Les ambivalences de la neutralité

Les ambivalences de la neutralité

Pour le 50e anniversaire de la mort du général Henri
Guisan – dont le conseiller fédéral UDC Maurer
vient de faire l’éloge à l’assemblée
générale de l’ASIN – la presse suisse revient
sur la Seconde guerre mondiale.

    Certes, en un demi-siècle, la recherche
historique a fait quelques progrès. A défaut
d’être déboulonnée, la statue du commandeur
vacille un peu sur ses bases : il est en effet difficile,
à l’aune de son admiration pour Mussolini et
Pétain, de présenter le commandant en chef de
l’armée suisse comme un fervent démocrate…
  
 Dans ce contexte, il est possible de (re)découvrir les
années 1930-1940 dans notre pays, grâce au nº 93 de
la revue française « Matériaux pour
l’histoire de notre temps ». On y trouve notamment
un entretien de Jean-François Bergier
(décédé le 29 octobre 2009), expliquant
l’évolution et la méthodologie de ses recherches
historiques, avec Marc Perrenoud.

    Hans-Ulrich Jost retrace les
« origines, interprétations et usages de la
‘neutralité suisse’» et Georg Kreis
s’intéresse à la « crise des
années 1930 et la hantise de la ‘surpopulation
étrangère’» (rappel utile pour comprendre les
origines des vagues xénophobes ultérieures).

    Les articles de Stéfanie Prezioso sur les
réfugiés antifascistes italiens, d’Alix Heidiger
sur les réfugiés anti-nazis durant la 2e guerre, de
Sébastien Farré sur l’attitude de la Suisse
officielle durant la guerre civile espagnole montrent que
« notre » diplomatie était
singulièrement borgne de l’œil droit…

    Antoine Fleury pointe les contradictions entre
« tradition humanitaire » de la Suisse et
pratique réelle et Marc Perrenoud aborde les rapports entre
« l’économie suisse et la neutralité
à géométrie variable ». Monique
Pavillon étudie la situation des femmes suisses durant la
période de guerre (époque où la droite
nationale-conservatrice prônait déjà le retour des
femmes au foyer).

    Enfin, Daniel Bourgeois retrace les
péripéties du « changement politique
après la défaite française de 1940 »,
en décrivant les tendances à un autoritarisme
inspiré par le régime de Vichy et dépassant les
cercles des adeptes déclarés du nazisme et du fascisme.

Hans-Peter Renk