Débâcle d'une caisse de pension

La fortune d’une caisse de pension fribourgeoise a disparu dans des produits de la banque Lehman Brothers et dans un fonds immobilier londonien. Les responsables de la caisse, l’organe de révision et l’experte en prévoyance professionnelle n’ont rien remarqué.

Le Fonds de prévoyance de l’Association des communes de la Sarine pour les services médico-sociaux compte environ 600 assuré·e·s. Il a dû être mis en liquidation en 2014, affichant un découvert de 57 millions de francs. La gestion de sa fortune avait été confiée à la société Hope Finance. Des placements à risques ont été effectués et les millions se sont envolés. Des procédures pénales et civiles sont en cours, mais c’est bien le fonctionnement même du 2e pilier qui est en cause.

Gestion paritaire de la fortune?

Le Conseil de fondation de la caisse avait nommé un comité de placement de quatre personnes, avec un devoir de surveillance. Ces gens n’étaient pas des spécialistes de la gestion de fortune et devaient, dans les faits, faire confiance aux professionnels du placement. C’est la situation de la plupart des représentant·e·s des salarié·e·s dans un conseil de fondation. La prétendue «gestion paritaire de la fortune», prévue par la loi, n’est qu’un leurre. Que les investissements de la caisse soient judicieux ou erronés, les décisions réelles échappent au personnel. Mais quand les spécialistes des marchés financiers se plantent, la responsabilité des représentant·e·s du personnel est engagée. Une procédure pour gestion déloyale et infraction à la LPP se poursuit devant le Tribunal cantonal.

Le Fonds de garantie

Après la liquidation de la caisse, le Fonds de garantie a dû intervenir pour sauver l’essentiel des droits acquis par les assuré·e·s. Avec quelques complications, les salarié·e·s peuvent récupérer leurs avoirs de vieillesse ou leurs rentes. Mais qui paie? A nouveau les salarié·e·s! Dans la cotisation mensuelle prélevée sur le salaire, une partie va directement alimenter le Fonds de garantie. Celui-ci verse des subsides aux caisses dont la structure d’âge est défavorable et garantit l’essentiel en cas de débâcle d’une caisse de pension. Le risque du placement financier catastrophique est donc entièrement mis sur le dos des salarié·e·s.

Favoriser la répartition

Jouer l’avenir des retraites sur les marchés financiers n’est plus une option raisonnable. La capitalisation n’arrive plus à maintenir le niveau des rentes. Elle piège les représentant·e·s du personnel en leur mettant sur le dos des responsabilités impossibles à assumer. Il faudra être attentif aux propositions qui vont surgir ces prochains mois et qui visent un renforcement de la répartition: la cotisation finance immédiatement la rente, sans passer par les marchés financiers.

Pierre-André Charrière