Neuchâtel: forte mobilisation contre la politique d’austérité

Neuchâtel: forte mobilisation contre la politique d’austérité

Pressions et désinformation

Dans la semaine précédant le débrayage, bien que la Constitution neuchâteloise reconnaisse le droit de grève, de nombreuses pressions ont été exercées: ainsi, à l’Hôpital de la Chaux-de-Fonds, la direction a interdit l’affichage d’information sur la grève; dans les hôpitaux des Cadolles et de Pourtalès (Neuchâtel), la hiérarchie a interdit au personnel de se réunir pour organiser la participation des employé/es à la grève, tout en assurant un service minimum aux patients. Mais, dans plusieurs services, les directions n’ont pas accepté de faire remplir des listes, ce qui a torpillé en partie les manœuvres du Conseil d’Etat pour intimider les fonctionnaires.

Quant à la presse régionale, elle a battu des records de désinformation. Dès mercredi passé, elle relayait les informations hostiles à la grève: ainsi, la réponse du comité de mobilisation des associations du personnel cantonal pour répondre à la conférence de presse du Conseil d’Etat a purement et simplement passé aux oubliettes. Pire, le samedi 27 novembre, L’Express publiait une lettre rédigée soit-disant au nom du personnel de la commune de Saint-Blaise (hors du conflit en cours) par l’administrateur communal de cette localité: document rempli d’informations fausses quant à la situation réelle des fonctionnaires cantonaux… (hpr)

Comme ailleurs, l’austérité est à l’ordre du jour dans le canton de Neuchâtel. Pour tenter d’équilibrer son budget, le Conseil d’Etat in corpore tente de faire payer la note aux salarié-e-s de la fonction publique. Comme le relevait un gréviste, «ce n’est plus un budget, la politique gouvernementale relève du massacre à la tronçonneuse».

Parmi les mesures proposées:

  • l’abandon des subventions aux centres d’orthophonie de Neuchâtel, la Chaux-de-Fonds, Le Locle;
  • une restructuration des hôpitaux pour économiser en 4 ans 17,5 millions de francs;
  • diminution générale des normes de l’aide sociale, de l’ordre de 5%;
  • Réduction de 0,5% des cotisations de l’employeur à la Caisse de pension de l’Etat, mise à la charge des employées;
  • Limitation du renchérissement à 0,1% en violation d’un accord signé entre les associations du personnel et le Conseil d’Etat en 2001;
  • Dans les écoles primaires et enfantines, des coupes sombres dans les prestations, et pour faire bon poids bonne mesure, on imposera de même quelques «économies» dans les écoles secondaires et les lycées (suppression de classes et des options artistiques en 8ème maturité, augmentations des effectifs et des taxes à l’entrée du lycée);
  • Enfin, le projet de loi cantonale sur la création d’un établissement hospitalier multisite prévoit le passage du personnel (jusqu’ici sous contrat de droit public) à un statut de droit privé. Ce futur établissement serait de plus «indépendant de l’Etat» et bien sûr doté d’un conseil d’administration selon des critères propres à une entreprise privée.

L’ensemble de ces mesures a fait l’objet d’une annonce dans la presse régionale, le mardi 23 novembre 2004. Suite à une première manifestation à Neuchâtel, le 16 novembre, organisée par le Syndicat des services publics (SSP), la Société des magistrats et fonctionnaires (SMF), le Syndicat des employés des transports (SEV) – ainsi que par le Syndicat autonome des enseignants (SAEN) –, un préavis de grève a été déposé pour l’après-midi du 29 novembre. Outre ce préavis, le SSP a annoncé qu’en cas d’acceptation de la loi sur l’établissement hospitalier multisite dans la version concoctée par Monika Dusong (conseillère d’Etat «socialiste», sur le départ), un référendum serait lancé pour faire capoter ce balisage (à peine caché) d’une future privatisation de la santé1.

La mobilisation du 29 novembre a été plus importante que celle du 16 novembre. Dans le Haut du canton, plusieurs écoles – au niveau primaire et pré-scolaire – étaient fermées: 100% de grévistes; des délégations du personnel de divers services de la santé et de l’administration cantonale étaient présentes (malgré les pressions de la hiérarchie). Les rendez-vous de Neuchâtel et de la Chaux-de-Fonds, en début d’après-midi, ont regroupé sur ces deux villes 600 personnes. La manifestation (fort combative), partie à 16 heures de la Gare de Neuchâtel, a regroupé près de 1500 personnes et s’est terminée par une assemblée générale à la Cité universitaire.

Parmi les décisions prises, la présence au château le 30 novembre pour suivre les débats du Grand Conseil relatif à l’établissement hospitalier multisite, afin de lancer, si besoin est, le référendum; le lancement prochain d’une initiative fiscale cantonale pour mieux imposer les grandes fortunes, dans la ligne de la motion populaire déposée en décembre 2003 (qui sera en principe débattue par le Grand Conseil en décembre); une manifestation commune avec le syndicat UNIA, le 7 décembre, pour remettre la pétition contre la gestion de la caisse de pensions de l’Etat de Neuchâtel et une motion populaire sur l’apprentissage.

Hans-Peter RENK

  1. L’accord général sur le commerce et les services (AGCS), mitonné par l’Organisation mondiale du commerce, prévoit que toute branche rentable du service public a vocation à être privatisée.