Algérie, Code de la famille: 20 ans Barakat!

Algérie, Code de la famille: 20 ans Barakat!

Les femmes algériennes, ne sont pas seulement des «sacrifiées» comme nous le démontrait tout récemment à la Comédie de Genève la pièce en triptyque de Laurent Gaudé. Elles sont aussi et plus que jamais de magnifiques résistantes à la domination patriarcale. Le brunch-débat autour de la pièce «Les Sacrifiées» réunissait l’auteur, des actrices algériennes et deux militantes, Malika, représentante du mouvement «Ni putes, ni soumises» au pays de Gex (belles synergies féministes en perspectives!) et Nadia Liassine, une avocate algérienne, présidente de l’association 20 ans Barakat (ça suffit).

D’éternelles mineures

En 1984, nous racontait-elle, le gouvernement algérien présentait son «cadeau de mariage aux islamistes: le Code de la famille. Et l’Assemblée populaire nationale votait ce texte de loi basé sur l’infériorisation des femmes, quand bien même le principe de l’égalité des sexes figure dans la Constitution algérienne! Le Code de la famille oblige les femmes d’avoir un tuteur mâle lors de leur mariage, d’être soumises à leur mari, de pouvoir être répudiées, mais de ne pas pouvoir demander elles-mêmes le divorce, d’accepter la polygamie, de quitter l’habitation familiale en cas de répudiation, de ne pas épouser de non-musulman. Elles n’ont pas les mêmes droits à l’héritage, pas l’autorité parentale, pas le moindre droit de signer un document scolaire ou médical pour leurs enfants, elles ne peuvent pas leur transmettre la nationalité algérienne!

Nos voix s’élèvent…

Ce tissu législatif tramé d’injustices est le moteur d’une véritable régression sociale et du basculement du pays dans un régime de terreur. En 2001, un effroyable viol collectif perpétré à Hassi Messaoud par d‘«honnêtes pères de famille» contre des femmes seules a réveillé l’opinion publique. Un nouveau mouvement des femmes est né qui s’est donné pour but de dénoncer et d’abroger ce code de la famille. Des juristes ont rédigé «100 mesures pour une codification égalitaire» qui seraient immédiatement réalisables. Les militantes veulent l’abrogation pour cette année: 20 ans, ça suffit. C’est une mesure qui ne coûtera rien et qui développera le pays.

Nadia Lassine nous a montré le film de la campagne, auquel ont participé nombre d’artistes et de personnalités, femmes et hommes, d’Algérie ou d’autres pays africains. Bouleversant de voir ces femmes sans voiles et libres chanter: Hé juge, qu’est-ce qui t’a pris? pourquoi as-tu peur de moi? Je suis debout en toutes saisons, mes paroles sont sans venin et Nos voix s’élèvent aujourd’hui parce qu’ici la femme n’a pas ses droits, nos voix s’élèvent encore une fois parce qu’ici la femme n’a pas ses droits.

Evidemment ce clip n’est pas transmis par la TV algérienne, mais les paraboles de retransmissions sont nombreuses sur les balcons et captent les ondes des pays voisins ou Beur TV en France. Et la chanson circule partout dans le Mahgreb, elle est aussi en vente à la librairie de la Comédie.

Maryelle BUDRY