Manifeste SolidaritéS Neuchâtel
Nous voulons un monde vivable
Manifeste SolidaritéS Neuchâtel
Pour ne pas tout recommencer comme avant, des mobilisations de tous les mouvements sociaux et du monde du travail seront nécessaires. Merci pour vos remarques et contributions. Ce texte est soumis à discussion et est appelé à évoluer.
La pandémie du corona19 a mis à jour, de manière cruelle, la fragilité de nos sociétés, toutes, quelles qu’elles soient. Si les dirigeants du monde et ceux qui s’en croient propriétaires pensent que l’on peut reprendre l’exploitation de la planète comme d’habitude et qu’il faut se focaliser sur le sauvetage et la reprise de l’économie, de sombres heures nous attendent. Maintenant que les avions sont cloués au sol, il serait irresponsable de redonner au transport aérien la place qui était la sienne avant la crise. Idem pour l’industrie automobile, ou pour la production de pesticides. Si nous continuons de détruire nos éco-systèmes, d’autres pandémies pourront advenir qui pourraient avoir un taux de mortalité beaucoup plus élevé.
Relocaliser et planifier de nombreuses activités doit devenir le maître mot. Nous voulons produire autre chose, autrement, nous éloigner de la civilisation du jetable.
1) Mettre à mort l’agro-business et s’inspirer de la souveraineté alimentaire
Les virus qui nous frappent trouvent leurs racines dans une nature et un monde animal mis à mal par les pratiques agro-industrielles démentielles. Il faut changer de voie
-sortir rapidement des pesticides
-interdire les pratiques non durables, en particulier en matière d’élevage
-interdire l’importation du fourrage pour animaux, destructeur des forêts tropicales
-soutenir une agriculture de taille humaine, respectueuse de la nature et des animaux.
-interdire les importation d’aliments produits dans des conditions non conformes au respect de la nature
2) Garantir la sécurité sanitaire du territoire
Le verdict de la pandémie est cinglant: nous sommes un pays dépendant! Nous devons quémander sur le marché international des masques, des solutions de protection et d’autres matériaux de base. Se dessine également une pénurie de médicaments produite par la gestion mondialisée à flux-tendu. Il faut revenir sur les politiques de privatisation de la santé et du management néo-libéral.
-développer le service public de santé, de proximité, avec le bien-être comme objectif et non la réduction des coûts
-la recherche et le développement de médicaments doit se faire sous contrôle public, pour répondre à la sécurité sanitaire et aux besoins de la majorité et des plus pauvres de la planète
-la production pharmaceutique doit être placée sous contrôle public pour garantir une disponibilité des médicaments et des biens sanitaires correspondant aux besoins
3) Développer un imaginaire éco-responsable
Toutes les valeurs et le fonctionnement de la société ont été développées vers l’idéal de consommation d’objets et de production de déchets. Nous sommes bien la civilisation du plastique. Il faut sortie de l’imaginaire marchand dominant.
-suppression de toutes les publicités commerciales dans l’espace public remplacées par une éducation citoyenne et écologiste
-contrôle de la production pour imposer la durabilité et l’utilisation de matériaux recyclables
-sortie des énergies non-renouvelables
-arrêt du gaspillage et soutien à toutes les mesures nécessaires pour la réduction de la consommation d’énergie
4) Pour un féminisme qui irrigue notre société
La pandémie du Coronavirus a mis en évidence que les femmes occupent très majoritairement les postes et les fonctions essentielles à la vie, et pourtant leurs emplois sont les plus mal payés et le travail de reproduction et de soins restent le plus souvent invisibles. Paradoxe que seul le patriarcat dominant explique. L’émergence massive du féminisme est une chance de faire advenir ses valeurs de respect, d’égalité, du prendre soin des autres
– augmentation des salaires dans le secteur des soins et de la vente
– partage et revalorisation des tâches domestiques
– réduction du temps travail pour l’épanouissement de la vie
– égalité salariale et dans l’accès aux postes de travail
5) Une production pour le bien-être, pas pour le marché
Le libre marché est incapable d’atteindre des objectifs limités comme produire des masques, du gel hydroalcoolique, des tests de dépistage, des respirateurs, répartir les stocks de médicaments. Nous voulons réorienter la production pour la société. Le bien-être doit être le but de toute production, pas le profit des actionnaires ou propriétaires. Moins polluer signifie forcément produire moins.
-produire moins, jeter moins, travailler moins
-salaire minimum qui permette une vie normale
-une sécurité sociale qui garantisse la vie des ainés et des ainées et qui ne serve pas à engraisser les actionnaires
-fermer les bourses et élaborer un plan d’investissement et de développement en faveur de la majorité de la population
6) Tous sur le même océan, mais pas dans le même bateau
La mondialisation est un fait établi. Les marchandises que nous consommons viennent des quatre coins du monde. Si elles circulent facilement, ce n’est pas le cas des personnes les plus pauvres qui paient un lourd tribut à la prospérité du capital. Vouloir simplement fermer les frontières est illusion qui se traduira par une régression sociale et des inégalités grandissantes, car les dominants continueront de naviguer. Nous avons besoin de la coopération des dominés.
-politique d’accueil de toutes les personnes qui cherchent à gagner leur vie
-régularisation des toutes les personnes sans statut égal
-oeuvrer à un développement qui permette de vivre là où est son choix
-mise sous contrôle des multinationales pour garantir des conditions sociales qui s’égalisent dans le monde
Ces 6 points sont ce qui guide notre action, mais il est impensable qu’ils se réalisent sous la conduite des dirigeants qui ont conduit le monde à sa perte.
Nous insistons beaucoup sur le terme de contrôle, contrôle des salariés et de la société sur ce qui se produit, comment et où ça se produit. Nous voulons passer d’une civilisation de la consommation jetable à une civilisation de l’auto-organisation et de la solidarité. Cela impliquera des droits nouveaux, des droits syndicaux, des droits de s’occuper de ce qui aujourd’hui ne nous regarde pas. C’est à un vaste mouvement social que nous appelons pour faire émerger une nouvelle direction à la société. La crise dont nous sortons péniblement nous donne une chance. A nous de la saisir.
SolidaritéS, Neuchâtel, le 30.04.2020