Salvemos el Prado: documentaire d’Arteseros

Salvemos el Prado: documentaire d’Arteseros

Le 1er juin 1939, le gouvernement de Franco réalisait son premier grand succès diplomatique à Genève. Au Musée d’Art et d’histoire, le Conseiller fédéral Pilet-Golaz inaugurait une exposition,consacrée aux chefs d’oeuvre de l’art espagnol. Ironie de l’histoire, ces toiles de Velazquez, de Goya, etc. avaient été transportées en Suisse, siège de la Société des Nations, par le gouvernement républicain espagnol pour les mettre à l’abri des bombardements fascistes.

Ce printemps, un documentaire signé par Alfonso Arteseros, «Salvemos el Prado – El frente del Arte en la guerra civil Espanola» (Sauvons le Prado, le front de l’art dans la guerre civile espagnole), est venu nous rappeler que la barbarie franquiste n’avait pas de limites. On n’arrêtera jamais de réécrire l’histoire; au début du film, un pilote fasciste explique qu’il se souvient avec émotion d’avoir lancé des petits pains (panecillos) pour nourrir les habitants de Madrid, assiégés par les troupes du général Franco! Naturellement, il n’a jamais largué de bombes sur «sa capitale». On croit rêver!! Mais des archives cinématographiques viennent nous montrer le cauchemar sanglant vécu par la population madrilène. Madrid a été sauvagement bombardée par les aviations mussolinienne et hitlérienne, appuyées par des avions franquistes.

Le musée du Prado a ainsi été atteint, légèrement, par des bombes, d’autres musées furent plus sévèrement touchés: le musée archéologique, le musée d’Art moderne, l’Académie des Beaux-Arts San Fernando, etc. Le poète Rafael Alberti explique que le gouvernement républicain espagnol décida de mettre à l’abri les plus importants chefs d’oeuvre artistiques espagnols: lui même a transporté les Ménines de Velaz-quez et Carlos V du Titien. En tout plus de 20000 tableaux furent ainsi placés dans les sous-terrains de la Banque nationale.

Le 5 novembre 1936, le gouvernement républicain fuyait à Valencia, les trésors artistiques, symboliquement, prirent la route avec lui…ce qui ne s’avéra pas sans difficultés, étant donné la dimension des tableaux, les bombardements, etc. Manuel Azana, président de la République espagnole estimait que «le musée du Prado est plus important que la monarchie et la république réunies». Septante et un camions, transportant plus de 140 tonnes d’oeuvre d’art suivirent ainsi le gouvenement espagnol à travers l’Espagne, et finalement traversèrent la frontière française, pour arriver finalement, en février 1939, à Genève siège de la Société des Nations. Leur arrivée avait été préparée par un Comité international formé à l’appel du gouvernement républicain.

Ces chefs d’oeuvre ont attiré plus de 400000 visiteurs en trois mois, un succès international exceptionnel pour l’époque. Lors de l’inauguration, les orateurs, remercièrent le gouvernement franquiste d’avoir prêté cette collection! Franco avait exigé que les organisateurs ne mentionnent pas pour quelle raison ces tableaux se trouvaient en Suisse. Le bénéfice de l’exposition, 350000 francs, fit le chemin du retour avec les oeuvres d’art!

Daniel KÜNZI

Salvemos el Prado, un documentaire de Alfonso Arteseros, 140 minutes (avec bonus), fr-anglais-esp-catalan, all. Borderdreams 2004.