Swiss vole en piqué droit vers le crash annoncé
Swiss vole en piqué droit vers le crash annoncé
Que na-t-on pas dit sur la nouvelle Swiss? On allait voir, après les dirigeants de Swissair incapables, juste bons à sauter de lavion en parachutes dorés. Pourtant, à comparer les prises de position aujourdhui et hier, on voit quau-delà des gesticulations, ce sont les conditions dun marché, modifiées drastiquement, qui ont causé la catastrophe passée et celle à venir. La dérégulation clouera une fois de plus au sol loutil performant quétait et reste la Swissair devenue Swiss.
Cest en fin des années 1990 que le Conseil fédéral a décidé de déréguler le secteur en lalignant sur les conditions du marché mondial, sonnant le glas dune compagnie, qui avait passé près de 70 ans dans ses turbulences Le Conseil fédéral prônait les «sept libertés» permettant notamment le cabotage en Suisse et ouvrant à 100% le marché national aux compagnies du monde entier. Le parlement ratifia ces propositions en quelques mois. Une seule règle simposa alors: grandir ou mourir. Cette décision irresponsable a poussé les dirigeants aux stratégies prédatrices et au larguage de milliers de salarié-e-s condamnés à la dégradation inexorable de leurs conditions de travail.
Le cabotage: un poison pour Swissair et Swiss
Depuis lors, sous Brugisser comme Doze, lexpansion est obligatoire. A chaque repli dune compagnie, des concurrents prédateurs accaparent les lignes délaissées. Avec lacceptation des bilatérales et la ratification de la loi, qui na plus considéré la compagnie comme entreprise nationale digne de protection, le cabotage sest répandu en Suisse. Une compagnie anglaise peut par exemple, affréter des avions depuis Genève. Ainsi, après la faillite de la stratégie du chasseur, chaque repli de Swiss voit la venue dun concurrent moins cher sengouffrant dans la brèche et accélérant dautant sa fin.
Avec le prix élevé des appareils (environ 100 millions lavion) comme de leur coût dentretien, la marge de manuvre subsistant, cest la pression sur le personnel. Ainsi, dans ce processus, les employé-e-s au sol, comme les pilotes et les stewards-esses, sont voués à perdre en pouvoir dachat et à voir se dégrader leurs conditions de travail. Aujourdhui, aux USA, des pilotes sont payés au même prix que nimporte quel employé et effectuent des horaires de travail démentiels.
Arrêtons ce processus
A quoi sert-il de verser des larmes sur feue Swissair ou sur la fin probable de Swiss, de pleurnicher sur la récupération populiste de cette double catastrophe lors des prochaines élections par le parti de Blocher, de défendre une stratégie de réduction de la voilure plutôt quune autre face aux médias et de prétendre que cest cela être bon syndicaliste. Mais de nêtre pas capable de dénoncer les vraies causes de la situation et de ne pas proposer dy mettre un terme? Qui a osé dire que nous devrions remettre en vigueur une forme de protectionnisme, non seulement en injectant de largent dans cette compagnie, mais en lui garantissant un véritable marché, comme les paysans ont réussi à le faire pour certains de leurs produits? Nous le disons longtemps et nous le répétons, cest une compagnie nationale de service public quil nous faut, contrôlée par les pouvoirs publics, avec des dirigeants capables de la conduire dans les créneaux économiques qui subsisteront quoi quil advienne sur le marché mondial.
Rémy PAGANI