Les peuples résistent et l’espoir persiste

Un génocide en direct, sponsorisé par les pays occidentaux. Le cataclysme écologique, tous les jours plus tangible et meurtrier. La misogynie, la transphobie et les violences LGBTIQphobes dopées par les algo­rithmes. Une extrême droite qui continue de progresser, jusqu’à (re)prendre le pouvoir – aux États-Unis dernièrement. Un racisme qui imprègne tous les partis de gouvernement occidentaux… L’année 2024 qui s’achève a vu s’approfondir les tendances de fond d’un monde à la dérive. Partout, les conditions de la «possibi­lité du fascisme» semblent effectivement se mettre en place. 

Rassemblement des Syrien·nes de Suisse pour fêter la chute du régime d'Assad, place des Nations, Genève, 8 décembre 2024
Rassemblement des Syrien·nes de Suisse, place des Nations, Genève, 8 décembre 2024

Lénine postulait que la révolution est possible quand ceux d’en haut ne peuvent plus, ceux d’en bas ne veulent plus et ceux du milieu peuvent basculer. À certains égards, la situation actuelle porte peut-être en son sein les germes d’une telle dynamique révolutionnaire.

Ceux d’en haut ne peuvent plus. Les classes dominantes sont effectivement confrontées à un sérieux problème: «ralen­tissement de la productivité, plus hausse des coûts de production, ça commence à sentir le roussi pour la rentabilité réelle du capital», comme le dit Jean-Marie Harribey. Cette dynamique porte ainsi atteinte au capitalisme financiarisé en son cœur, sur fond de crise de la reproduction sociale. Avec elle, les mirages du capitalisme vert s’effondrent, à la suite des arrêts successifs des projets liés à la «transition» écologique. 

Les cures d’austérité et la pression sur les salaires, stagnants depuis des années et rabotés par l’inflation, provoquent des colères sociales, voire la chute de gouvernements comme en France. Attiser la défiance et la haine de chacun·e envers tou·tes les autres semble être la seule façon de détourner la révolte.

Et ceux d’en bas ne veulent plus. En 2024, des peuples ont justement fait éclater leur légitime colère. Grèves en Italie et en Argentine contre l’austérité de gouvernements d’extrême droite; mobilisation populaire pour le NFP contre le risque d’une accession au pouvoir du Rassemblement National en France; manifestations massives en Géorgie pour une certaine idée de la liberté, etc. Même en Suisse, pays de droite gangréné par la psychose austéritaire, l’avis des doctes comptables de l’État a été contredit par l’acceptation de la 13e rente AVS et refus de la contre-réforme LPP. 

Toujours cette année, deux gouvernements sont tombés sous l’effet de révoltes populaires. Durant l’été, des manifestations contre la corruption ont fait fuir la première ministre népotiste bangladaise Sheikh Hasina. En décembre, une offensive rebelle éclaire et des soulèvements populaires ont fait tomber une dictature vieille de 54 ans et forcé Bachar el-Assad à fuir. Comme l’écrit Wafa al-Karamah dans ce numéro, cette révolution «donne l’espoir pour une libération de la région et du monde en général des tyrans et des bouchers»

Cette année encore notre camp social et politique a connu «davantage de soirées défaites que de matins triomphants», comme le disait Daniel Bensaïd. Il faut toutefois savoir nous nourrir de ces derniers, d’où qu’ils viennent, chaque fois que nous en avons l’occasion. 

Suivant la ligne de fracture entre le Nord et le Sud, la solidarité internationale semble se renforcer contre les gouvernements occidentaux, du soutien à la Palestine aux négociations climatiques. Charge à nous de continuer à porter cette dynamique en Suisse et faire basculer ceux du milieu avec nous. 

La rédaction