Lâche renvoi de familles de réfugiés

Le 26 juillet dernier au petit matin, la gendarmerie vaudoise a brutalement arrêté au Centre EVAM de Vennes à Lausanne une famille de réfugiés pour son renvoi Dublin vers Nice. En l’absence de la fille ainée alors en camp de vacances, la gendarmerie a laissé le père sur place pour emmener la mère et les trois filles cadettes (de 2, 4 et 10 ans), sans les autoriser à s’habiller et à faire leur bagage.

La femme et les enfants ont été livrées à la police de l’aéroport de Cointrin, la femme entravée aux mains et aux pieds durant le vol, placée derrière ses enfants, avec interdiction de se rendre aux toilettes. Avec ses effets aussi humiliants que traumatisants, cette nouvelle arrestation et expulsion d’une famille séparée témoigne d’un significatif durcissement policier à l’égard des exilé·e·s attribué·e·s au Canton.

Rappelons que depuis un an, nous avons été témoins:

  • de l’arrestation et du renvoi de deux jeunes réfugiés qui avaient pris part à une course de solidarité sur le stade de Dorigny ;
  • des perquisitions policières intimidatrices au domicile de quatre des parrains et marraines de réfugié·e·s menacés de renvoi.
  • de l’arrestation à l’établissement EVAM de Leysin et de la séparation de la famille afghane Hassani pour renvoi partiel en Norvège puis, probablement, en Afghanistan ;
  • de l’audience de deux personnes, menacées de renvoi Dublin, les fers aux pieds devant la justice de paix ;
  • de la surveillance policière constante dont fait l’objet le Collectif R abrité par la Paroisse lausannoise du Sacré-Coeur, etc.

Respect de l’unité de la famille

Le 19 septembre dernier, au Grand Conseil, l’expulsion de la famille Hailu a fait l’objet d’une interpellation au Conseil d’Etat de la part de Jean-Michel Dolivo au nom du groupe Ensemble à gauche: en question, le droit fondamental au respect de l’unité de la famille. Elle s’est accompagnée d’une interpellation formulée par Serge Melly (Alliance du centre) sur le même sujet. Les deux interpellations ont été rejetées de peu par le Grand Conseil, désormais orienté très à droite.

Certes, les décisions d’expulsion sont celles du Secrétariat d’Etat à la migration (SEM). Certes, nous n’ignorons pas l’ignoble chantage financier auquel Simonetta Sommaruga, Cheffe du Département fédéral de justice et police, soumet le canton de Vaud après avoir dénoncé son «laxisme» en matière de renvois de réfugiés. A ce chantage financier il n’y a néanmoins aucune nécessité de céder. Le Canton de Vaud dispose de finances assez saines pour suppléer à l’éventuel manque à gagner impliqué par les mesures de rétorsion de la Confédération. Le gouvernement précédent n’a-t-il pas proposé de diminuer l’impôt sur les entreprises de 22, 3 % à 13, 8 % (RIE 3 vaudoise)?

L’Etat de paix et le relatif bien-être matériel que nous affichons interdisent toute infraction aux droits de l’homme, de la femme et de l’enfant, et toute atteinte à leur dignité, en particulier quand il s’agit de réfugié·e·s en situation d’extrême précarité. De même qu’il y a une désobéissance civile face aux lois et traités meurtriers, de même existe-t-il aussi un devoir de désobéissance politique.

Claude Calame