Cinéma : Peter Watkins, un homme en colère

Cinéma


Peter Watkins, un homme en colère


Rebelle, pacifiste, antimilitariste, libertaire, il reste fidèle à ses idéaux et, avec entêtement, dénonce depuis des années les complexes militaro-industriels, la puissance répressive des Etats, le sacage écologique, ainsi que la manipulation des médias et de la télévision.

Laure Geissbuehler

Peter Watkins occupe dans l¹histoire du cinéma contemporain une place inconfortable. Pour trouver la trace du britannique Peter Watkins dans un dictionnaire ou une histoire du cinéma, il faudrait engager un détective privé. Son oeuvre est restée confidentielle dans le meilleur des cas, et fut interdite de diffusion à plusieurs reprises. Spoutnik propose du mardi 16 au dimanche 21 octobre 2001 deux films majeurs de son oeuvre, longtemps escamotés des écrans: LA BOMBE (1965), film censuré en Grande Bretagne et PUNISHMENT PARK (1971), retiré de l’affiche quatre jours après sa sortie à New York, très rarement projeté en Europe. Une copie neuve, sous-titrée en français, est sortie à Paris le 18 mars 1998 (date anniversaire de la première insurrection de la Commune), grâce aux efforts conjugués de cinéphiles passionnés. Dans le cadre de cette présence des films de Watkins à Genève, Le Centre pour l¹image contemporaine organise une projection exceptionnelle de LA COMMUNE (version longue 5 heures 45) le samedi 13 octobre dès 16 heures. Saint-Gervais Genève, 5 rue de Temple. (Tél: 022/908 20 00)


LA BOMBE (THE WAR GAME), 1965, 60’, 35mm n/b vo angl. s-t. fr.


Commande officielle de la BBC, (puis interdit de diffusion pendant 20 ans par la même BBC) ce film est un stupéfiant “documentaire d’anticipation”, sur le déclenchement de la guerre atomique, et s’apparente à une version filmée de la Guerre des mondes d’Orson Welles. Construit à base de pseudo-images documentaires, le film de Watkins ne se contente pas de dénoncer la course aux armements: il dénonce les silences du pouvoir, l’absence de débats et le manque d’information du public. La méthode est celle du documentaire-fiction avec comme acteurs des habitants de Douvres. Projections: Spoutnik Me 17 oct., sa 20 à 21h et Di 21 à 17h


PUNISHMENT PARK, 1971, 88’, 35mm, coul., vo angl. s.-t. fr. 1970.


Le conflit au Vietnam s’aggrave. Le président Nixon a décidé secrètement le bombardement du Cambodge. Aux Etats-Unis, son gouvernement constitue une liste noire de citoyens américains opposés à sa politique. Watkins pousse cette paranoïa un peu plus loin: Nixon décrète l’état d’urgence et – c’est le présupposé de film- met en application le «McCarren Act», loi de 1950 qui autorise le gouvernement fédéral, sans nécessité d’en référer au Congrès, à placer en détention toute personne «susceptible de mettre en péril la sécurité intérieure». Dans une zone désertique, il plante le parc des punitions, où opposants et contestataires sont détenus et jugés expéditivement par un tribunal civil. PUNISHMENT PARK met à nu tout ce que le grand sourire de Mickey cachait, l¹oeuvre d’un Walt Disney qui serait passé aux actes, donnant un tour concret à ses invectives anticommunistes et antisémites, transformant ses gigantesques parcs d¹amusement en univers concentrationnaire. Projections: Spoutnik Ma 16 oct., Jeu 18 et Sa 20 à 21h.


LA COMMUNE, PARIS 1871, 2000, 5H45, vidéo, n/b, vo française


Quand il s’attaque à un moment mythique de l’histoire de la France et du monde, Peter Watkins s’insurge, dérange et bouscule. Pour créer une oeuvre cinématographique hors-normes, un documentaire en costumes, une fiction vraie. Et si le récit s¹appuie sur une recherche historique approfondie, c¹est pour mener une réflexion sur le présent. Nous sommes en mars 1871, et tandis qu¹un journaliste de la télévision versaillaise diffuse une information lénifiante, tronquée, se crée une télévision communale, émanation du peuple de Paris insurgé. Dans un espace théâtralisé, devant une caméra travaillant en plans-séquences, plus de 200 acteurs non-professionnels se mettent dans la peau des personnages de la Commune. Projections: Centre pour l¹image contemporaine Sa 13 oct. dès 16 h.