Regard passé
Neuchâtel contre une augmentation des taxes universitaires en 1998 (2)
Alors que l’université de Neuchâtel fait à nouveau face à une tentative d’augmenter les taxes universitaires, voilà un second article d’archive, reprenant la suite d’un article d’un précédent numéro, publié dans le no 17 du journal solidaritéS Infos (avril 1999), à propos du mouvement contre une augmentation des taxes universitaires en 1998.
Modèle yankee pour Uni britchonne ? (2)
Dans notre précédent numéro, nous avions publié des extraits d’une interview de la présidente du Conseil de l’Université (et du Grand Conseil), Mme Michèle Berger Wildhaber, au journal étudiant « Le Cafignon ». Ce texte faisait entre autres référence à la situation des étudiant/es nord-américain/es et plus particulièrement à leurs conditions de logement (par exemple, un ami du fils de Mme Berger Wildhaber habitait dans une voiture…).
En complément, nous publions des extraits d’une conférence donnée à La Chaux-de-Fonds lors de la dernière Conférence fédérative des enseignant/es organisée par le Syndicat suisse des services publics (SSP/VPOD). Son auteure, Mme Gita Steiner-Khamsi, est professeure de sciences de l’éducation comparée et internationale à l’Université de Columbia (USA). Le texte intégral de cette conférence a été publiée dans 4 numéros (janviers-mars 1999) du journal « Les Services publics », publié en Suisse romande par le SSP (h.p.renk)
« Les étudiants de mon université terminent leurs études avec 20.000 à 50.000 dollars de dette » (Ghita Steiner-Khamsi)
Dans la majorité des Etats, les réformes scolaires centrées sur l’efficacité vont de pair avec la privatisation des établissements de formation. On ne voit pas pourquoi la Suisse serait épargnée par cette tendance à long terme Au lieu de faire de cette question un tabou, il faudrait en discuter ouvertement.
La privatisation du système éducatif commence dans la plupart des Etats par une privatisation partielle des universités et des jardins d’enfants, avant de s’étendre aux autres écoles publiques. Dans ce contexte, l’on invite les parents d’élèves, certaines entreprises et organisations à faire des dons pour les écoles publiques. En outre, les écoles introduisent des taxes d’écolage pour certains cours complémentaires pour lesquels la demande est très forte. En Russie, par exemple, l’on prélève maintenant une taxe pour les cours de langue étrangère.
Le domaine le plus fortement touché par les privatisations est celui de la formation supérieure. L’explosion des besoins en formation et la crise financière ont incité la plupart des Etats à rendre plus difficile l’accès au niveau tertiaire de la formation. Dans ce domaine, il est également possible de mettre en évidence les différentes phases engendrées par les politiques en matière de formation.
Dans une première phase, l’on a introduit des taxes d’études. Suite à la pression exercée par l’opinion publique, soulignant l’aspect inégalitaire de cette pratique, bon nombre d’Etat ont mis sur pied des programmes de bourses d’études pour les étudiant/es à faibles ressources financières. Cette première phase de privatisation, effectuée dans le respect de certains critères sociaux, n’a pas duré très longtemps. Depuis deux ans, les Etats-Unis sont entrés dans une deuxième phase caractérisée par le passage de l’octroi des bourses en fonction des besoins (« need based ») à l’octroi des bourses en fonction des performances (« merit based »). Depuis deux ans, nous sommes tenus d’évaluer les demandes de bourses en nous basant d’abord sur les performances du/de la requérant/e et non plus seulement en fonction de leurs besoins financiers. Notons que les étudiant/es de mon université terminent leurs études avec 20.000 à 50.000 dollars de dettes, selon la branche choisie et la durée des études.
La privatisation du système éducatif ne crée pas seulement un fardeau pour les étudiant/es, mais également pour le corps enseignant. En effet, l’image de notre profession s’est considérablement modifiée suite aux privatisations. Nous devenons de plus en plus des gérant/es (managers) de projets, qui déposent sans cesse de nouvelles demandes de fonds pour des projets, afin d’assure à leur institution des moyens financiers supplémentaires. Ce constant est également valable pour les enseignant/es des écoles publiques. En effet, dans un système scolaire centrée sur l’efficacité, l’Etat n’accorde un soutien financier que pour la formation minimale. Toutes les autres activités, telles que les excursions, les journaux d’élèves, les fêtes scolaires, sont considérées comme des « projets » et doivent faire l’objet d’une demande spécifique (projet avec budget) de la part des enseignants…