Marche mondiale, Rencontre avec le Conseil d'Etat

Marche mondiale à Genève


Rencontre avec le Conseil d´Etat


Une délégation de la Marche mondiale des femmes a rencontré deux membres du Conseil d´Etat genevois le 1er novembre, comme prévu le 14 juin.


Le 14 juin, les déléguées avaient été reçues avec champagne et intérêt par le Conseil d´Etat. Le 1er novembre, l´intérêt a baissé. Martine Brunschwig-Graf n´est pas au rendez-vous, Guy-Olivier Segond est pressé et distrait. L´état des lieux des 13 revendications doit être présenté en moins d´une heure.


Une revendication s´est déjà réalisée: la pilule d´urgence (du lendemain) peut être distribuée au Centre de planning familial1. Deux revendications sont sur le point d´aboutir: les financements du centre d´accueil de jour de « Solidarités Femmes » et de l´assurance maternité cantonale seront votés avant la fin de l´année. Le droit au partenariat des lesbiennes est en bonne voie de discussion au Grand-Conseil. Les choses avancent bien aussi sur le terrain de la fiscalité pour les familles monoparentales, grâce à la volonté politique de Micheline Calmy-Rey.


La commission des affaires sociales du Grand-Conseil se penche sur le financement des crèches, mais il faudra avant tout promouvoir une véritable politique familiale, « féministe », précise Micheline Calmy-Rey.


En ce qui concerne la promotion systématique d´une éducation non sexiste et non homophobe à tous les niveaux d´enseignement, l´état des lieux est affligeant. Une enseignante de la FaPSE, Edmée Ollagnier, présidente de la commission de l´égalité de sa faculté, a procédé à une enquête. Aucun-e enseignant-e n´a été nommé-e pour traiter spécifiquement des questions d´éducation non sexiste à l´école dans le cadre de la licence mention enseignement qui forme les futur-e-s instituteurs et institutrices.


Cette rencontre sera relatée par Mme Calmy-Rey et M. Segond à l´ensemble du Gouvernement et la Marche mondiale « recevra un courrier » concernant ses décisions. Les féministes de Genève n´attendrons pas cette réponse les bras croisés.


Maryelle Budry



  1. Nous apprenons qu´une pilule du lendemain, le Norlevo, est en vente libre et peu onéreuse en France dans toutes les pharmacies…



La lutte pour le droit à l´avortement et à la contraception va reprendre !


Les deux Chambres fédérales ont l´une après l´autre débattu, puis accepté l´initiative parlementaire de Barbara Haering-Binder, dite de la solution des délais. Il reste encore au projet de loi une ultime épreuve: un vote du Conseil national sur l´élimination de petites divergences de texte qui ne devrait pas poser problème. Ce vote aura lieu vraisemblablement ce mois-ci. Et la loi serait alors acceptée en décembre ! Pour la première fois dans l´histoire suisse, le Parlement reconnaîtra aux femmes le droit de décider elles-mêmes de leurs grossesses !


Mais tout cet acquis d´années de luttes des femmes est en même temps déjà menacé: dès son acceptation cette loi sera contestée par un référendum lancé par l´extrême-droite ! D´ailleurs une initiative « Pour la mère et l´enfant », lancée par ces mêmes milieux a abouti et passera devant le peuple suisse en automne 2001…


Elisabeth Jobin, militante de l´Association suisse pour le droit à l´avortement et à la contraception, est venue récemment mobiliser le Collectif 14 juin de Genève. Il faut, nous dit-elle, dès maintenant informer les gens qui ne se doutent pas que l´avortement est toujours criminalisé en Suisse et leur faire prendre conscience du danger de retour en arrière; il faut mobiliser les réseaux de féministes, de juristes, de personnel soignant. Il faut partout lancer le débat idéologique sur la liberté de concevoir.


(mb)



A lire: Homosexualité, l´adieu aux normes


De Jacques Fortin, Textuel, collection la discorde, 2000.


Témoignage à la fois personnel et historique, ce livre fait le point sur la place de l´homosexualité et du lesbianisme sur l´échiquier social actuel.


Rappelant au passage aux plus jeunes quelles ont été les luttes de leurs aîné-e-s, de mai 68 à la création de la Gay Pride en 1990, l´auteur nous raconte également la création du mot homophobie, vrai dispositif de harcèlement et de persécution, qui a bizarrement vu le jour en même temps que l´affirmation et la massive sortie du placard des homosexuel-les.


Malgré cette homophobie, qu´elle soit ouverte ou plus insidieuse, la visibilité a été le plus sûr chemin vers le début de reconnaissance du droit des homosexuel-les au Droit, en commençant par le pacte civil de solidarité, le Pacs, texte incomplet mais au combien important.


Les droits sont des leviers, des vecteurs d´égalités, certes, mais ils ne résolvent pas tout.


Dès lors, une question se pose chez de plus en plus d´homos et de lesbiennes: la loi doit-elle reconnaître les homos en tant que tels, avec des lois spécifiques, ou bien le problème doit-il être pris à l´envers et aplanir les lois existantes pour gommer la différence entre homos et hétéros ?


« Nous voulons le droit à la différence aujourd´hui pour obtenir demain le droit à l´indifférence ».


Titillant les tenants du mouvement queer qui se complaisent dans une radicalité subversive intéressante mais déconnectée des luttes concrètes, Jacques Fortin rappelle que seules les luttes collectives, politiques, sociales et symboliques, permettront d´atteindre l´effacement des frontières qui serait le propre d´une société libérée, par cette dialectique propre au social qui veut que « plus l´homosexualité s´affirme, plus elle se dilue ».


(jf)