L'art de la fausse générosité

L'art de la fausse générosité : LA GRAINE DU MONOPOLE

Bill Gates a accumulé une fortune colossale. En créant la Fondation Gates, d’une dotation globale de 43,5 milliards de dollars, il est devenu un « philantrocapitaliste ». Le livre de Lionel Astruc revient sur cet art de la fausse générosité.

Bill et Melinda Gates

L’action de la Fondation Gates s’étend sur plus d’une centaine de pays. Douzième donatrice mondiale en 2013, elle verse plus d’argent que des pays comme la Belgique, le Canada, le Danemark, l’Irlande et l’Italie et est devenue un acteur très influent dans les domaines de la santé et de l’agriculture. La Fondation finance un réseau d’organisations internationales, d’ONG et d’universités et figure à la cinquième place des plus gros bailleurs de fonds pour l’agriculture dans les pays en développement.

Ces projets de financement vont directement vers d’autres grandes entreprises mondiales, car Gates privilégie exclusivement des solutions techniques pour lutter contre la pauvreté et les maladies. S’il est incontestable que certaines campagnes de vaccination ont été des succès, par exemple pour lutter contre la poliomyélite, la plupart des projets sont discutables.

L’intervention en matière agricole privilégie la technologie et les sociétés américaines au détriment de l’expérience des paysan·ne·s et des forces locales. Les projets de Gates deviennent la politique agricole dominante et représentent une source de financement pour des produits des grandes multinationales (OGM, pesticides, machines).

De plus, les effets de ces politiques ne sont jamais évalués et ne sont pas soumis à un quelconque contrôle démocratique. La Fondation privée ne compte que trois administrateurs·trices: le couple Gates et le milliardaire Warren Buffett.

Cette influence démesurée aboutit finalement à contourner les systèmes publics de santé et à financer des projets convenant parfaitement à l’industrie pharmaceutique. Ainsi la recherche relative à des maladies ne nécessitant pas de nouveaux vaccins – synonymes de revenus pour la pharma – comme la pneumonie, la diarrhée et la sous-nutrition maternelle et infantile, est relativement peu financée par l’organisation. Or ces maladies sont responsables de 75% de la mortalité enfantine.

José Sanchez