Yassine assassiné, à qui le tour? 800 manifestant-e-s à Genève

Yassine assassiné, à qui le tour? 800 manifestant-e-s à Genève

Le 27 mars, après l’assassinat à la sortie d’une mosquée de Gaza, de Cheikh Yassine et de sept autres personnes, une manifestation à l’appel du Collectif Urgence Palestine réunissait environ 800 personnes dans les rues de Genève, avec une forte représentation de la communauté musulmane. Manif à l’image de l’émotion et des craintes suscitées par cet acte commis par les forces d’occupation israéliennes sous l’ordre direct de Sharon et de son gouvernement.

L’escalade et la politique du chaos, en Palestine et dans tout le Moyen-Orient, sinon au-delà, voilà le choix que fait Ariel Sharon en connaissance de cause. En assassinant, à l’aube de ce 22 mars, le chef spirituel du mouvement de résistance islamique palestinien Hamas, le Cheikh Ahmed Yassine, et avec lui sept autres personnes, Ariel Sharon a pris la décision non seulement de violer une fois de plus le droit international, mais surtout d’assassiner un symbole, afin d’attiser la colère, non seulement des Palestiniens prisonniers depuis des années de l’occupation et de la terreur coloniales, mais aussi celle du monde arabe et du monde musulman.

Par cette provocation, le gouvernement israélien cherche à ouvrir un nouveau cycle de violence lui permettant de perpétrer de nouveaux crimes contre le peuple palestinien et ses dirigeants, dont Yasser Arafat lui même, comme l’ont montré les menaces explicites formulées ces derniers jours à son encontre. Ce que veut Ariel Sharon, c’est empêcher, et pour longtemps, toute possibilité de négociation israélo-palestinienne, toute perspective de paix. Il met ainsi le terrorisme d’Etat au service du projet de colonisation, d’annexion et d’expulsion dont il a fait son programme, ne cessant d’affirmer, depuis la campagne électorale de 2001, qu’il se donnait pour tâche d’achever ce qui ne l’avait été en 1948. Un tel programme, c’est l’insécurité et la guerre garantie, fût-elle totalement dissymétrique.

Avec l’aval US

La communauté internationale ne doit plus laisser faire. Elle ne peut plus se contenter d’une dénonciation formelle, en observant le gouvernement et l’armée israéliens poursuivre la colonisation, les destructions massives, les confiscations de terres, les assassinats dits «ciblés», l’emprisonnement de milliers de Palestiniens, les raids meurtriers contre la population civile, en condamnant les attentats palestiniens lorsqu’ils frappent la population civile israélienne, et en rédigeant d’hypocrites appels au calme «aux deux parties».

L’assassinat de Cheikh Yassine et des sept autres victimes, au-delà de l’acte barbare dont sont coutumières les forces d’occupations israéliennes, marque un saut qualitatif dans la course folle du gouvernement Sharon pour embraser le Moyen-Orient avec l’appui des USA. Il est impensable, quoique qu’en dise le porte-parole de la Maison blanche, que l’administration US n’ait pas donné son feu vert à une action qui ressort, par ses conséquences, d’une décision stratégique.

Alors qu’Aznar vient d’être balayé et que la population espagnole manifeste aux cris de «C’est votre guerre, ce sont nos morts!», que les manifestations pacifistes du 20 mars ont été de grande ampleur, en particulier dans les pays membres de la Coalition, Sharon et Bush tentent d’accélérer la course vers le chaos au Moyen Orient.

La communauté internationale doit réagir immédiatement et concrètement! Il en va non seulement de l’avenir hypothéqué d’une paix qu’Ariel Sharon a décidé de rendre impossible, mais aussi de la survie des peuples de la région.

Avenir en Suisse

Cette survie pour le peuple palestinien passe par le retrait total des territoires occupés des forces d’occupation israéliennes! Mais la communauté internationale tient un double langage, notamment le gouvernement Suisse qui d’un côté prétend œuvrer pour la paix et de l’autre continue à développer, en commun avec l’industrie d’armement israélienne, des armes utilisées dans la guerre contre la population palestinienne. Ce sont le cas, en particulier, des drônes (avion sans pilote) utilisés pour le repérage des victimes lors des «assassinats ciblés» tel celui de Cheikh Yassine. Face à cette situation, les mesures minimales que devrait prendre la Suisse, Etat dépositaire des 4e conventions de Genève sont:

  • obtenir de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité des Nations Unies, l’envoi d’une force internationale conséquente de protection du peuple palestinien;
  • exiger de l’Etat israélien, par le biais de pressions politiques et économiques, le respect des 4e Conventions de Genève et du droit international;
  • arrêter immédiatement la collaboration militaire avec Israël.

Nous en sommes malheureusement encore éloignés, à preuve le vote du 17 mars au Conseil national rejetant le postulat sur «La suspension des achats de biens militaires en provenance d’Israël» par 87 voix contre 63. Toutefois, ce combat progresse. Le mouvement de solidarité doit continuer inlassablement à témoigner et à expliquer, en utilisant l’expérience des missions civiles. Il doit continuer à mobiliser, comme ce fut le cas le 27 ou le 30 mars lors du dépôt à Berne de plus de 12000 signatures demandant l’arrêt de la construction du «Mur de l‘Apartheid» et finir par faire céder le gouvernement suisse qui continue à faire passer les intérêts économiques de quelques grosses sociétés d’armement avant les droits humains.

Christophe DELMERE


Dans le débat du 17 mars au Conseil national évoqué ci-contre, notre camarade Pierre VANEK s’est exprimé vigoureusement au nom du groupe «A gauche toute!», comme il l’a fait le 27 mars en fin de manif à Genève, pour dénoncer la position honteuse du Conseil fédéral qui défend la poursuite de la coopération militaire suisse avec Israël au nom des coûts économiques de leur cessation, des besoins… de la défense nationale helvétique et du maintien de «la réputation de la Confédération en tant que partenaire crédible». Comme «mesure» dans ce domaine, malgré les violations constantes des Conventions de Genève – dont nous somme censément les garants – par l’Etat d’Israël, le gouvernement helvétique se contente d’annoncer dans ce domaine le «déclassement hiérarchique des visites de militaires» faites à leurs homologues israéliens. Avec à un Etat qui foule aux pieds le droit international, qui bafoue les droits de humains, qui mène une politique illégale de bouclage, d’occupation et d’annexion engendrant des souffrances inouïes pour la population palestinienne, qui a développé un puissant arsenal d’armes de destruction massive nucléaires… on continuerait le business militaire en envoyant seulement des gradés un peu moins galonnés! L’intervention de notre conseiller national se trouve sur www.solidarites.ch

(réd)