Contre l'impôt dégressif la résistance, ça déménage!

Contre l’impôt dégressif la résistance, ça déménage!

Dans notre dernier numéro, début janvier, nous dénoncions l’offensive de dumping et de concurrence fiscale intercantonale accrue, matérialisée par la nouvelle législation du demi-canton d’Obwald qui a introduit, après Schaffhouse, un impôt sur le revenu dégressif, en vigueur depuis ce 1er janvier.

Obwald dépasse ainsi – par la droite – l’horizon néolibéral représenté jusqu’ici en la matière par la «flat tax», soit l’impôt à taux fixe. Le nouveau graal néolibéral devenant dans ce domaine, non plus l’impôt à taux unique, mais l’impôt… à montant fixe, en d’autres termes la «poll tax» chère à Margaret Thatcher.

Depuis notre dernier article, les évènements se sont précipités. Le 10 janvier, le PS d’Obwald publiait un communiqué dans lequel il déclarait solennellement « accepter la claire décision des électeurs obwaldiens » et s’inscrivait publiquement en faux contre les velléités du PSS de porter la nouvelle loi fiscale obwaldienne devant le Tribunal fédéral au motif qu’elle viole, de manière flagrante, le principe constitutionnel fédéral qui veut que les impôts soient en principe payés selon la «capacité contributive» de chacun-e.

Notre chemin doit « être politique » et « non juridique » déclaraient dans leur communiqué les sociaux-démocrates d’Obwald… tout en « déplorant que la constitutionalité de la nouvelle loi fiscale n’ait pas été clarifiée de manière irréfutable par le gouvernement cantonal avant la votation sur cet objet. »

Le 14 janvier, dans le cadre de la rencontre nationale des militant-e-s de notre coalition «A gauche toute!» à Zurich, la question d’une initiative fédérale en matière d’harmonisation fiscale «matérielle» entre les cantons à été inscrite à l’agenda de nos travaux et de nos débats pour les semaines qui viennent.

Le PSS renonce…

Le 20 janvier, le Parti socialiste suisse, annonçait qu’il renonçait à déposer son recours au Tribunal fédéral, pourtant annoncé à cor et à cri en décembre déjà. Ceci au motif que l’une des deux personnes habitant Obwald et qui avaient été trouvées pour déposer ce recours s’était désistée… par crainte de perdre son emploi.

Ainsi, dans tout le canton d’Obwald, selon le constat du PSS, il ne se trouvait censément pas deux personnes prêtes à exercer leur droit de citoyen à contester cette loi cantonale devant le TF, ceci par crainte de rétorsions matérielles inadmissibles.

C’est dans cette situation honteuse que notre camarade du POP/PST Josef Zisyadis, membre du groupe parlementaire «A gauche toute!» au Conseil national a décidé de plonger dans l’arène, personnellement.

Ainsi, le 24 janvier, tous les médias du pays annonçaient que Zisyadis s’établissait et déposait ses papiers à Sarnen pour pouvoir faire recours au TF contre la loi fiscale obwaldienne. Pourquoi en effet les seuls millionnaires auraient-ils le monopole du déménagement à des fins fiscales? « Désormais, je serais un frontalier intercantonal. » déclarait-il aux journalistes, en se félicitant au passage du fait que « rien n’interdise en Suisse la libre-circulation entre les cantons

Josef Zisyadis s’accroche…

Dans les jours qui ont suivi, les rebondissements n’ont pas manqué. Pressions et menaces de ne plus trouver « ni travail, ni logement » à l’encontre de la personne qui avait accepté d’héberger Josef dans le chef-lieu cantonal obwaldien de Sarnen, pour qu’elle renonce à lui sous-louer une chambre. Tracasseries administratives, «filatures» pour savoir où et vers qui il allait se retourner, etc.

Mais au moment où nous mettons sous presse, un premier dénouement est proche. Notre camarade a trouvé un studio dans la commune obwaldienne de Sachseln… et le 31 janvier à Berne – sous la coupole – se tiendra une Conférence de presse pour annoncer la teneur exacte du recours contre la dégressivité fiscale obwaldienne. Une conférence de presse avec la participation de Niggi Scherr, l’un des responsables de la Liste Alternative zurichoise faisant partie de la coalition «A gauche toute!», qui n’en est pas à son premier succès en matière de recours devant le TF. A leurs côtés se retrouvera également un député socialiste au Grand Conseil de Lucerne, qui a manifesté publiquement son appui au combat contre la sous-enchère fiscale dont Josef Zisyadis s’est fait le porte parole.

La peur battue en brèche

Mais surtout, au-delà du seul recours d’un Zisyadis, «obwaldien» de fraîche date et de circonstance… ce sont trois autres habitant-e-s du canton qui ont accepté de s’associer au recours. Ainsi, en mouillant sa chemise pendant une lourde semaine, Josef aura réussi ce que le PSS et son président n’étaient pas arrivés à faire en un mois: créer une première brèche concrète dans la «chape de plomb» de peur, au service du non droit et des riches, qui planait sur ce canton de Suisse centrale…

Bien sûr, l’issue du recours au TF est incertaine, bien sûr cette démarche juridique n’est en elle-même que le premier épisode d’une bataille politique bien plus vaste, à livrer dans des conditions difficiles.

Mais, au-delà du «coup publicitaire» indéniablement réussi, et dénoncé par certains détracteurs, le plus important dans cette affaire c’est ce qu’il en restera, en termes de contacts établis, de premiers liens noués, d’actions futures communes possibles avec celle et ceux qui, en Suisse centrale, à Obwald et dans les environs, ont manifesté leur sympathie et leur soutien à ce combat, qui ont pu à travers cette action toucher du doigt cette «autre gauche», dont les idées et les actes sont en cohérence… qui ne considère pas le capitalisme néolibéral comme un fléau devant lequel il faille forcément respectueusement courber l’échine.

Pierre VANEK