La ville sponsorise... une multinationale

La ville sponsorise… une multinationale

Le sport est le nouvel opium du peuple! Qui dit drogue dit aussi trafic et intérêts bien pesés! Sur proposition du conseiller administratif André Hediger (Parti du Travail), la Ville de Genève a voté fin juin un crédit de 4 millions de francs pour la rénovation de la patinoire des Vernets. Qu’est-ce qui se cache sous la glace lisse de notre patinoire?



Le monde, en tous cas celui du sport professionnel, est devenu une marchandise! Le club Servette Hockey club SA n’échappe pas à la règle. C’est une multinationale américaine Anschutz entertainment Inc, qui a racheté ce club. Cette année, il est monté en ligue A. Dès lors de charitables municipaux, emmenés par André Hediger, se sont empressés de venir au secours de cette société… qui souhaitait mais sans le dire bien entendu avoir une patinoire des Vernets digne des ambitions des propriétaires du club! Particulièrement la construction de 200 loges au moins pour les VIP (louées à des entreprises, sociétés, ou groupements intéressés). Mais aussi la réfection des installations sanitaires (ce que solidaritéS ne contesta pas), renforcement de la sécurité des gradins), ainsi que des installations particulières en vue d’«accueillir» les spectateurs des équipes adverses: «secteur totalement isolable du reste du public comme de la patinoire elle-même, rendant impossible toute confrontation entre partisans des équipes en compétition, aussi bien avant la partie, que durant le match et après, l’accès aux cars étant également protégés»1 Et le sport, selon la mythologie journalistique, rapprocherait les peuples!

Une subvention à la quinzième fortune américaine


Le groupe Anschutz est une multinationale qui possède des dizaines de clubs dans différents sports de par le vaste monde. Son patron, Philip Anschutz, serait aussi un des mécènes du président Bush. La société a son siège principal à Los Angeles. Londres accueille son siège européen. Certes, il est peut-être réconfortant d’observer que tous les capitalistes américains n’investissent pas dans l’armement, mais au nom de quels principes «alternatifs» la Ville de Genève devrait octroyer indirectement une subvention à cette multinationale américaine? J’ai demandé quels étaient les bénéfices de ce groupe, payera-t-il des impôts à Genève? Pas de réponse! Car enfin, le président du Servette HC SA, Torriani annonce en commission, sans sourciller, que le salaire d’un joueur professionnel oscille entre 80 et 100000 Fr. par année, et qu’une vedette mondiale gagne entre 250000 et 300000 Fr. Dans ces conditions, ce groupe ne pourrait-il pas participer aux frais de rénovation?

Tous en chœur: Hop Servette!


Quand la religion vous tient sous son emprise, la raison lâche prise! Le plus choquant dans cette affaire, c’est que ce sont les socialistes, les membres du Parti du Travail ainsi que les écologistes, qui se sont montrés les meilleurs défenseurs du cadeau au groupe Anschutz! Dans son enthousiasme, un Vert a même confondu patinoire des Vernets et Municipal en concluant son intervention par un vibrant Hop Servette…oubliant le SA (Société Anonyme)). Les bourgeois avaient donc le jeu facile en demandant à André Hédiger: quelles garanties il avait obtenu pour que le groupe Anschutz ne retire pas ses investissements du HC Servette SA dans quelques années? Quelle sera la redevance que ce groupe devra verser à la Ville de Genève pour la patinoire? A ces questions, le magistrat du PDT n’a donné aucune réponse! Il a expliqué que jusqu’à présent les Vernets étaient loués 1000 Fr. par match…mais que le prix serait augmenté.



Quand j’ai demandé quel serait le prix futur, Hédiger m’a répondu qu’il serait fixé au pro rata des billets vendus, que la convention future était en discussion avec les mécènes (sic) du HC Servette SA. Et c’est un libéral qui a du lui faire une leçon de français: «Non Monsieur Hédiger, le groupe Anschutz n’est pas un mécène, mais un investisseur!» Et de poursuivre pour demander que la Ville dicte des exigences à cette multinationale avant de lui proposer une subvention indirecte! En vain. Demande qui n’était pas dénuée de fondement au moment même où l’on assiste dans les milieux du football, à une dégringolade de clubs de Ligue A, du fait de la fuite de leurs investisseurs (Sion, Lausanne, etc).



Le groupe Anschutz ne désirant faire aucune rénovation de la patinoire, c’est donc la population qui payera. Par exemple, la construction d’installations servant à la TV pour filmer les retransmission des compétitions. Le groupe Anschutz empochera 400000 Fr. de redevance TV par année. Investissements publics, bénéfice privatisés!



Daniel Künzi

  1. Rapport de la commission des travaux, du Conseil municipal de La Ville de Genève 22 juin 2002