Bassin minier de Gafsa

Bassin minier de Gafsa : Rage ouvrière à Redeyef: Solidarité!

La demande d’engrais ne cesse d’augmenter et le prix des phosphates a flambé ces derniers temps… L’un des principaux producteurs mondiaux, c’est le bassin minier de Gafsa à 350 km de Tunis où règne la Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG). La région a aussi été le berceau et le déclencheur de la révolution tunisienne à travers le mouvement social sans précédent qui l’a secouée en 2008, particulièrement la ville de Redeyef. Où en est-elle aujourd’hui ?

Malgré la révolution et la chute de Ben Ali, rien n’a vraiment changé dans cette région qui a toujours été l’un des cœurs vivants du mouvement ouvrier tunisien. Les quatre morts et les dizaines blessés de la véritable insurrection ouvrière de 2008 ne sont pas reconnus par le nouveau régime comme victimes au service de cette Révolution dont leur sacrifice a été l’étincelle.

 

Martyrs ouvriers méprisés et mal-développement perpétué

Les indemnisations et les honneurs vont à d’autres. Des blessés par balles n’ont reçu que des soins sommaires et n’ont pas les moyens de se payer les traitements médicaux qui s’imposent, les populations de la région souffrent toujours dans le dénuement, les services publics élémentaires ne sont pas ou presque pas assurés, les infrastructures publiques font défaut ou se dégradent.

Les mesures de dépollution indispensables, notamment de l’eau et des sols, comme aussi les mesures sanitaires nécessaires et les mesures indispensables de développement de la région ne sont pas prises, les emplois font toujours et encore défaut et le désespoir n’est pas loin, comme aussi la rage, liée au mépris cynique des martyrs ouvriers de la révolution tunisienne que cette situation inacceptable révèle.

Moins que jamais, les richesses du sous-sol tunisien et l’envolée du prix des phosphates, sur le marché mondial, comme celui des bénéfices de la CPG, ne profitent aux ha­bi­tant·e·s de Redeyef. Une douzaine des membres de la délégation de solidaritéS au FSM a fait, les 700 km d’aller-retour, pour se rendre dans cette ville et rencontrer sur place des animateurs du mouvement social, dont le leader syndical Adnen Haji que nous avions accueilli l’an dernier à Genève.

A Redeyef, nous avons rencontré également des victimes de la féroce et sanglante répression de la dictature de Ben Ali et pu constater – de visu – les conditions de pollution et de mal-développement liées aux activités de la CPG. Nous avons entendu les témoignages d’ha­bi­tant·e·s de la région et de travailleurs de la CPG qui se plaignent amèrement, non seulement de ne pas voir leurs revendications matérielles satisfaites, même partiellement, malgré la Révolution, mais même de ne pas être reconnus et de ne pas avoir d’interlocuteurs du côté des autorités du nouveau régime en place.

 

Reconnaissance et réparations !

Redeyef ne dispose par exemple même pas d’autorités locales et d’un conseil municipal provisoire, comme d’autres localités tunisiennes, Ennahda ayant voulu s’adjuger 50 % des postes en question en ne reconnaissant pas la légitimité, gagnée au prix du sang, des acteurs du mouvement social, la nomination de ces instances a été bloquée.

A Redeyef, nous avons entendu et retenu deux revendications liées entre elles, l’exigence d’une contribution minimum de 20 % des bénéfices de la CPG pour le développement régional et la réponse aux besoins sociaux et environnementaux criants des ha­bi­tant·e·s et des tra­vail­leurs·euses de la région et – avant toute chose – la revendication élémentaire de reconnaissance du sacrifice des martyrs du mouvement de 2008, qui passe par la mise au bénéfice des victimes du mouvement social du « décret nº 97 relatif à l’indemnisation des Martyrs de la révolution et de ses blessés » qui leur est dénié aujourd’hui par le pouvoir tunisien, avec aussi – bien sûr – les moyens matériels pour les blessés en question de recevoir les soins médicaux indispensables qui s’imposent.

Au-delà de la très modeste contribution matérielle que nous avons apportée dans ce sens à nos interlocuteurs du mouvement social à Redeyef, nous nous sommes engagés à développer une solidarité morale et matérielle avec eux en vue de ces objectifs. Nous accueillerons sans doute sous peu à Genève des représentant-e-s de ce mouvement. Nous aurons l’occasion d’en reparler.

 

Pierre Vanek

 

 

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Notre camarade Rémy Pagani, par ailleurs Maire de Genève, est venu – sur invitation du FSM notamment – à Tunis et y à rejoint la délégation de solidaritéS, présente sur le terrain. Arrivé jeudi 28 avril au soir à l’aéroport de Tunis, les services du protocole n’ont pas eu l’occasion de lui mettre la main dessus… En effet, une demi heure plus tard, il avait rendez-vous avec le mouvement social tunisien sur l’avenue Habib Bourguiba où se célébrait un meeting à la mémoire du camarade Chokri Belaïd du Front populaire et d’Hugo Chavez.

Le Maire de Genève a pu y prendre la parole pour réaffirmer son soutien inconditionnel à la pleine réalisation des objectifs démocratiques et sociaux de la révolution tunisienne, comme aussi son exigence de vérité sur le lâche assassinat de notre camarade Chokri Belaïd.

A cette occasion il a pu rencontrer encore une fois Besma Khalfaoui, veuve de Chokri Belaïd, qu’il avait eu l’occasion de recevoir à Genève début mars et lui réaffirmer, en notre nom à tous-toutes, sa sympathie, sa solidarité et son soutien ! PV