Constituante: ContrAtom appelle à voter NON!

Constituante: ContrAtom appelle à voter NON!

L’association
antinucléaire a pris position contre le projet actuel de
«révision» de la Constitution genevoise. Interview
d’Anne-Cécile Reimann, présidente de ContrAtom.

En quoi la Constitution concerne-t-elle une association comme ContrAtom?

Le combat fondateur – et victorieux! – de ContrAtom a
stoppé le surgénérateur Superphénix
à Malville. Nous avons contribué de manière
décisive à une mobilisation populaire, dans la
durée, émaillée de manifs d’envergure comme
d’actions militantes, allant de l’occupation du consulat de
France au blocage du TGV… Nous avons pu entraîner les
autorités, de la Ville puis du Canton, dans l’opposition
politique et juridique à ce réacteur dangereux, en nous
appuyant en particulier sur l’art. 160c de la constitution
genevoise. Article antinucléaire issu de l’initiative
«L’énergie notre affaire!», adoptée
«à chaud» en votation populaire, peu après la
catastrophe de Tchernobyl.

Qu’est-ce que ce combat vous a appris?

Cette expérience, comme la suite de notre engagement pour une
politique énergétique antinucléaire, nous a
montré l’importance et l’utilité d’un
tel article comme point d’appui. Mais elle nous a aussi appris
qu’un texte légal ne suffisait de loin pas. En effet, pour
faire simplement appliquer l’engagement des autorités
contre Superphénix découlant de cet article, on a
dû se battre, sur le terrain, pendant des années, y
compris contre des «spécialistes» du droit, qui
disaient que ce n’était pas possible et que les questions
internationales étaient affaire exclusive de la
Confédération.

Ainsi, nous sommes d’un côté attachés
mordicus à l’esprit comme à la lettre de
l’art. 160c (devenu 160e), qui risquerait d’être
caviardé, dénaturé et vidé de son contenu
dans ce processus de révision; d’un autre
côté, nous savons d’expérience que sans
rapports de forces sérieux on ne gagne rien. Et cette
révision-ci ne répond pas à ce critère, il
n’y a pas de mouvement ou de demande populaire réelle, ni
d’ailleurs de revendication de notre part en la matière.

Notre manière de réviser la constitution, c’est par
des initiatives populaires! Contre la libéralisation et le
tout-au-marché électrique, nous avons justement
participé à une initiative populaire cantonale,
acceptée le 16 décembre dernier à une large
majorité. Et c’est, parmi d’autres, ce vote
populaire récent en notre faveur, que des promoteurs de la
Constituante voudraient pouvoir «effacer», en
prétendant que notre Constitution est poussiéreuse et
vieillie! C’est une arnaque, il faut voter NON!

Que penses-tu de la campagne en cours à ce sujet?

Je suis atterrée par le niveau du débat et par la
manière dont les gens risquent de se laisser embobiner. En fait,
pas grand monde ne prend cette affaire au sérieux et le OUI
risque de passer, parce que les gens ne se sont pas rendu compte des
enjeux et grâce aux arguments superficiels sur la
nécessité de faire le ménage, etc.

La soirée organisée par le PS vendredi dernier
était édifiante à cet égard.
Annoncée dans la presse, avec Andreas Gross, conseiller national
et député au Conseil de l’Europe en vedette, et un
thème racoleur «Révision de la Constitution: Quel
enjeu pour la gauche et les associations?», la soirée a
peiné à rassembler une vingtaine de personnes, dans une
salle pouvant en contenir dix fois plus. Une démonstration que
l’idée que la «société civile»
se bouscule au portillon pour se faire entendre et attend impatiemment
la nouvelle Constituante est bidon!

Et sur le plan du contenu de ce débat?

Pour l’essentiel, Andreas Gross s’est évertué
à rassurer face à une série de questions de
personnes inquiètes des reculs possibles. Pour lui, dans les
processus de révision analogues ailleurs rien n’aurait
été «perdu». Mais surtout – sans grand
succès vu l’audience limitée – il a
tenté de faire partager un enthousiasme pour le grand
remue-méninges que serait le débat autour de la
Constitution, qui nous ferait sortir de notre train-train, mettant en
avant la séduction que devraient pouvoir exercer nos
idées sur les élu-e-s de droite et exhortant à
avoir confiance dans celles-ci…

Bref, un discours cherchant à convaincre qu’on peut
éviter de construire des rapports de forces réels sur des
questions concrètes et prônant avant tout un
«dialogue constructif» avec nos adversaires, dont nous
sortirions victorieux par la seule force de notre verbe, à
condition de s’associer de bons spécialistes des sujets en
débat… A la question de savoir comment il expliquait
qu’au point de départ de cette révision on trouvait
le Parti radical genevois, il s’est fendu d’un éloge
en faveur de celui-ci, affirmant qu’il serait heureux
d’avoir à Zurich des radicaux comme les nôtres!
Quant aux idées concrètes, pour la révision, il
n’y en a guère eu d’émises ce soir-là!
J’en suis sortie plus convaincue que jamais qu’il faut
voter NON!

Entretien réalisé par Pierre Vanek