Swissmetal enfonce le coin de la division!

Swissmetal enfonce le coin de la division!

A Reconvilier, la colère le dispute au découragement, comme l’illustre l’amertume rageuse de Pierre-Yves Niederhauser («Karl le blogueur»), invitant les salarié-e-s à démissionner du syndicat Unia. Il est vrai que Martin Hellweg, le patron de Swissmetal, sait habilement utiliser les désaccords entre syndicat et commissions du personnel de la Boillat, s’appuyant sur le «sens du partenariat social» du premier pour mettre en difficulté les secondes, et avec elles tout le personnel de l’entreprise.

Il a pu tabler aussi sur la décrue de la mobilisation, évidente ces derniers temps. Il suffit de voir les réactions officielles à son dernier coup de force, la rupture unilatérale de la médiation suivie du licenciements de deux membres de la représentation des travailleurs, pour comprendre la marge de manœuvre dont il dispose. Présentant ces faits, la Neue Zürcher Zeitung a simplement sous-titré ensuite: «Bloch, Berne et Unia regrettent la rupture» (NZZ Online, 28.606). Des regrets dont Hellweg ne se remettra sans doute pas…

Il faut souligner, comme l’explique Nicolas Wuillemin, licencié lui aussi, et porte-parole des commissions du personnel, que ces dernières avaient parfaitement le droit d’obtenir un délai pour faire, avec le personnel, des contre-propositions au rapport de l’expert mandaté par la médiation, Jurg Müller. Un délai d’autant plus nécessaire que, contrairement au syndicat Unia, les commissions du personnel n’avaient pas été informées, avant la séance du 15 juin, des conclusions du rapport. (Journal du Jura, 29.6.06).

L’accueil réservé par le personnel de la Boillat au coprésident d’Unia, Renzo Ambrosetti, en février lorsqu’il a mis en balance le soutien financier d’Unia pour faire accepter l’entrée en médiation, puis le 19 juin lorsqu’il a défendu son approbation des propositions de l’expert, montre bien les difficultés de la direction syndicale dans cette lutte. Comme les nombreuses tentatives, plus ou moins habiles, de justification de sa pratique, surtout soucieuse de voir au plus tôt les choses rentrer dans l’ordre. Une orientation pour le moins mal perçue: «certains comparent carrément Ambrosetti à Hellweg et en arrivent à traiter les membres des commissions de complices du syndicat» explique N. Wuillemin. Par deux fois au moins, la direction syndicale a ainsi été vue comme voulant forcer la décision à tout prix, sans beaucoup de concertation avec le personnel.

Tirant les leçons de ce conflit, Renzo Ambrosetti affirme qu’il a «montré les limites du partenariat social» (Der Bund, 23.6.06). Il pourrait aussi avoir crûment mis en lumière les limites d’une politique syndicale toujours engluée dans la paix du travail et sa machinerie.

Daniel SÜRI