Nestlé, la soif du profit

2050 dollars par année. C’est le loyer que verse la multinationale Nestlé en Californie pour exploiter une source et extraire des millions de litres d’eau.

Le prix du loyer est fixé par le National Forest Service (NFS). Restructurés sous la présidence de Ronald Reagan, les règlements ont subi une cure d’amaigrissement et ont réduit le nombre de critères fixant la redevance. Ainsi, le tarif a été calculé en fonction de la surface du terrain utilisé. Dans le cas de la source de Nestlé, le site de Strawberry Canyon possède une surface minuscule, l’eau de source se situant en profondeur. Ce qui explique le prix ridiculement bas que Nestlé a initialement payé pour son exploitation: 624 dollars par an.

Dans les années 1980, le budget du NFS a été amputé de 46%. Pour ses employé·e·s, il n’était plus possible d’effectuer tous les contrôles nécessaires.

Tricheries en cascade

Si le permis d’exploitation a expiré en 1988, Nestlé a continué à pomper allégrement cette source sans renouveler son permis durant près de 30 ans. Après que des citoyen·ne·s de la région ont dénoncé ces anomalies, le permis a été officiellement renouvelé le 27 juin 2018 pour trois ans, avec une option de deux années supplémentaires. Et l’indemnité d’exploitation a été portée à 2050 dollars par an.

Avant la sécheresse de 2016, Nestlé collectait 135 millions de gallons d’eau, soit 510 millions de litres. Comme les marques d’eau minérale contrôlées par Nestlé sont en majorité vendues dans de petites bouteilles, on peut facilement se faire une idée des bénéfices enregistrés. Payer 624 dollars pour pomper 510 millions de litres d’eau de source, c’est un coup de génie que seule une économie ultralibérale peut autoriser.

L’État de Californie traverse une période de dure sécheresse depuis 2016. En conséquence, Nestlé a conçu «un plan de gestion adaptée» à cette nouvelle situation pour l’exploitation de sa source. La compagnie ne collecte plus que 32 millions de gallons, alors qu’une loi a prévu un rationnement sévère de l’utilisation de l’eau dans tout l’État à partir de 2022.

Dernière anomalie, et pas des moindres, des militant·e·s d’associations de défense de l’environnement accusent Nestlé de pomper par des forages horizontaux les eaux publiques de sources de la forêt de San Bernardino à partir de sa parcelle de Strawberry Canyon.

Toutes ces tricheries révèlent le sentiment d’impunité et d’arrogance de cette société qui ne recule devant aucun moyen pour satisfaire la soif… de ses actionnaires.

José Sanchez