Brésil

Brésil : Bolsonaro n'est pas imbattable

Des retournements sont encore possibles avant le second tour de l’élection présidentielle. Tout dépendra de notre stratégie et de notre disposition à agir.


Photo de soutien au mouvement #elenão après l’assemblée générale de solidaritéS Vaud

Jair Bolsonaro [qui a remporté 46,1% des voix au premier tour, ndlr] a été sous–estimé. Il a déclenché une vague électorale . Le noyau dur de la votation en faveur du néofasciste est la petite bourgeoisie, mais le résultat que Bolsanaro a obtenu n’est possible qu’avec le soutien des secteurs populaires. La votation du premier tour a révélé la force du camp conservateur, qui a occupé les rues entre 2015 et 2016 et qui a mené à la destitution de Dilma Roussef, mettant le peuple et les travailleurs·euses dans une situation défensive.

Mais l’élection a montré aussi que les forces politiques qui ont soutenu le gouvernement Temer [le vice-président élu avec Dilma, qui a soutenu la destitution de cette dernière afin d’arriver au pouvoir, ndt] ont flanché. Bolsonaro défend le même programme que celui de Temer, assorti de méthodes plus brutales. Il affirme qu’il faut en finir avec les programmes sociaux de transfert de revenus. Il veut empêcher toute réforme agraire ou urbaine. Il entend aussi privatiser le plus possible et soutient que le peuple doit être disposé à perdre des droits pour que les investisseurs reviennent.

L’élection a révélé qu’une partie des masses populaires voit toujours dans Lula et le Parti des Travailleurs (PT) une forte référence, liée à la mémoire de quelques-unes de ses réformes pendant les années de croissance économique.

Les salarié·e·s en marche

Au deuxième tour, la stratégie du noyau dur de la bourgeoisie se profile déjà. Il maintiendra une position ambiguë pour faire en sorte que Haddad, le candidat du PT, accepte la politique économique qui correspond à leurs intérêts: austérité fiscale, réforme des retraites, etc. Mais il veut aussi que Bolsonaro accepte des négociations garantissant le contrôle de postes clé du gouvernement à des technocrates de confiance.

Ceci étant, la plus grande erreur de Haddad serait de céder à la pression bourgeoise. La défense d’une ligne classiste est la clé pour garder les votes que le PT a obtenus au premier tour. C’est le moment des syndicats, des mouvements populaires et des étudiant·e·s. Et les féministes qui ont construit #elenão sont l’embryon d’un nouveau mouvement antifasciste. Il s’agira aussi d’aller chercher le camp des abstentions, des blancs et des nuls, pour un total de 29% des voix au premier tour. Gagner des voix de Bolsonaro dans les couches populaires sera très difficile, mais nécessaire. Les secteurs lucides de l’Église catholique seront d’importants alliés dans cette dispute.

Valério Arcary
historien et militant du PSOL

Traduction, coupes et intertitres de notre rédaction ; version originale complète sur esquerdaonline.com.br