Rémy Pagani: une candidature de combat au Conseil administratif

Rémy Pagani: une candidature de combat au Conseil administratif

Fin avril, les électeurs-trices de la Ville élisent
l’exécutif communal, cinq semaines après les
élections au Conseil municipal. Lors de celles-ci la droite
n’a pas réussi son pari visant à reprendre la
majorité au Municipal, même si – en voix –
gauche et verts ont perdu la majorité du côté des
électeurs-trices et doivent leurs 2 sièges d’avance
au Municipal au fait que le MCG d’extrême-droite n’a
pas passé le quorum à 7% et que la dissidence
«droite libérale» a pris 1% des voix aux
libéraux.

Avec 12% des voix et 10 sièges «A Gauche Toute!»
(AGT) a néanmoins fortement reculé, reflet de la
régression réelle d’un certain nombre de
mobilisations sociales et syndicales, reflet d’une période
difficile face à une offensive néolibérale dont
les relais se retrouvent jusque dans les rangs d’une gauche
gouvernementale, comme on le voit – entre autres – au
Conseil d’Etat, reflet bien sûr aussi d’un ancrage
insuffisant de notre mouvement et de la coalition AGT dans le terrain,
dans les entreprises, dans les quartiers, dans la résistance au
quotidien des travailleurs-euses contre ceux qui les exploitent, dans
celles des plus démunis contre ces riches qui accaparent une
part toujours plus grande du gâteau.

Constat sans complaisance

Ce constat, nous l’avons fait au lendemain de cette
élection. La leçon à en tirer, au-delà des
bilans sur telle ou telle faiblesse de notre campagne, se trouve
«ailleurs». Comment construire «à
contre-courant» nos organisations, comment les renforcer en
formant de nouvelles générations de militant-e-s? Comment
mettre au centre de notre activité la reconstruction d’une
résistance sociale la plus forte possible, comment mieux donner
à chaque lutte un horizon dépassant celui d’un
système capitaliste portant en lui les inégalités,
la guerre et la destruction de notre environnement et qui aggrave
l’oppression des femmes? Comment se donner les moyens à la
fois de débattre de manière contradictoire et ouverte et
de s’unir pour agir? Comment ne pas sombrer dans le piège
d’une politique-spectacle, au décor en carton pâte
planté par les médias, et conserver une capacité
forte de résister y compris sur le plan institutionnel?
Voilà les questions posées.

Mais au lendemain de l’élection au Municipal se posait
aussi la question du «deuxième tour»
constitué par celle de l’exécutif. Tant
solidaritéS qu’AGT avaient décidé – en
AG – de ne pas trancher de notre présentation
éventuelle, avant l’élection du
«législatif» municipal. En effet, s’engager
dans un exécutif, face à un «parlement»
municipal majorisé par la droite, alliée à
l’extrême-droite, aurait été
problématique. Le signal donné ainsi d’une
perspective de «résister par en haut» aurait sans
doute été illusoire, ouvrant la porte aux accommodements
«réalistes» avec la majorité de droite, au
détriment d’une politique d’opposition
conséquente à gauche.

Se présenter ou non?

Mais, même avec la majorité des sièges au Municipal
acquise à la gauche et aux verts, le pari de
l’exécutif n’est pas évident. Pourtant, tant
solidaritéS qu’AGT ont estimé devoir mener ce
combat. D’abord parce qu’il aurait été
incompréhensible de faire cadeau d’un siège sur les
cinq à la droite, peu crédible aussi de se contenter
d’appeler à voter pour des candidat-e-s verts et PS pour
«barrer la route» à celle-ci. On a vu ce que
ça a donné au canton, où les magistrats Verts et
PS, élus avec nos suffrages, mènent une politique
antisociale qui nous oblige à une série de
référendums. Incompréhensible aussi qu’AGT,
dont le poids au municipal dépasse celui des Radicaux, du PDC,
de l’UDC se retire sur l’Aventin et refuse ce combat.

Ainsi, nous avons décidé de présenter un-e
candidat-e. Conformément aux décisions prises avant les
élections, celui-ci, puisqu’il s’agit de Rémy
Pagani, a été désigné en assemblée
de militant-e-s d’AGT, toutes formations confondues. Il y a
remporté 62 voix, contre 23 à Catherine Gaillard,
également candidate à la candidature. Ce choix avait
été débattu au préalable dans une AG de
solidaritéS, où Rémy avait aussi emporté
une majorité.

Une candidature… à gauche toute!

Cette candidature de Rémy Pagani correspond à une logique
électorale. Rémy qui était le deuxième des
candidat-e-s de solidaritéS sur la liste, n’avait pas
été désigné pour faire partir de la
«tête de liste» d’AGT et était en 5e
place. En tête de celle-ci nous avions présenté
Catherine Gaillard, pourtant malgré cette «mise sous le
boisseau» volontaire de notre part et parfaitement
acceptée par Rémy, il est arrivé en tête de
nos élu-e-s.

Pourtant, cette désignation n’a rien
d’électoraliste, au contraire, dans une élection
majoritaire, le profil combatif de notre camarade, syndicaliste
habitué des grèves et des conflits, engagé dans
toutes les batailles pour le logement depuis plus de 30 ans, du
côté des habitant-e-s et des occupant-e-s de logements
vides, résistant acharné à la politique
d’austérité et de privatisations avant, pendant et
après son passage comme député au Grand Conseil
pendant 8 ans… n’est pas le profil lisse d’un-e
candidat-e qui grappillera des voix au centre. D’aucuns
d’ailleurs mettent en avant son (long) passé syndical pour
affirmer qu’il ne saurait assumer le rôle
«patronal» de membre d’un exécutif ou pour lui
conseiller amicalement de rester «à sa place»
où il est si utile. Mais, précisément, c’est
parce que – avec ses qualités et ses défauts
– Rémy est particulièrement emblématique de
cette résistance sociale et syndicale dont nos élu-e-s
doivent être le relais, qu’il a été
désigné… et pas forcément parce qu’il
avait les meilleures chances d’être élu.

Comme l’écrivait un commentateur de la Tribune: «A
travers lui, c’est finalement toute l’orientation politique
du futur Exécutif que l’électeur doit
définir: soit on élit un gouvernement clairement
orienté à gauche, soit on décide de recentrer le
Conseil administratif sur le modèle du Conseil
d’Etat.» Chaque voix qui se portera sur lui est donc un
signal dans ce sens, chaque voix qui lui manquera à gauche ouvre
non seulement la porte de l’Exécutif à un-e
élu-e de droite, mais représentera un assentiment aux
politiques libérales ou social-libérales.

Avec le capotage des négociations frénétiques de
l’Entente bourgeoise avec le parti blochérien pour
représenter celui-ci par procuration et le maintien d’un
candidat UDC, Rémy a une (modeste) chance d’être
élu. S’il l’est, il l’aura été
à gauche, s’il ne l’est pas nous continuerons
à nous battre avec lui, sur le terrain qui est le nôtre.

Pierre Vanek