« Frein à l'endettement »: NON au chantage néo-libéral!

« Frein à l’endettement »: NON au chantage néo-libéral!

A Genève, solidaritéS appelle à voter NON au projet de loi constitutionnelle instituant un «frein aux dépenses» cantonal. Cette loi s’inscrit dans la logique des pompiers-pyromanes néolibéraux qui vident les caisses de la collectivité, alourdissent la dette, pour ensuite pouvoir proclamer qu’il y a le feu à la maison et qu’il faut couper dans les prestations sociales et les services publics, au nom d’un «assainissement» indispensable des finances publiques.

Ce qui est proposé par ce projet de loi «9392» est un mécanisme obligatoire selon lequel toute loi portant sur des «mesures d’assainissement financier» sera soumise au corps électoral, «pour chacune de ces mesures réduisant les charges» ce vote opposera la mesure en question à «une augmentation d’impôts d’effets équivalent». En outre les électeurs-trices ne pourront voter ni 2xNON, ni 2xOUI.

Un mécanisme pervers…

D’abord, il donne rang constitutionnel au présupposé néolibéral qu’«assainissement financier» équivaut à «réduction de charges», donc baisse des prestations de l’Etat. Ceci alors que le chemin vers des finances plus «saines» passe en réalité par le fait d’annuler les cadeaux fiscaux aux plus riches – de l’ordre d’un demi-milliard par an ces dernières années – et par le fait d’aller chercher l’argent là où il est. Nos initiatives fiscales par exemple «Pour un rétablissement social des finances cantonales» sont de vraies mesures d’assainissement des finances cantonales, elles ne sont pas opposables à «une augmentation d’impôt» générique équivalente, puisque les mesures que nous proposons sont ciblées sur les milieux qui ont les moyens de les payer.

Ainsi ce mécanisme met – constitutionnellement – la balle dans le camp de la droite néolibérale et lui permettra de brandir l’épouvantail d’une hausse d’impôts égale pour tous – voire d’une hausse d’impôts ciblant les plus démunis si la mode des impôts dégressifs ou de la poll tax s’étendait – pour faire passer la pilule de ses mesures d’austérité antisociale.

Et antidémocratique!

En outre, ce mécanisme est parfaitement antidémocratique, même sur le plan formel, alors qu’il est vendu comme une avancée démocratique. En effet, à travers la clause abusive qui exclut le double NON (et le double OUI) les citoyen-ne-s seront certes «consultés» mais dans un vote dirigé qui exclut a priori des options parfaitement praticables. Nous avons, par exemple, fait campagne l’an dernier, avec succès, contre des coupes dans le revenu minimum des invalides et contre le démantèlement des mesures cantonales en faveur des chômeurs-euses, en présentant nos propositions fiscales comme alternative à ce type de mesures. Avec le système proposé, c’est la majorité parlementaire – de droite en l’occurrence – qui fait les questions et les réponses…

Il est donc important de se battre contre cette machine, contre le chantage institutionnalisé du choix forcé entre coupes antisociales et impôts injustes. Bataille difficile. En effet, la loi a un bel intitulé «pour une gestion saine et démocratique des finances publiques dans la durée» et… elle est d’origine socialiste, même si elle a été votée au final par la droite seulement.

Le projet initial, comportant ce même mécanisme a été déposé par le PS à l’automne 2004 comme réponse «innovatrice» à la «situation difficile» des finances publiques, en s’inspirant de l’art. 165 de la nouvelle constitution vaudoise. Certes, le projet PS prévoyait un déclenchement du mécanisme en question à certaines conditions et seuils de déficit et de dette seulement, mais – sur le fond – le «remède» était identique et était vanté par ses auteur-e-s comme chef d’œuvre de «pédagogie fiscale», comme «une explication objective et transparente à la population concernant le lien entre recettes fiscales et service public.»

Aujourd’hui, le PS appelle à voter NON, mais se retrouve un peu embarrassé pour mener une campagne claire. Les Verts quant à eux ciblent exclusivement l’aspect de antidémocratique du choix forcé… Le Conseil d’Etat à majorité rose-verte pour son compte appelle également à voter NON, ce qui est fort bien, mais argumente en promettant qu’il arrivera au même objectif par d’autres moyens, et les milieux syndicaux se sont réveillés tardivement… Un gros effort s’impose donc dans cette campagne si on ne veut pas offrir à la droite néolibérale une «légitimation» dans les urnes de ses pires projets…

Pierre VANEK