Manifestations: Après un projet délirant... une loi inacceptable!

Manifestations: Après un projet délirant… une loi inacceptable!

La nouvelle loi sur les manifestations
sur le domaine public a été votée le 26 juin 2008
par le Grand Conseil genevois. Le PS et les Verts s’abstenant.

Compte tenu de la période de vacances et, il faut bien le dire,
d’une certaine démobilisation des forces de gauche, le
lancement d’un référendum ne s’est pas
avéré possible et le délai
référendaire a pris fin au 18 août 2008.

La loi a donc été promulguée par le Conseil
d’Etat mais elle n’est pas encore entrée en vigueur.
Manifestement, le Conseil d’Etat attend l’adoption du
règlement d’application pour fixer la date
d’entrée en vigueur de la loi.

Cette nouvelle loi durcit de manière inacceptable les conditions
auxquelles sont autorisées les manifestations dans la rue. Elle
reprend d’ailleurs nombre de propositions contenues dans le
projet de loi initial du 2 décembre 2003 dont l’actuel
conseiller d’Etat libéral Mark Muller est le premier
signataire, accompagné d’une brochette de
députés bourgeois divers et variés.

Le projet initial de 2003, après plus de quatre ans de palabres,
a été vidé de plusieurs propositions
particulièrement délirantes. Par exemple, la dispersion
systématique par la police de toute manifestation non
autorisée et la conclusion obligatoire par les organisateurs
d’une assurance responsabilité civile pour tous les
dommages causés dans le cadre de la manifestation. Ces
dispositions n’ont pas été retenues; car elles
étaient anticonstitutionnelles, à
l’évidence, mais surtout parfaitement irréalisables.

Toutefois, on peut s’inquiéter des dégâts aux
libertés supplémentaires que cette loi pourrait susciter
à l’avenir.

Tout d’abord, la loi délègue au Conseil
d’Etat le pouvoir de fixer un délai préalable pour
solliciter une autorisation de manifester. Actuellement, aucun
délai n’est fixé en la matière et, en
pratique, le Département des institutions admet un délai
de 48 heures, voire un délai inférieur. On peut craindre
un changement, défavorable aux manifestations, à
l’avenir.

La loi sanctionne d’amendes le fait pour les manifestant-e-s
d’être vêtus de manière à
empêcher d’être reconnus ou de porter une «
protection ». En gros, il est donc interdit de se protéger
contre des gaz lacrymogènes, même pour le plus pacifique
des manifestant-e-s. Tout «objet dangereux» trouvé
sur un-e manifestant-e met celui-ci en état de contravention.
Bref, les règles applicables aux voyages aériens sont
étendues aux manifestations de rue.

La loi donne, en pratique, totale liberté aux policiers de
photographier ou de filmer les manifestant-e-s alors même que
ceux-ci défilent sans incident.

De plus, si des infractions sont commises, le matériel
photographique ou les fils pourront être diffusés
publiquement par la police.

De telles pratiques ont déjà été
constatées depuis quelques années mais en leur donnant
une base légale formelle, on encourage la police – cet Etat dans
l’Etat – à multiplier de telles activités
destinées à stigmatiser et à écraser la
colère et la révolte.

Nils de Dardel