PV2020

PV2020 : «Poursuivons nos efforts pour faire aboutir le référendum!»

La rédaction s’est entretenue avec notre camarade Agostino Soldini, l’un des animateurs du comité référendaire national contre la Loi sur la prévoyance vieillesse 2020 (PV 2020), afin de faire le point sur cette bataille.


Un 1er Mai sous le signe de la lutte contre PV2020 (Genève) – Demir Sönmez

La récolte des signatures avance bien. Nous en sommes déjà à près de 30 000 signatures, n’est-ce pas?

En effet. Au départ, les noyaux pour mener cette bataille étaient très réduits. Pour l’essentiel, il s’agissait de quelques secteurs syndicaux au sein d’Unia et du SSP, dans les cantons de Vaud et Genève en premier lieu, et de solidaritéS, dont la participation a été décisive. Mais cela avance, le front contre PV2020 s’élargit. Nous allons devoir poursuivre nos efforts jusqu’au bout, mais l’aboutissement du référendum est en ligne de mire.

En dehors de la Suisse romande, la dynamique est toutefois faible, ce qui est quand même problématique, non?

Si. Mais au Tessin, Unia se mobilise fortement pour le référendum. En Suisse alémanique, les choses bougent aussi. Les Jeunesses socialistes (Juso) ont pris position contre PV2020. Or, elles disposent d’un réseau militant significatif. De même, la rédaction de K-Tipp, la publication de l’une des associations de consommateurs·trices, a décidé d’encarter la feuille-référendaire dans la prochaine édition de son journal.

Du côté du PSS, en revanche, la consultation interne a donné un résultat clairement en faveur de PV2020.

Oui, et je pense que cela en dit long sur la nature de ce parti. Tant la participation que l’issue de la consultation traduisent le fait qu’il n’a plus grand-chose à voir avec une force social-démocrate au sens traditionnel du terme. Loin de tout projet réformiste, son horizon se réduit à la participation pérenne, dans le cadre d’une politique de collaboration de classe consolidée avec les partis de droite, au gouvernement de l’Etat bourgeois. Depuis le début des années 90, cela a ainsi amené la direction du PSS à assumer de manière active la mise en œuvre de contre-réformes néolibérales, mâtinées, dans la mesure où ses partenaires de droite le permettaient, d’un peu de social.

Les exemples sont légion: démantèlement des ex-Régies fédérales, libéralisation du marché du travail (bilatérales), etc. Dans cette affaire PV2020, le but de la direction du PSS est justement de confirmer son statut de partenaire gouvernemental incontournable, les dernières élections fédérales ayant amené quelques secteurs patronaux et leurs relais politiques à envisager de poursuivre la mise en œuvre des contre-réformes néo-libérales en se passant du PSS (voir RIE 3).

La direction du PSS prétend plutôt que ce sont les référendaires «qui font le jeu de la droite»

C’est de bonne guerre. Il est vrai que lors des débats parlementaires, on a assisté à une « polarisation » entre deux coalitions – l’une dite de « centre-gauche », l’autre de droite – mais elles convergeaient sur l’essentiel: la hausse de l’âge de la retraite, la baisse du taux de conversion, etc. Leurs divergences ne portaient que sur les « compensations » à prévoir.

De plus, il serait abusif de qualifier PDC, PBD et Verts libéraux – qui soutiennent PV2020 – de forces de « gauche », même vaguement. Faut-il rappeler que Gerhard Pfister, le président du PDC, est «un admirateur de Margaret Thatcher» (Tribune de Genève, 28 avril 2017)? Plus généralement, si Economiesuisse et l’USAM s’opposent à PV2020, d’autres organisations patronales ont pris position en faveur de ce projet: l’Association suisse d’assurance (ASA), le Centre patronal vaudois, la Fédération romande des entreprises, etc. Enfin, ce qui est décisif, c’est le contenu de PV2020. Or, il s’agit clairement d’un projet dont le but essentiel est de nous faire travailler plus longtemps et qui ne permettrait en rien de faire face à la baisse en cours de notre salaire différé (nos rentes vieillesse).


Un 1er Mai sous le signe de la lutte contre PV2020 (Lausanne) – Gustave Deghilage

Il n’en demeure pas moins que tant Christian Levrat que Ruth Dreifuss affirment que si PV2020 était refusé, on aurait droit aux 67 ans pour toutes et tous!

En effet, mais cette logique ne tient pas la route. Agiter l’épouvantail des 67 ans ne vise qu’à minimiser les conséquences de PV2020, dont l’entrée en vigueur représenterait un recul majeur: ouvrières, caissières et secrétaires – souvent déjà usées par des décennies d’exploitation patronale – seraient obligées de trimer une année de plus! De surcroît, la hausse à 67 ans n’aurait aucune chance de passer en votation populaire. Pour aller jusque-là, une étape préalable s’impose: augmenter à 65 ans l’âge de la retraite des femmes. Est-ce que l’acceptation par le PSS, lors de la 10e révision de l’AVS, de la hausse de l’âge de la retraite des femmes de 62 à 64 ans a-t-elle freiné la volonté patronale d’aller plus loin?

Et au plan syndical, quelle est la situation?

Le mouvement syndical a délégué la gestion de PV2020 aux parlementaires du PSS, se contentant d’un statut d’observateur et renonçant ainsi à sa raison d’être: stimuler la mobilisation collective des salarié·e·s pour faire face aux attaques patronales. C’est une logique qui réduit le syndicat au rang de courroie de transmission du PSS, si ce n’est du Conseil fédéral lui-même.

Heureusement, des oppositions fortes se sont exprimées tant à Unia qu’au SSP. Il s’en est d’ailleurs fallu de peu pour que nous soyons majoritaires! Les secteurs les plus combatifs de ces deux syndicats ont décidé de mener la bataille jusqu’au bout, malgré pressions et menaces, ce qui est à saluer. Quant à la direction de l’USS, elle va mettre le paquet pour donner un coup de main à son ministre Alain Berset, en investissant des centaines de milliers de francs, si ce n’est 1 million, pour faire passer ce projet antisocial. Les fondateurs du mouvement ouvrier – dont l’un des éléments constitutifs, rappelons-le, était la lutte pour la réduction du temps de travail – doivent se retourner dans leur tombe… Mais l’affaire est loin d’être jouée: nous pouvons gagner!