Une victoire de la com, une défaite de la politique

Une victoire de la com, une défaite de la politique



Le Conseil fédéral, les
Chambres, le PLR, les Verts libéraux, le PBD, l’UDC et les
milieux économiques voulaient la révision de la LACI. Ils
ont gagné avec la courte majorité de 53,4 % du
tiers des citoyennes et


des citoyens suisses qui ont participé au vote le 26 septembre 2010.

Ces milieux avaient dépensé une fortune pour baisser les
retraites des plus pauvres et subi un cinglant échec le 7 mars
2010. Leur projet fut balayé par trois électeurs sur
quatre. Les instituts financiers étaient
discrédités. Chacune et chacun pouvait craindre les
escrocs menaçant sa retraite. Dès, lors le camp bourgeois
craignait de perdre à nouveau. Il s’est réuni pour
gagner cette bataille antisociale sans lésiner sur les moyens.

    Le PDC a remporté le pompon de la
démagogie publicitaire. Son slogan est le titre que s’est
donné le comité unitaire de la droite: « OUI
à une assurance-chômage sûre et
solidaire ».

« OUI à une assurance-chômage sûre et solidaire » ?

Déchiré entre sa facette sociale et son cul de plomb
xénophobe, ce parti s’est voué à la pub qui
vend des hamburgers et des petites culottes, des
téléphones et des grosses autos comme on promet le
paradis.

    Les conseillers nationaux de droite des
députations genevoises et valaisannes ont rejoint ce
comité en masse. Les nationalistes identitaires Dominique
Baettig et Oskar Freysinger (UDC) y côtoyaient les
libéraux-radicaux Martine Brunschwig-Graf, Hugues Hiltpold 
et Claude Ruey (PLR), de même que le
démocrate-chrétien Luc Barthassat. Le Valais lui a offert
ses deux conseillers aux Etats, tous deux démocrates
chrétiens. En revanche, ce comité ne comportait aucun
député neuchâtelois. Ont-ils senti que
Neuchâtel (28`999 non, 67,8 %) aurait la plus forte
majorité rejetante après le Jura (13’178 non,
76 %) ?

    Avec l’assurance-chômage, ces partis
remettent en cause un acquis social essentiel. Ils contribuent à
redistribuer la richesse produite au détriment des
salarié.e.s. Ce n’est pas un scoop. Mais quel biais
ont-ils choisi pour affaiblir l’assurance-chômage ?
Leur réforme frappe des minorités. Elle cible des
segments du salariat présentés comme marginaux, les
jeunes, les aînés, les intermittents du spectacle. Les
plus fragiles. Elle prétend épargner le grand nombre.
L’UDC fait de même, mais sa frappe est raciste : les
chômeurs seraient des profiteurs étrangers et leurs
prestations doivent être réduites.

    A Genève, le Mouvement citoyen genevois (MCG)
– on connait la concurrence impitoyable qu’il livre à
l’UDC – a appelé au rejet de la révision de la LACI
« qui serre la vis aux résidents
genevois ». Le MCG a eu le nez creux. Sept cantons et
demi, tous des cantons frontaliers – romands ou non  – ont
rejeté cette révision avec une très large
majorité. La crainte du chômage y est sans doute
associée à la crainte du dumping, d’une part, et
ces cantons sont traditionnellement moins xénophobes,
d’autre part.

Précariser les plus fragiles

Au nom du lien social, des lois ont imposé les moyens dont
disposent les services publics et les assurances sociales. Autant de
trésors que les spéculateurs veulent accaparer en les
démantelant, en privatisant les services publics.

    Leur comm’ imite le rapport que la pub
entretient avec le consommateur. Comme cette dernière elle
prétend valoriser la responsabilité personnelle et le
choix éclairé. En réalité, à la
manière du grand propriétaire terrien qui détourne
l’eau au détriment des populations, ils veulent siphonner
le bien commun.

    La politique néolibérale valorise
d’énormes intérêts privés au
détriment de l’intérêt commun. En manipulant
l’illusion de frapper des populations marginales, elle
séduit les électeurs.trices et suscite leur
égoïsme.
 

Imposer le racisme

La politique néolibérale impose au poste de commandement
des nationalismes racistes qui découlent de ce nouveau
paradigme. Elle ruine la société et veut
l’empêcher de se défendre. Aux institutions
qu’elle démantèle, aux liens que tisse la
solidarité, elle substitue le mythe de la racine, de la
communauté, de la race qui transcenderaient nos existences et
qui nous domineraient.

    Un méfait n’est jamais perdu. Le
racisme de ces « élites »
méprisantes est fonctionnel. Il stimule chez les peuples que
cette politique a appauvris l’espoir de récupérer
des logements, des emplois, des prestations, comme on vit
d’épaves échouées sur les côtes une
fois la tempête passée.

    Enfin, les illusions de l’aide au
développement dissipées, les économies
occidentales ont relancé la chasse aux richesses, aux
matières premières des anciennes terres coloniales. Nier
l’indépendance de ces pays suppose la restauration des
idéologies racistes et colonialistes, donc évidemment le
refus d’accorder l’égalité de traitement
à leurs ressortissants immigrés ou exilés sur les
terres occidentales. Deux méfaits ne sont jamais perdus :
réduits au statut de sans-papiers, ils sont exploitables avec
bonne conscience, ils ne sont pas des nôtres.

Une régression préoccupante

L’UDC ne s’est pas limitée à faire acte de
présence dans le comité « OUI à une
assurance-chômage sûre et solidaire ». Sa
virulente campagne des derniers jours précédant la
votation n’a-t-elle pas d’autant plus creusé
l’écart avec les adversaires de la révision que
même le PS et les Verts sont restés muets ?

    Pour l’UDC, le chômeur « c’est l’étranger, il vient en Suisse profiter de nos assurances sociales »
(sic). Son affiche illustre un
« étranger » vautré dans un
hamac aux couleurs suisses. Hilare, il joue avec la pile de gros
billets obtenus de l’assurance-chômage. Sombre de peau, il
a les yeux bridés, une grosse moustache, le nez camus, la
mâchoire carnassière. Est-il africain, arabe, chinois,
latino, tamoul ? Il n’est pas blanc, c’est donc un
« étranger ». 


Karl Grünberg

ACOR SOS Racisme