Après Porto Alegre... la Démocratie participative


Après Porto Alegre…
la Démocratie participative


Le groupe de travail de
la délégation élargie des conseillers municipaux de l’Alternative qui s’est rendue en janvier dernier à Porto Alegre s’est donné pour tâche d’organiser en juin une rencontre avec des délégués de trois municipalités ayant mis en place des structures favorisant la Démocratie participative, autour du thème: «Quelles structures et quels moyens une municipalité doit-elle mettre
en place, si elle veut instaurer une réelle démocratie participative des citoyens?»

Jacques Mino

Nous savons que la réflexion portant sur la mise en place de la démocratie participative a été abordée par la gauche à Genève dès le début des années 70. Des expériences ponctuelles ont eu lieu. Mais la volonté politique a manqué jusqu’ici pour entreprendre un analyse globale des conditions nécessaires à mettre en place pour la rendre effective de manière généralisée et sur le long terme.


D’où notre démarche d’inviter :



  • pour St. Denis: Stéphane PEU, Maire-adjoint et son conseiller Jean Karinthi,
  • pour Lille: Jamal EJJALTY et Claude CHARRON, chargés de mission,
  • et pour Porto Alegre: Dilecta TODESCHINI, conseillère déléguée de sa ville auprès du Conseil du budget participatif.

Tous sont partis du constat que la démocratie représentative seule ne garantit pas une réelle démocratie. En effet, élire des représentants tous les quatre ans ne permet pas aux citoyens de participer au choix des projets, des options et des priorités, ni d’em-pêcher que les enjeux politiques soient laissés aux experts qui expliquent que la crise est une fatalité et que le système économique en place est incontournable.


L’espace et le temps de la délibération est essentiel. Pour cela, les citoyens, soit tout habitant, quel que soit son statut, doivent avoir accès à toutes les informations de base pour participer directement au processus de réflexion, afin de développer une force de proposition en réponse aux besoins de la population.


Ce travail de démocratie participative ne s’oppose en rien à la démocratie représentative. Il y a ainsi plusieurs manières d’être citoyen et de travailler à la mise en place d’une politique locale sur le long terme qui développe la cohésion sociale.


Il est difficile de comparer les trois approches, fort différentes, des Municipalités qui se sont exprimées, bien qu’elles aient mis chacune en place des structures de manière volontariste, dotées de moyens en personnel et en budget relativement importants.


Porto Alegre


Porto Alegre a mis en route, dès 1998, un projet de partage du pouvoir complexe qui vise à permettre au plus grand nombre d’habitants de devenir acteurs dans le choix des priorités concernant le développement local, mais également dans la gestion du budget même de la municipalité. Un coordinateur, un vice-coordinateur, un secrétariat et 16 responsables forment l’équipe des permanents qui animent ce projet.


Des réunions mensuelles regroupent, par îlots de quartier, les associations ou les habitant venus à titre individuel qui élisent des délégués, étudient et proposent des priorités. Une rencontre plénière, organisée dans chacune des 16 régions de la Ville, élit des conseillers qui se réunissent deux fois par semaine pour recueillir, organiser et rendre compatibles les projets émanant de la base. Des commissions transversales étudient, par ailleurs, les projets d’intérêt général pour la Ville. Le projet global finalisé est enfin remis au Conseil municipal qui peut le modifier tout ou en partie avant de le voter.


Lille


Lille, plus modeste dans son projet politique, a mis en place dès 1996 un projet qui vise, à partir du tissu associatif, à informer largement la population sur les enjeux des choix et des projets municipaux et à organiser la prise en compte de ses avis. Un adjoint au Maire et 5 chargés de missions forment l’équipe des permanents, un budget de 400’000 Fr suisses est affecté au projet. Un Conseil Co-mmunal de Concertation réunit 124 représentants, désignés pour 3 ans par leur Association (sport, économie, culture, médecine, communautés…). Il s’agit d’un service municipal autonome qui édite un journal. Des commissions de travail se saisissent de sujets précis et émettent des avis ou des recommandations remises aux élus lorsqu’ils abordent ces thèmes au Conseil municipal. Des commissions thématiques, réunissant élus et non élus, font le même type de travail de manière transversale. Un Forum devrait encore permettre de regrouper l’ensemble du tissu associatif, ainsi que les habitants non représentés au Conseil.


St Denis


St Denis, dès 1989, nomme un adjoint au Maire, 12 coordinateurs, un secrétariat, 28 personnes et un directeur, chargés de développer la démocratie participative, projet qui se voit attribuer un budget de 2,5 millions de FCH.


La municipalité choisit de découper le projet a partir des relations citoyennes de territoire, dans le but de recréer du lien et de la mobilisation sociale, détruits par la crise économique. Elle délocalise, dans ce but, l’administration communale. Pour ne pas reproduire un second niveau de représentation citoyenne, elle évite, par ailleurs, de formaliser une structure. Elle ouvre des lieux sans contrainte pour favoriser des démarches de quartier et organise des débats sur des sujets annoncés, à l’adresse de tout un chacun.


Les coordinateurs de quartier organisent et dirigent des réunions mensuelles portant sur l’un des 24 thèmes retenus pour l’ensemble de la Ville ou sur un thème propre au quartier. L’étape actuelle vise à mettre en place le budget participatif, afin de passer d’une démocratie de dialogue à une démocratie de codécision et de partage du pouvoir. Le groupe de travail de la délégation Porto Alegre, après cette première approche qui nous a permis d’évaluer le niveau d’organisation et de moyens à mettre en œuvre pour développer un projet local, pense à une seconde rencontre pour l’automne. Celle-ci devrait permettre de mettre à plat les modalités de partage des informations et des projets avec la population, telles que nos autorités exécutives les pratiquent ou les envisagent actuellement. Dans le même temps, les associations et les habitants seraient invités à exprimer leur point de vue et leurs attentes en la matière.


En élargissant prochainement notre groupe aux associations et aux personnes qui souhaitent préparer un projet pour notre cité, nous devrions être en mesure, au début de l’année prochaine, de faire des propositions concrètes au Conseil municipal pour décider des moyens à mettre en œuvre qui permettent à tous les habitants de la Ville qui le souhaitent de participer aux projets et aux propositions de décisions qui les concernent.


Notre groupe devra donc se déterminer prochainement quant à sa composition et à ses tâches: groupe de travail de type extraparlementaire, large coordination? Nous attendons des propositions et des points de vue critiques à ce sujet.