«L'avenir t'appartient»: convention du Bloc de gauche

«L’avenir t’appartient»: convention du Bloc de gauche

Après 50 réunions préparatoires, la dernière convention du Bloc de gauche s’est tenue à Lisbonne les 7 et 8 mai. Il y avait 620 délégué-e-s dont la moyenne d’âge se situe entre 20 et 50 ans, avec une forte composante étudiante et féminine. Il y avait également de nombreux membres, sympathisant-e-s, journalistes, ainsi qu’une centaine d’invité-e-s, dont les délégations étrangères, dont je faisais partie pour solidaritéS. Il y avait, entre autres, des représant-e-s de la LCR, de Rifondazione Comunista, du SWP, du Socialist Party de Grande-Bretagne, de l’Union do Povo Galego, du Parti Basque, du parti Communiste brésilien ou encore du Enheckslisten du Danemark.

Nous (délégations étrangères) avons été très impressionné-e-s par le congrès du Bloc de gauche, en particulier concernant le déroulement de la convention. Transparente: elle était ouverte à toutes et à tous en tout temps. Tous les documents (motions, réflexions, amendements, changements de statuts) étaient à la disposition de toutes et de tous par écrit. Démocratique: des centaines d’interventions sur l’orientation à donner au mouvement ont été présentées avec un temps de parole égal pour toutes et tous, qui a toujours été respecté. Plurielle: le droit de tendance est revendiqué par le Bloc pris au sérieux et débattu; il n’est pas considéré comme une faiblesse, mais comme une richesse pour le mouvement. Féministe: la parité était respectée, tant à la présidence que dans les multiples interventions, les femmes ne sont pas des «alibis» au sein du Bloc mais une véritable composante très active.

Contre la guerre permanente de Bush
et la Constitution

Le Bloc s’était donné comme objectif de choisir ses priorités pour les deux ans à venir; par ailleurs, il entendait mettre sur pied une nouvelle organisation interne pour pouvoir faire face à une nouvelle constellation. En effet, après avoir obtenu, en février 2005, son meilleur résultat électoral, le Bloc s’est vu propulsé – avec 6 député-e-s au Parlement et plus de 360000 voix, ainsi que des milliers de nouvelles adhésions – au rang d’une force politique de poids au Portugal. Samedi, la motion d’orientation «Le Bloc comme alternative socialiste» a été votée à une large majorité après une journée de débats. Cette motion comporte douze thèses et 80 signataires, dont les député-e-s au Parlement portugais et européen. Ces 80 personnes ont été élues, le dimanche, comme «bureau national» (direction collégiale).

Ces douze thèses ont été présentées et discutées très longuement lors de la Convention. Elles affirment qu’au niveau international le Bloc s’insère dans une gauche globale en lutte contre la politique de Bush et le système impérialiste, dans une nouvelle gauche qu’il voit comme une force émancipatrice, contre le néolibéralisme triomphant qui renforce l’exploitation des salarié-e-s, les inégalités et les discriminations sociales et de genre, ainsi que le pillage des services publics. En ce qui concerne l’Europe, la motion constate que le coût social de la crise est inacceptable: 20 millions de chômeurs-euses, 70 millions de pauvres et des millions d’immigrant-e-s qui n’ont pas le statut de citoyen-ne. Le Bloc se bat et se battra avec d’autres forces de gauche pour le refus de la Constitution Européenne, parce que la Constitution doit naître de la démocratie et d’un projet européen de plein emploi et de droits sociaux. L’Union Europénne telle qu’elle existe aujourd’hui et telle qu’elle est envisagée dans la Constitution est une Union contre l’idée même de l’Europe sociale qui est à construire.

Prochaine échéance: la lutte contre le chômage au Portugal

Au Portugal, la motion constate que les gouvernements de gauche comme de droite, qui se sont succédés ces dix dernières années, ont aggravé l’injustice fiscale, accentuant la précarisation du travail et renforçant la clandestinité des immigrant-e-s. Dans le même temps, ces gouvernements ont humilié les femmes en maintenant la pénalisation de l’avortement. La nouvelle majorité du PS se place dans une logique de continuité et ne compte pas opérer le changement de cap nécessaire, incarné par le Bloc. Cependant, la construction du Bloc de Gauche comme courant socialiste de grande audience populaire exige un nouveau supérieur d’organisation et d’activisme de base. Il faut créer une nouvelle culture d’organisation, fondée sur des structures de travail décentralisées et efficaces, qui doit répondre aux milliers de nouveaux et nouvelles adhérent-e-s. La condition pour une telle construction, c’est la défense d’un mouvement favorisant la démocratie plurielle, ouverte aux critiques et cherchant à apprendre des luttes sociales. C’est dans ce cadre, que bon nombre de statuts ont été ajoutés ou modifiés le dimanche.

Après la lutte pour la légalisation de l’avortement, qui devrait êre soumise au référendum populaire avant la fin de l’année, grâce essentiellement à la campagne intensive du Bloc, ce dernier se centrera sur la politique de l’emploi. Le Portugal compte aujourd’hui 150’000 chômeurs-euses. Pour le Bloc, il ne suffit pas de constater, comme le fait le Parti socialiste, que le chômage a augmenté ces derniers mois, il ne suffit pas de parler d’un plan national pour l’emploi, mais de prendre des mesures d’urgence. Le PS a promis de créer des milliers d’emplois, le Bloc sera là pour le lui rappeler. C’est dans ce sens, que sont intervenus notamment les deux députés sortants et coordinateurs du mouvement, Luis Fazenda et Francisco Louça. A ce propos, il est utile de savoir que le Bloc était le seul parti, lors de la récente campagne pour les élections au Parlement, à avoir présenté un programme détaillé de lutte contre le chômage, quantifiant les coûts et les bénéfices des mesures d’urgence à mettre sur pied.

Isabelle PACCAUD