Francesco Tristano joue Bach et Cage
Francesco Tristano joue Bach et Cage
Comme le disait Godard à propos
des fondateurs du cinéma : ils auraient pu
sappeler « Abat-jour », ils se
nommaient Lumière. Le plus grand génie de la musique
aurait pu être baptisé Stein ( pierre ), il
se dénommait Bach ( ruisseau ).
Le musicien dont il est question ici, Francesco Tristano
Schlimé, est né en 1991. Il aurait pu avoir un nom de
famille plus approprié ( Schlim se traduit par
« pire » en français ). Pour
son premier disque chez Universal, il a préféré y
renoncer. Pourtant cest sous ce nom là quil a
publié plus de vingt CD, autant en classique de
Frescobaldi à Nono quen Electro. Car Francesco
Tristano sest fait aussi un nom dans les discothèques
dIbiza et dailleurs !
Avec ce disque, vous écouterez un piano,
comme vous ne lavez jamais entendu
« sonner ». Etait-ce bien nécessaire
pour la musique de Bach ? A vous de juger ! Le ton est
donné dès le prélude de la première Partita
de Jean Sébastien Bach. Ce nest pas toujours
« charmant », mais cest toujours
intéressant. Jamais les lignes mélodiques ne se sont
développées avec une telle clarté. Une Partita
réinventée, lune des rares uvres
éditées par le maître de lArt de la fugue.
Les basses sont « charnues », précises
sans être lourdes, les aigus lumineux ! Un enregistrement
aux antipodes des prises de son habituelles de la Deutsche Gramophone
Gesellschaft. Pour appuyer sa rhétorique, Francesco Tristano
joue des trilles liquides, fluides : un poète qui cherche
à nous dire quelque chose. La Gigue qui conclut luvre
vous électrisera !
John Cage ( 1912-1992 ), sest
notamment illustré pour ses recherches sur les sonorités.
Francesco Tristano et son producteur Moritz von Ostwald ont
prolongé les expériences de ce compositeur
davant-garde, en travaillant les sons du piano lors de la
post-production. Cest ainsi que la tranquille composition
minimaliste In a landscape se métamorphose au gré des
interventions des ingénieurs du son. Le timbre du piano se mue
progressivement en cloches mystérieuses. Le chant musical
souvre aux champs des possibles.
Un parcours musical, une aventure à partager, et un gag à
savourer à la fin de lalbum, un Menuet de Bach que
naurait pas renié Walter Carlos, larrangeur de la
musique du film Orange mécanique.
Daniel Kunzi
Bach-Cage, Francesco Tristano, Universal music 2011