Crise économique et politique cantonale

Crise économique et politique cantonale

Licenciements, montée du
chômage, tous les indicateurs annoncent que la situation se
dégrade. Les gouvernements devront faire des propositions,
à tous les niveaux.

Du côté de la Confédération, c’est
toujours le soutien aux fortunés et aux entreprises qui est la
règle. Des montants faramineux sont décidés en un
temps record pour venir en aide aux banques et aux entreprises qui ont
laissé des plumes dans la spéculation boursière.
Pour ce qui est du monde du travail, on a surtout droit à des
discours; pour l’instant, l’aspect bien concret est une
préparation d’une nouvelle dégradation de
l’assurance-chômage.

    Dans les cantons, le monde politique s’agite.
A Neuchâtel, en pleine campagne électorale pour le
renouvellement du Grand Conseil et du Gouvernement, chacun y va de sa
proposition. Le PLR (parti libéral radical) annonce mettre au
centre de ses préoccupations la sauvegarde des places de
travail. Ça ne mange pas de pain, mais si on regarde comment il
compte s’y prendre, pas de surprises, il reste bien le parti des
patrons : « Le PLR entend redynamiser le marché du
travail en créant des conditions cadres favorables pour les
entreprises […] La droite juge le système fiscal
neuchâtelois trop pénalisant. Elle entend alléger
les impôts, aussi bien pour les entreprises, que pour les
familles et la classe moyenne. »1 Discours connu,
partout le même, mais qui conduit inéluctablement à
l’approfondissement de la récession, produite par la
diminution de la consommation des plus pauvres, dont le revenu baisse.

    Le parti socialiste intervient dans le débat
avec une nouveauté : il découvre (enfin !)
les blocages nuisibles qu’introduit le principe du
« frein à l’endettement »2
qu’il n’a pourtant cessé de défendre
jusqu’à aujourd’hui, contrairement à nous qui
l’avons combattu sans relâche depuis février 2005.
Mais le PS ne propose aujourd’hui qu’un aménagement
de ce frein alors qu’il faudrait l’abolir purement et
simplement.

Investissement écologique et fiscalité

Le Conseil d’Etat va soumettre une révision de la loi sur
l’énergie au Grand Conseil qui reprend ce que
défendent tous les partis, en particulier à gauche:
investissement dans les énergies renouvelables et isolation des
bâtiments. Ses axes principaux: pour les immeubles neufs,
obligation d’installer des panneaux solaires et normes
d’isolation plus sévères et pour les
bâtiments existants à isolation déficiente,
obligation de les assainir. Mesures auxquelles nous pourrions souscrire
sans hésiter, mais le Conseil d’Etat (Cuche, les Verts)
précise que non seulement des subventions seront
octroyées aux propriétaires, mais que toutes les mesures
d’assainissement des bâtiments seront intégralement
déductibles fiscalement. C’est là que le bât
blesse. L’objectif stratégique d’assurer à
l’horizon 2035 une sécurité
d’approvisionnement énergétique du canton pourrait
bien conduire à un approfondissement des
inégalités, les propriétaires d’immeubles y
trouvant de nouveaux moyens pour réduire leurs impôts. A
nos yeux, tous les avantages fiscaux incitatifs destinés aux
propriétaires d’immeubles doivent êtres
compensés par une fiscalité augmentée sur les
hauts revenus, les fortunes et le capital. Les mesures
intéressantes proposées par le Conseil d’Etat
doivent être accompagnées de l’introduction de
l’initiative « un impôt extraordinaire sur les
hautes fortunes », qui prévoit de faire participer
solidairement les fortunes d’un million et plus par un
impôt progressif de 1 % maximum, limité à
une période de quatre ans, et qui dort – en toute
illégalité ! – dans les tiroirs du Conseil
d’Etat 3. Les plus faibles, qui ne sont pas
propriétaires, payeront le coût des investissements
nécessaires pour économiser l’énergie et
permettre de passer à l’énergie renouvelable. Une
protection de l’environnement faite sur le dos des moins bien
lotis, voilà qui pose problème…

    Le canton peut avoir une inter­vention positive
en faveur de l’emploi et il n’y a pas de doutes
qu’encourager les investissements dans la rénovation des
bâtiments et dans l’installation d’équipements
d’énergie renouvelable stimulerait la création
d’emplois locaux. Mais cela doit être combiné non
seulement avec un impôt sur les contribuables les plus riches,
mais avec l’introduction d’un salaire minimum de 4000 fr.
par mois et une hausse des prestations sociales. Une politique
d’économies d’énergie ne deviendra
crédible que si elle apparaît positive pour toute la
population et si elle s’accompagne non seulement d’une
diminution du gaspillage de l’énergie, mais aussi
d’une réduction des inégalités.

Henri Vuilliomenet


1    Express 6 février
2    Mécanisme introduit dans la Constitution
cantonale en 2005 et qui oblige une majorité de 3/5 au Grand
Conseil pour toute dépense ou recette importante
3    Déposée en octobre 2006 par ATTAC,
les syndicats, solidaritéS, le POP et les Verts. cette
initiative aurait dû être traitée par le Conseil
d’Etat dans les 2 ans; jusqu’ici le Conseil d’Etat ne
l’a traitée et soumise au Grand Conseil que sur le plan
formel, reconnaissant la recevabilité formelle du texte. Alors
que ce qui importe, c’est évidemment le fond !