Remous au parlement neuchâtelois
Remous au parlement neuchâtelois
Une large majorité du groupe POP-ECO-SOL a déposé linterpellation ci-dessous lors de la session doctobre du Grand Conseil neuchâtelois.
Bien quil soit question deau, on sattendait à une réponse sèche du Conseil dEtat du style: «Vous tentez dimposer un débat politique sur un projet qui nen est quau stade de la mise à lenquête. Nous nallons pas tomber dans votre piège! Vous aurez tout loisir de débattre lorsque la demande de concession sera soumise au Grand Conseil.» Il nen a rien été! Porte-parole du Conseil dEtat, le libéral Pierre Hirschy a été clair comme de leau de roche. Le gouvernement, a-t-il dit en substance, est favorable à ce projet et à loctroi dune concession au groupe Nestlé; il refuse dy voir un premier pas vers la privatisation des ressources en eau du canton puisque, par le biais de la concession, ce dernier garde la propriété et la maîtrise de ce bien vital.
Les règles dorganisation du Grand Conseil sont ainsi faites que les interpellateurs nont pas le droit de répliquer. Ils ont seulement celui dindiquer si la réponse les a ou non satisfait. Nous avons donc dû nous contenter de déclarer que tel nétait évidemment pas le cas. Mais il va de soi que, face à une telle naïveté politique, à moins que cela soit de larrogance, nous nen resterons pas là: nous continuerons de combattre ce projet que ce soit au Grand Conseil, devant les tribunaux ou dans la rue!
* Lauteur est député de solidaritéS/NE au Grand Conseil de Neuchâtel
Leau est un droit de lHomme
A lheure où un cinquième environ de lHumanité est encore privé dun accès direct à leau potable et où ce bien essentiel à la vie est menacé par des pollutions de toutes sortes, il nest guère étonnant de voir les grandes multinationales sy intéresser: dans une économie de marché, chaque bien est, par définition, voué à devenir une marchandise et les denrées rares sont évidemment les plus prometteuses puisquelles peuvent se vendre au prix fort, pour le plus grand bonheur des investisseurs et le plus grand malheur des consommateurs. Le législateur neuchâtelois la bien compris puisquen 1953 il a adopté une loi aux termes de laquelle les eaux souterraines, les lacs et les cours deau principaux du canton constituent des biens publics inaliénables.
Par le biais de la Feuille officielle, les soussignés ont appris que la multinationale Nestlé (qui contrôle notamment les marques Perrier, Vittel, Contrex, San Pellegrino, etc.) sollicitait une concession pour le prélèvement dun contingent annuel de 2 000 à 20 000 m3 deau sur le Puits de Treytel, propriété de la Commune de Bevaix. Depuis 1985, cette commune détient en effet une concession de lÉtat pour lexploitation de la nappe souterraine située sous son territoire en vue de sa distribution à la population par le biais dun service public. Cest sur une partie, certes infime, de cette eau de consommation dune qualité tout à fait exceptionnelle que Nestlé veut faire main basse: son but à court terme est de commercialiser cette eau en bonbonnes dune vingtaine de litres destinées à alimenter les «fontaines» deau minérale quelle entretient dans diverses entreprises et administrations; à plus long terme, il sagit évidemment davoir un «pied dans la place» dans la perspective dune privatisation du marché de leau.
Il ressort clairement du dossier de mise à lenquête que les services du Département de la gestion du territoire ainsi que ceux de la promotion économique sont entièrement favorables à ce projet. A linstar des autorités communales de Bevaix, les services de lÉtat semblent avoir été flattés, voire aveuglés par cet intérêt soudain dune multinationale pour notre région et ils nont à lévidence pas perçu les risques encourus à long terme par la population.
… pas une marchandise !
Le projet ne se heurte quà un obstacle, celui précisément de la Loi sur les eaux qui prévoit que leau de consommation ne peut pas faire lobjet dune concession, sinon aux communes elles-mêmes qui ont linterdiction de la céder à des tiers. Cest dailleurs pour tenter de contourner cet obstacle que, sur la suggestion du Département de la gestion du territoire (!), Nestlé a sollicité une concession pour le prélèvement deau minérale et cela sous langle de la Loi sur les mines et carrières. Pour autant quelle franchisse létape de la procédure dopposition, cette demande devra faire lobjet dune décision du Grand Conseil. Les soussignés souhaitent dès lors interpeller le Conseil dÉtat et lui demander quelle est sa vision à long terme en matière de gestion des ressources en eau et, en particulier, sil envisage de sopposer par tous les moyens à sa disposition à la privatisation de la distribution deau potable.