Stopper Blocher... et le Conseil d'Etat vaudois
Stopper Blocher… et le Conseil d’Etat vaudois
Plusieurs centaines de requérant-e-s dasile débouté-e-s sont menacé-es dans le canton de Vaud dun renvoi imminent. Parmi ces personnes, près de la moitié sont des enfants: en Suisse depuis 4, 7 ou 10 ans, certains sont nés ici, dautres y ont accompli leur scolarité, dautres enfin ont rattrapé le handicap dune langue et entrepris une formation professionnelle.
Parmi ces personnes, on compte des survivant-e-s et rescapé-e-s du massacre de Srebrenica en juillet 1995, des femmes isolées quun retour en Kosovë, seules ou avec des enfants, condamne à une vie dexclusion, et des familles appartenant à des minorités ethniques.
Parmi ces personnes, certaines risquent leur vie, en raison de la dictature quelles ont justement fui et qui est toujours en place dans leur pays dorigine.
Toutes ces personnes avaient été considérées par le gouvernement vaudois comme ne pouvant pas, à un titre ou à un autre, être renvoyées dans leur pays dorigine. Et pourtant! Un accord, négocié en catimini début 2004, par lancien conseiller dEtat socialiste Pierre Chiffelle et le Département de Christoph Blocher, avalisé par ce même gouvernement, stipule que ces renvois doivent exécutés, par la contrainte si nécessaire. Ignoble, indécent, inacceptable!
Mise en place dun refuge
Sous limpulsion de la coordination asile, regroupant toutes les associations de défense du droit dasile et plus généralement des droits des migrant-e-s, la résistance sest organisée. Elle a abouti à la mise en place dun refuge, dans la salle paroissiale de Malley à Lausanne, à un élan de solidarité exceptionnelle, à une prise de position du Grand Conseil vaudois ainsi que de nombreux syndics et membres dexécutifs communaux contre ces renvois. Lexécutif vaudois fait jusquici la sourde oreille! Obéissant au doigt et à lil aux directives de lOffice fédéral des réfugiés (ODR), le magistrat UDC Jean-Claude Mermoud continue à brandir la menace de rafles policières pour arrêter les requérant-e-s qui se soustraient au renvoi. Pour regagner du terrain dans lopinion publique, il met en avant des arguments tirés de la pire propagande xénophobe, stigmatisant de manière honteuse des familles de requérants. Blocher et ses exécutants cantonaux foulent aux pieds des règles fondamentales de lEtat de droit, au nom duquel ils prétendent agir: par exemple, celle du droit de chaque requérant-e à la notification dune décision de renvoi motivée et pouvant faire lobjet dune procédure de recours ou celle de lobligation quont les autorités vaudoises exécutant les renvois dexaminer si le principe de non-refoulement garanti par la Convention européenne de sauvegarde des droit de lhomme et des libertés fondamentales (CEDH) et de la Convention sur le statut du réfugié, ratifiées toutes deux par la Suisse, est bien respecté. Un avis de droit de M. Pierre Moor, Professeur à la Faculté de droit de lUniversité de Lausanne, met en particulier en évidence, le fait que des garanties élémentaires de procédure ont été bafouées par les autorités fédérales et cantonales et que, de ce fait, lexécution des renvois est illicite, car fondée sur des actes administratifs viciés à la base.
La lutte menée, dans le canton de Vaud, contre le renvoi de ces requérant-e-s dasile illustre, si besoin est, le fait que la politique blochérienne est synonyme darbitraire, de cynisme et de mise en cause des libertés fondamentales! Attiser systématiquement la xénophobie, comme le fait lUDC, a pour fonction de créer les conditions nécessaires à une mise en oeuvre de mesures dexception, certes dabord aujourdhui dirigées contre des requérants dasile ou des immigrés, mais certainement demain à légard de la très grande majorité de la population. Le ralliement du Conseil fédéral, cet été, au dernier train de mesures liberticides, prônées par Blocher dans le cadre de la révision en cours de la loi sur lasile, est de ce point de vue très préoccupant.
Autisme du Conseil dEtat
Cette lutte illustre également quune résistance, largement soutenue dans la population, à la politique blochérienne est possible. Lécho du mouvement de solidarité, dans les médias et lopinion publique, na certes pour lheure pas fait reculer, sur le fond, lexécutif vaudois. Celui-ci na effectué quun recul tactique, en accordant un nouveau délai de «grâce» de 10 jours pour les renvois. Quant aux propositions d«aide au retour», véritable miroir aux alouettes, elles se limitent à se débarrasser des personnes concernées en leur versant une somme dargent, ne se préoccupant nullement de leurs conditions daccueil et séjour! Le développement de ce mouvement de solidarité a rendu dores et déjà beaucoup plus difficile lexécution déventuels renvois. Il a également permis de contrer efficacement limage du requérant dasile «profiteur» propagée par lUDC. Lengagement des Eglises, dAmnesty International ou lindignation de nombreux citoyens et citoyennes face à lautisme du Conseil dEtat en témoigne.
A lappel de la coordination asile, plus de 2000 personnes ont manifesté, samedi 11 septembre 2004, à Lausanne pour affirmer quaucun requérant-e dasile ne doit être renvoyé-e et exiger que laccord entre lODR et le Conseil dEtat soit dénoncé! Cette forte mobilisation est significative de lampleur du soutien parmi la population. Lexécutif vaudois continuera-t-il à faire la sourde oreille? Notre solidarité doit et va se renforcer dans les jours et les semaines qui viennent, pour que ce gouvernement prenne enfin en compte lexigence élémentaire de suspension de tous les renvois et de celle de respect des règles de lEtat de droit!
Jean-Michel DOLIVO
Vos dons, avec mention «Refuge», à SOS-Asile Vaud, CCP 10-24739-4.