Troquer la diminution du temps de travail contre la flexibilité: ce n'est pas le premier essai!

Troquer la diminution du temps de travail contre la flexibilité:
ce n´est pas le premier essai!

La déréglementation des horaires comme monnaie d´échange d´une réduction du temps de travail, voilà une idée qui trotte depuis un certain temps déjà dans la tête des dirigeants de l´USS. A la grande satisfaction des employeurs qui, eux, bien sûr, ne s´intéressent qu´à la première partie de la proposition: la flexibilité.



Qu´on se rappelle ici l´accord signé en 1986 entre la FTMH et l´usine EM Microélectronic Marin (Neuchâtel) et qui devait permettre à cette entreprise de supprimer toutes les primes d´équipes et d´introduire -en contre-partie d´une diminution du temps de travail annuel- des horaires en continu 7 jours sur 7, 24h. sur 24, aussi bien pour les femmes que les hommes .



Côté employeur, l´objectif était de faire sauter l´interdiction du travail de nuit des femmes dans l´industrie et d´autoriser les équipes de week-end permanentes; côté dirigeants syndicaux on pensait rendre attractifs et acceptables les 5 sortes d´équipes imaginées pour faire tourner les machines nuit et jour (y compris les jours fériés) par une «bonne» diminution du temps de travail.



Le personnel, lui, s´était montré moins enthousiaste et ce fut le début d´une importante mobilisation organisé en marge du syndicat par le «Comité Travail et Santé» qui regroupait des travailleurs et des travailleuses de MEM Marin et des syndicalistes qui refusaient cette logique d´une déréglementation accrue des horaires.



L´opposition du personnel était claire: refus des femmes de se voir imposer des équipes de nuit, refus des hommes de voir leurs salaires baisser par le jeu de la suppression des primes d´équipes, refus de la part de celles et ceux qui travaillaient en deux équipes de jour d´être astreints à des équipes tournantes 24h. sur 24. Finalement, grâce à la bataille publique et à la mobilisation organisée par le «Comité Travail et Santé», le verrou de l´interdiction du travail de nuit des femmes put être maintenu, ce qui rendit caduc l´accord.



L´avocat Jacques Schneider qui avait aidé à faire échouer cet accord sur le plan juridique avait bien résumé la situation: «Voulons-nous une société conviviale travaillant, en principe, 5 jours fixes par semaine, qui respecte la physiologie humaine et met à disposition de ses membres des plages importantes de temps libre en commun? Ou alors, voulons-nous une société travaillant, même à un horaire de 35 heures par semaine, nuit et jour, atomisée et individualisée à l´extrême et non-respectueuse de la physiologie humaine.»



Il aura fallu une quinzaine d´années au patronat pour reprendre tous ces principes dans l´actuelle loi sur le travail finalement votée en 2000, avec l´appui de l´Union Syndicale Suisse. A quand une diminution du temps de travail sans diminution des salaires et sans flexibilité supplémentaire?



Marianne EBEL