Bérézina politique pour le Conseil d'Etat

Bérézina politique pour le Conseil d'Etat : Enfonçons le clou du NON social à la RIE 3!

Le 12 février, a vu en Suisse un refus cinglant de la troisième réforme de l’imposition des entreprises (RIE 3) avec 59% de NON. Même à Genève, où la droite et les milieux patronaux étaient unanimes à la soutenir et ont financé une campagne de publicité sans précédent pour leur projet, on a vu une claire majorité rejetante.

En Ville de Genève,  la RIE 3 a été refusée par 57,5% des électeurs·trices et par l’ensemble des bureaux de vote, à l’exception de Cité-Rive, Champel et Florissant-­Malagnou. Elle a aussi été rejetée massivement par les villes de Carouge, Lancy, Meyrin, Onex et Vernier. C’est donc une vraie déroute pour le Conseil d’Etat, qui en avait pourtant fait le projet-phare de sa législature.

Ce rejet est d’autant plus spectaculaire que l’exécutif avait cru mettre les atouts de son côté en défendant un plan détaillé de mise en œuvre cantonal et en tentant de le faire adopter par une « table ronde » réunissant milieux économiques, syndicats, communes et partis politiques.

Chantage à l’emploi peu crédible

Le chantage à l’emploi a été poussé aux limites du bon sens, les autorités interprétant abusivement une étude commandée au CREA de Lausanne pour évoquer une menace pour 60 704 emplois directs, indirects et induits… A tel point que le président du PLR a pu évoquer sans rire sur la TV Locale Léman Bleu un risque de chômage pour «un quart de la population genevoise» en cas d’échec le 12 février!

Le Conseiller d’Etat genevois Dal Busco, a même cru bon de faire l’apologie de la RIE 3 dans une lettre aux contribuables genevois·e·s, annexée à leur déclaration d’impôts 2016! A la question du tous-ménages d’economiesuisse Décryptage: «Envisagez-vous un échec! », il répondait péremptoirement: «Non, nous ne pouvons pas nous permettre d’échouer.»

Or, le corps électoral genevois n’a pas seulement refusé la RIE 3 fédérale, il a donné un carton rouge au gouvernement genevois, dont le projet de mise en œuvre cantonale renonçait pourtant à la déduction contestée des intérêts notionnels (NID) et optait pour un usage limité des nouvelles déductions fédérales.

En réalité, dans le projet du Conseil d’Etat, la baisse massive du taux facial d’imposition des bénéfices (de 24,2 à 13,49%) et la réduction massive de l’imposition du capital représentaient un transfert de 570 millions vers un nombre restreint de personnes morales, au détriment des collectivités cantonale et communales, compensé très partiellement par la Confédération (112 millions) et par quelques dispositions récurrentes (64 millions).

Avec une dette de l’Etat de plus de 12 milliards, un projet de budget 2016 rejeté par le parlement, un budget 2017 déficitaire de 100 millions, et des taux d’intérêts frémissant à la hausse, ce manque à gagner colossal a pu suscité une inquiétude légitime de la population, préoccupée par une dégradation prévisible des services publics et des prestations sociales.

Vers le maintien des recettes publiques actuelles

En conséquence, le groupe parlementaire Ensemble à Gauche (EàG) a déposé le 22 février une motion enjoignant au Conseil d’Etat de prendre pleinement acte du désaveu populaire et de retirer son train de lois pour la «mise en œuvre de la RIE3 à Genève».

Dans les plus brefs délais, les motionnaires lui demandent aussi de revenir devant le Grand Conseil avec un projet de suppression des statuts fiscaux privilégiés garantissant une neutralité fiscale pour le canton et les communes, ce qui implique le maintien des recettes actuelles de l’imposition des personnes morales.

L’ajout urgent à l’ordre du jour de cette motion a été refusé par toute la droite, mais appuyé par le PS et les Verts… nombre d’élu·e·s du PS ont accepté aussi de la signer! Elle reviendra à l’ordre du jour lors de la session du parlement de la mi-mars… Mais au-delà de l’intention politique affirmée par cette motion, nous envisageons du côté de solidaritéS et d’Ensemble à Gauche une initiative populaire cantonale pour enfoncer le clou du refus de la RIE 3 et des pertes fiscales pour nos collectivités! A suivre…

Pierre Vanek