Fribourg: Commerces agressifs

La droite et la gauche libérales ont pris l’habitude de perdre les votations sur les horaires des magasins. Elles essaient de contourner la volonté populaire en multipliant les exceptions.

Le président du PLR fribourgeois l’avait annoncé au lendemain de la votation perdue : « Je pense que nous allons accentuer les efforts de dérogations ». Les demandes de prolongation pour trois samedi de décembre ont été acceptées avec empressement par les autorités communales. Et le Tribunal cantonal a écarté le recours syndical avant même de juger sur le fond. Comme en 2018, ni les dispositions légales ni la volonté populaire n’ont réussi à contenir la pression commerçante. Il faudra cette année s’organiser différemment pour empêcher ces ouvertures prolongées.

Manchedi
L’intense activité des commerces cherche à faire du dimanche un manchedi, un jour ouvrable ordinaire. Autour des marchés de Noël, et malgré un jugement restrictif du Tribunal fédéral (solidaritéS nº 358), les autorisations de travail du dimanche ont été octroyées les yeux fermés par le service de l’emploi. Le Tribunal cantonal se lance lui dans une interprétation ahurissante de la Loi sur le commerce pour favoriser l’ouverture dominicale. Les communes peuvent en effet prévoir une « ouverture exceptionnelle pour les foires, comptoirs et autres manifestations analogues ». Le Tribunal cantonal estime qu’il faut y voir la possibilité d’une « ouverture exceptionnelle des commerces à l’occasion de foires, comptoirs et autres manifestations analogues ». Une extravagance juridique entièrement au service du libéralisme.

Certains magasins s’attaquent également à l’application de la loi sur le travail dans les zones touristiques. Ils recourent au service de l’avocat Claude Gremion, membre du conseil stratégique de la Chambre du commerce et de l’industrie du canton de Fribourg et spécialisé dans « le pilotage des dossiers sensibles ». Ils exigent une libéralisation de la pratique ou une révision de l’ordonnance fédérale. Une prétention terriblement arrogante dans une période où l’on ne compte plus les violations de la Loi sur le travail au détriment du personnel de vente.

Gare au souterrain
Jamais concrétisé, mais pas vraiment abandonné, un projet plane sur la bataille des horaires : l’aménagement d’un passage souterrain reliant la gare aux commerces de Fribourg Centre. Grâce à une « relation fonctionnelle avec la gare », ce serait alors toute la zone commerciale alentour qui pourrait être soumise aux horaires du domaine CFF, moyennant de nouvelles acrobaties juridiques.


Pierre-André Charrière