Trois grains de sucre sur une pilule amère

Le projet de budget 2017 du Conseil d’Etat reflète des choix politiques clairs: trouver une courte majorité au centre pour tenter de calmer les esprits, le temps de faire passer en votation populaire la Troisième réforme de l’imposition des entreprises (RIE 3).

Pourtant, ce projet de budget 2017 (PB 2017) n’a rien d’un véritable compromis. En effet, il s’inscrit dans la droite ligne des budgets d’austérité de ces dernières années puisqu’il poursuit les coupes linéaires de 1% sur les charges de personnel et les subventions en 2017. Le gouvernement maintient donc une année de plus les mesures les plus contestées, auxquelles il s’était engagé à renoncer en acceptant le point 13 du Protocole d’accord avec les syndicats du 17 décembre 2015. Mais surtout, ce budget ne prévoit que 64,5 millions supplémentaires pour répondre à l’explosion des besoins de la population. Il s’agit d’une marge de manœuvre dérisoire, dégagée de surcroît grâce à des économies supplémentaires réalisées sur l’exercice 2017.

Les principaux amendements proposés par EAG

Face à cette logique d’austérité, étant donné que le Conseil d’Etat a réduit les charges budgétées de 27,9 millions – laissant ainsi au Grand Conseil une marge de manœuvre de ce même montant pour répondre à certains besoins prépondérants de la population. La Coalition Ensemble à Gauche proposons de:

I Sur le budget de fonctionnement

A refuser

  • une baisse de 1 000 000 fr. de la subvention aux EMS présentée par le Conseil d’Etat. Il est en effet inacceptable de réduire cette dotation, alors que la prise en charge et le personnel soignant ne sont pas suffisants.

B voter

  • un montant de 829 561 fr. pour la Fondation officielle de la jeunesse (FOJ) ; le montant que nous proposons d’ajouter correspond aux sommes supprimées en 2015 et 2016.
  • un montant de 2 200 000 fr. pour l’Université de Genève qui fait face à une nouvelle coupe de 1% sur ses subventions. Ce montant permettra de supprimer les nouveaux frais administratifs à la charge des étudiant·e·s et de répondre à l’augmentation du nombre des étudiant·e·s de 2015 à 2017.
  • un montant de 8 024 000 fr. pour l’Hospice général qui, depuis 10 ans, a dû faire face à un doublement des demandes d’aide sociale sans aucune hausse de sa subvention de fonctionnement. Le PB 2017 prévoit une réduction de la subvention de 2 024 600 fr., ce qui correspond à la suppression d’environ 30 postes. De surcroît, le déficit de fonctionnement devrait atteindre 6 millions, soit l’équivalent de 50 postes, qu’il faudra supprimer en 2018… Afin de stopper cette hémorragie, nous nous opposons donc à la coupe au PB 2017 et proposons une dotation supplémentaire de 6 000 000 fr. pour couvrir le déficit annoncé.
  • un montant de 8 942 000 fr. pour les Transports publics genevois ; nous entendons rétablir le montant de la subvention prévue réduite par le PB 2017. Il ne s’agit évidemment que d’un pis-aller par rapport aux besoins des TPG, dont nous attendons bien plus pour vraiment contribuer à accélérer la transition modale du transport motorisé individuel, notamment vers le transport public collectif!
  • un montant de 6 800 000 fr. pour l’Institution de maintien, d’aide et de soins à domicile (IMAD) ; l’IMAD a besoin de 5 300 000 fr. supplémentaires pour honorer son contrat de prestations 2017, auxquels il faut ajouter 1 500 000 (part de l’institution au financement des annuités et des cotisations CPEG), et ceci ne tient pas compte d’un déficit structurel de 3 millions qui devra être couvert en puisant encore dans les fonds propres.

II Sur le budget d’investissement

D voter

  • une baisse de 10 286 948 fr. sur le crédit d’ouvrage 1011254 – Les Dardelles (Brenaz III). Nous estimons que la construction d’un nouvel établissement fermé d’exécution de sanctions pénales de 450 places doit être reconsidérée en privilégiant des solutions moins coûteuses, mais surtout en développant des alternatives aux peines privatives de liberté pour les petits délits.

Une Sainte-Alliance pour la RIE 3: à quel prix?

L’analyse des grands axes du PB 2017 du Conseil d’Etat montre qu’il poursuit sans coup férir le plan d’austérité concocté en 2015. Il continue la réduction du train de vie de l’Etat pour ne pas remettre en cause les baisses d’impôts accordées aux privilégié·e·s depuis une quinzaine d’années, qui péjorent déjà les recettes fiscales de plus d’un milliard de francs par an, favorisant la hausse de l’endettement, comme le rationnement des services publics et des prestations sociales.

Pour leur part, le PLR et l’UDC sont convaincus qu’il faut aller encore plus vite vers la privatisation de certains services publics, vers la mise en cause des salaires et des retraites de l’Etat, vers la baisse des barèmes de l’aide sociale, vers la hausse des tarifs des TPG, vers le démantèlement de la LDTR, etc. Cependant, dans l’immédiat, ils ont tout intérêt à laisser le gouvernement manœuvrer « au centre », crédibilisant par là leurs critiques envers un compromis « trop coûteux », pour préparer les conditions d’un durcissement de l’offensive après l’adoption souhaitée de la RIE 3.

Ainsi, ce projet de budget doit être combattu au parlement, mais aussi et surtout dans la rue. La mobilisation du 15 décembre est importante pour envoyer un signal fort aux élu·e·s. Mais au-delà, c’est aussi la mise en échec de la RIE 3 tant au plan fédéral que cantonal qui permettra de modifier le rapport de force et d’éviter cette logique d’austérité.

Pablo Cruchon