Loi sur la Police Cachez ce passeport que je ne saurais voir…

Loi sur la Police Cachez ce passeport que je ne saurais voir…

La nouvelle loi sur la police neuchâteloise n’a pas fini de
faire parler d’elle. Après son toilettage en commission,
on aurait pensé que cette loi serait acceptée sans
problèmes. Plus d’une dizaine de communes
l’appliquent déjà et la liste de celles qui veulent
en bénéficier s’allonge… Le système
à l’avantage d’être compréhensible: une
seule police dans tout le canton, seule habilitée à
intervenir et à verbaliser. Chaque commune détermine le
nombre et le genre de prestations de sécurité
qu’elle souhaite en négociant avec la nouvelle Police
neuchâteloise. Simplification des procédures,
rationalisation des équipements, amaigrissement des niveaux
hiérarchiques, et ceci sans licenciement. Avec encore des
innovations intéressantes: obligation pour la police – sur
propositions du représentant de solidaritéS – de
mener des actions de prévention et d’information,
possibilité de faire participer aux frais de
sécurité les organisateurs de manifestations (disposition
ne concernant pas les manifestations politiques), destruction
obligatoire après 3 mois des images enregistrées et enfin
inscription dans la formation des policiers de cours
d’interculturalité, de médiation et de
communication non-violente (proposition du groupe PopVertSol).

Le Conseil d’Etat aurait pu craindre une offensive des clubs
sportifs, contraints d’assumer leurs responsabilités en
matière de sécurité ou un dernier baroud
d’honneur de directeurs de police privés de leur joujou,
mais l’oposition est venue de l’UDC, outrée de
constater que la fonction de policier avait été ouverte
aux étrangers. L’argumentation du député
Storrer (ex-radical) évoque les épouvantails que la
droite plantait sur le mur de Berlin: «Mais que se passerait-il
donc en cas de guerre avec ces policiers étrangers? Nul ne peut
servir deux maîtres. Qu’ils se naturalisent donc pour
devenir policier neuchâtelois.». Et dans la foulée
d’annoncer un référendum sur ce point.

Voilà, une position fort surannée au temps de la libre
circulation des personnes en Europe et à l’heure ou le
nombre de binationaux augmente sans cesse. Mais ce peu ragoûtant
brouet dégage aussi une forte odeur de rance: la loi, ne parle
pas d’étrangers, mais bien d’étrangers
détenteurs du permis C et domiciliés depuis plus de 5 ans
dans le canton. Voilà qui limite singulièrement
l’accès à la profession. Cette timide ouverture,
fruit d’un compromis au sein de la commission, ne s’adresse
en fait qu’à des personnes déjà fort
impliquées dans un processus d’intégration et au
fait des réalités cantonales. Encore une fois l’UDC
pratique l’amalgame et préfère agiter son chiffon
barré du mot «ÉTRANGERS» au lieu de
réfléchir.

Espérons que les citoyen-ne-s sauront refuser cette
démagogie. Dans le cas contraire il faudra tout de suite
constituer des réserves de guerre conséquentes: bordeaux,
beaujolais, bourgogne sont en effet des vins étrangers.

Pascal Helle