Le salaire minimum n'est pas un obstacle à l'emploi

Nous publions ci-dessous l’intervention de notre camarade Daniel Süri le 18 février lors de la Conférence de presse de lancement de campagne du comité unitaire vaudois pour un salaire minimum.

En 2011, lors de la campagne autour de l’initiative vaudoise sur le salaire minimum – lancée par le POP, solidaritéS Vaud, Attac et quelques syndicats, puis soutenue par l’USV, le PSV et les Verts – le représentant des Groupements patronaux vaudois avait expliqué, dans une réunion publique contradictoire, que pour qu’il fonctionne, le salaire minimum devait être fixé suffisamment bas, sinon il devenait un obstacle à l’emploi. Il prenait comme exemple les USA. Visiblement, le président Obama et lui n’ont pas suivi les mêmes cours d’économie politique, puisque la présidence étatsunienne propose d’augmenter de 25 % le salaire minimum des contractuels de l’Etat, en soulignant que cela allait doper l’économie.

Plus près de nous, le Conseil fédéral constatait, dans son message refusant l’initiative prochainement soumise au vote que «la littérature empirique sur l’influence des salaires minimums sur la dynamique de l’emploi est divisée. Selon des études récentes, il semble que le niveau relativement élevé du salaire minimum ne joue qu’un rôle mineur sur la dynamique du marché de l’emploi».

Expériences faites en Suisse, que ce soit dans la grande distribution (Coop, Migros) ou dans l’hôtellerie-restauration, l’augmentation ou l’introduction de salaires minimums n’a pas provoqué de suppression de postes et d’augmentation du chômage dans la branche. Ainsi durant la période 1998–2013, le salaire minimum dans l’hôtel­lerie-restauration est passé de 2350 francs mensuels à 3680 francs (soit une augmentation de 57 %), alors que conjointement, la part de l’hôtellerie-restauration dans le chômage global diminuait. Même si l’on prend en compte la question de l’application du salaire minimum dans les faits et non seulement sur le papier, la tendance paraît incontestable.

Devant cette réalité, la partie patronale vient en tout cas de découvrir un attrait inattendu à l’acceptation de l’initiative « Contre une immigration de masse ». Elle supprimerait en effet la nécessité d’un salaire minimum, le contingentement des mi­grant·e·s faisant disparaître la pression à la baisse sur les salaires ! (Neue Zürcher Zeitung, 14 février 2014.)

Au-delà de la confirmation d’une utilisation de la libre circulation pour faire pression sur les salaires, l’article du quotidien zurichois prévoit évidemment un nouveau « dimanche noir » pour l’économie suisse si l’initiative des syndicats était acceptée. Une prédiction qui a autant à voir avec la réalité que le déni du dumping salarial auquel se livrait avec audace le représentant patronal genevois dans l’émission Infrarouge du 11 février.

 

Daniel Süri