Femmes en mouvement: l’égalité absolument !

Femmes en mouvement: l’égalité absolument !

Vingt ans après la grève
nationale des femmes de 1991, il reste beaucoup à faire. Le 14
juin 2011 sera l’occasion de commémorer les luttes
victorieuses du mouvement féministe (les 40 ans du droit de vote
des femmes en Suisse ; les 30 ans de l’article constitutionnel
sur l’égalité ; les 15 ans de la loi sur
l’égalité dans les rapports de travail), mais
surtout de rappeler l’importance d’un combat qui est loin
d’avoir renversé sexisme, patriarcat, discriminations et
inégalités. Entretien avec Valérie Buchs,
secrétaire syndicale au SIT et membre du Collectif 14 juin.

Depuis 1991, l’égalité hommes-femmes a
progressé sur quelques points, mais grosso modo les
revendications sont toujours les mêmes…

Nous avons gagné sur le congé maternité
payé, qui est de 16 semaines à Genève (14 en
Suisse), et sur l’introduction de la loi fédérale
sur l’égalité entre femmes et hommes dans les
rapports de travail. La grève de 1991 a incontestablement
joué un rôle dans l’acceptation de ces deux objets.
En revanche, dans les faits, on constate parfois un certain recul par
exemple lorsque les écarts de salaire entre hommes et femmes
recommencent à se creuser…

    Il reste beaucoup à faire, et dans tous les
domaines ! Il manque 4000 places de crèche à
Genève, le partage des tâches est loin d’être
acquis, la violence conjugale persiste, la publicité est de plus
en plus sexiste, le congé paternité perce
difficilement… Si les femmes enregistrent une meilleure
participation sur le marché du travail qu’en 1991, elles
restent majoritaires à temps partiel. Leur formation aussi
s’est améliorée, mais il subsiste un plafond de
verre que seules quelques rares femmes dépassent. Il y a
même des domaines où l’on régresse, si
l’on prend par exemple l’initiative qui veut supprimer le
remboursement de l’IVG…

Quel regard portes-tu sur l’évolution du combat féministe ces vingt dernières années ?

On constate d’une part un affaiblissement du mouvement autonome
des femmes, et d’autre part une professionnalisation de certaines
militantes très engagées dans leur activité
professionnelles, des partis ou des syndicats. De manière
générale, le combat féministe est perçu
comme moins urgent. Car au niveau de la loi, et dans la
société aussi, il y a eu des avancées en faveur
des femmes. Les discriminations les plus grossières ont
été adoucies. En même temps, la question a
été beaucoup plus thématisée au cours de
ces dernières années, dans les partis, les
syndicats… Pourtant, dans la réalité, de fortes
inégalités subsistent. Dans les nouvelles
générations, la perception de ces
inégalités se fait de manière plus individuelle,
il n’y a plus vraiment de prise de conscience collective et
d’engagement politique. Les femmes se rendent compte des
discriminations qu’elles subissent une fois qu’elles les
vivent au quotidien, par exemple lorsqu’elles se mettent en
couple, qu’elles ont un enfant ou encore qu’elles occupent
leur premier emploi.  

    Je crois que la crise économique va renforcer
cette situation. On voit déjà que les politiques
néo-libérales et anti-étatiques mises en place
touchent particulièrement les femmes. Elles sont majoritairement
touchées par le chômage, et les secteurs qui emploient
surtout des femmes (soins à la personne, services publics p.ex)
sont les premières victimes de la crise. Quant à la crise
du logement, elle constitue une difficulté supplémentaire
en cas de divorce…

Quels sont les objectifs de la mobilisation du 14 juin ?
Comment prévoyez-vous le déroulement de cette
journée ?

L’idée de cette journée a été
lancée par le Congrès des femmes de l’USS. Des
comités unitaires de préparation se réunissent
dans plusieurs cantons, notamment en Suisse romande. L’ensemble
des syndicats, partis de gauche et associations féministes ont
répondu à l’appel. Différentes
activités sont prévues : des actions de soutien
aux travailleuses de l’économie domestique, des
mobilisations sur les lieux de travail et dans la rue à
14 h 06, une manifestation en fin
d’après-midi, une soirée festive…

    Nous voulons rappeler la nécessité de
se battre pour l’égalité des sexes dans toutes les
sphères de la société. Les revendications
qu’expriment les mouvements féministes, comme le
congé parental ou une meilleure répartition du temps de
travail, concernent aussi les hommes. Nous souhaitons de leur part une
mobilisation qui soit concernée plutôt que solidaire.

Propos recueillis pour solidaritéS

par Giulia Willig