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RFFA : Pays pauvres pillés, justice fiscale piétinée!

On vote le 19 mai sur la RFFA. Le 28 mars, la campagne du non, à laquelle solidaritéS participe activement, a été lancée. Sur le sujet, voici un résumé de l’intervention de Sébastien Guex au 7e Forum contre la spéculation sur les matières premières.

Renforcer le paradis fiscal suisse

Contrairement à ce que peuvent dire les partisans de la réforme RFFA, son objectif premier est de renforcer la place de la Suisse dans la concurrence internationale. Malgré sa petitesse, la Suisse est depuis très longtemps un lieu attrayant pour les entreprises, car elle est l’un des États avec l’une des fiscalités les plus faibles au niveau mondial. Depuis des années, l’Union Européenne et l’OCDE font pression pour mettre fin aux statuts spéciaux dont jouissent les multinationales. La RFFA apparaît donc comme une solution parfaite pour en finir avec ces statuts tout en renforçant l’attractivité du paradis fiscal suisse.

Mais sous prétexte d’en finir avec un régime qui n’est plus toléré, la RFFA introduit de nouveaux privilèges grâce auxquels ces sociétés ne paieront pas un franc de plus! Le montant des profits qui sera soumis à l’impôt est exclu du débat public. En effet, si elle est acceptée, la RFFA introduira trois outils (Patent Box, déductions des dépenses de recherche et développement, déduction des intérêts notionnels – voir solidaritéS 300) permettant aux entreprises de réduire jusqu’à 70% de la matière imposable. Et avec une baisse d’environ 40% du taux d’imposition, la Suisse relancera un nouveau cycle de concurrence fiscale vers le bas à l’échelle internationale, mais aussi entre cantons.

Au plan cantonal, ces trois instruments pourront être combinés, pour être les plus compétitifs possible. De plus, en cas d’acceptation, la réforme RFFA entraînera une modification de la péréquation financière (système de redistribution des recettes fiscales entre cantons «riches» et «pauvres», ndlr). Ceux qui seront les plus agressifs quant à la baisse de l’imposition des entreprises se verront récompensés selon la nouvelle formule de la péréquation. Autrement dit, ils recevront de l’argent pour la seule raison d’avoir fait des cadeaux aux cercles capitalistes.

Pour Sébastien Guex, le bilan est clair: «La RFFA va donner un puissant coup d’accélérateur à cette spirale vers le bas que représente la concurrence fiscale entre les cantons, pour le plus grand profit des grandes entreprises, de leurs actionnaires et de leurs dirigeants». Et elle «ne va pas diminuer mais renforcer l’attractivité du paradis fiscal suisse». Il cite le spécialiste des questions fiscales de l’ONG Alliance Sud, Dominik Gross: «L’objectif de la RFFA, c’est donc bien que notre pays reste à la pointe du système mondial d’évasion fiscale» (Services Publics, 8.3.2019).

Pomper les recettes fiscales des pays pauvres

Or le président du PSS, Christian Levrat, reconnaît que «le déplacement de bénéfices réalisés par les multinationales et la fuite de fortunes acquises de manière illégales enlèvent des milliards aux pays en voie de développement» (NZZ, 5.10.2018). De ce fait, en attirant des sociétés étrangères ici, la Suisse pompe des recettes fiscales très importantes pour différents pays à travers le monde. Et parmi ces sociétés, bon nombre sont actives dans le commerce et l’extraction de matières premières!

Selon les estimations d’Alliance Sud, les pertes de recettes fiscales pour les pays pauvres pourraient s’élever à 200 milliards de dollars par an, en raison de déplacements des bénéfices des multinationales dans des pays comme la Suisse.

Les conséquences de ce dumping fiscal sont donc désastreuses pour les pays périphériques. Sébastien Guex conclut ainsi: «cette prédation de ressources fiscales veut dire […] que des millions de personnes seront privées d’accès à des biens et services indispensables, comme la nourriture de base, les soins et l’éducation élémentaires, l’eau et les installations sanitaires, la sécurité sociale, la justice. Bref, ce sont des milliers et milliers de morts prématurées et des millions de vies brisées».

C’est notamment pour cela que nous appelons à rejeter cette réforme le 19 mai!

Gabriella Lima



Alexandre Salama

Cette année les conférences et ateliers du forum sur la spéculation sur les matières premières traitaient notamment du commerce de l’or et de la situation au Brésil à la suite de la rupture du barrage minier de Brumadinho appartenant à Vale. La manifestation du mardi 26 mars s’est conclue par une cérémonie de mariage loufoque entre Ignazio Cassis et Glencore.