En un mot, ce signe d’approbation de la part de la Fondation Jean Monnet à l’égard d’une politique d’économisme financier conduite au détriment des peuples d’Europe et de leurs cultures, mais au profit des plus riches est tout simplement indigne d’un Institut universitaire. ICe signe est également indigne de celui dont la Fondation a pris le nom.
Avec l’expression de mes sentiments distingués,
Claude Calame
PS : Merci de bien vouloir transmettre le présent message à Monsieur José Maria Gil-Robles, Président de la Fondation Jean Monnet