Plus de justice fiscale ou moins d’impôts?

Plus de justice fiscale ou moins d’impôts?

Le Parti du Travail genevois a
lancé en mai dernier une initiative populaire cantonale
intitulée « plus de justice fiscale ». Obtenir
davantage de justice sur le plan fiscal est tout à fait
légitime, encore faut-il que le contenu de l’initiative
corresponde à cet objectif.

solidaritéS a été à l’origine de
plusieurs initiatives fiscales visant à mettre davantage
à contribution les hauts revenus et les grosses fortunes, ou
encore à revenir sur la baisse d’impôts
initiée par les libéraux dans le sens d’une
suppression de cette baisse pour les très hauts revenus.
C’est donc logiquement que nous aurions dû soutenir
l’initiative du Parti du travail si celle-ci correspondait
à son intitulé. Malheureusement cela n’est pas le
cas.

En effet l’initiative propose de relever les montants relatifs au
rabais d’impôts en alignant ceux-ci sur le revenu minimum
cantonal d’aide sociale.

Or le rabais d’impôts s’applique à tous les
contribuables, indépendamment de leur capacité
contributive. Si bien que l’augmentation du rabais
d’impôt profiterait aussi bien aux multimillionnaires en
revenus qu’aux salarié-e-s les plus modestes. Pour
davantage de justice fiscale il faudrait donc ou bien limiter le
nouveau rabais d’impôts à partir d’un certain
niveau de revenu, ou bien relever le taux maximum d’imposition.
Ce que ne prévoient pas les auteurs du texte. De plus, les
baisses de recettes fiscales découlant de l’initiative (et
qui ne sont pas chiffrées) conduiraient inévitablement
à des baisses de prestations pour les moins fortunés que
l’initiative prétend défendre.

Par ailleurs, toute initiative fiscale doit tenir compte du contexte de
ces quinze dernières années où les milieux
patronaux et libéraux n’ont cessé de
réclamer et obtenus des baisses fiscales avec deux objectifs
simultanés : des avantages directs pour les plus hauts revenus
et des baisses de rentrées fiscales en vue de réduire les
prestations publiques. Ensuite, face à l’aggravation de la
dette, il est plus facile de réclamer de nouvelles coupes dans
les prestations.

Cette ligne n’est pas propre au canton de Genève, on la
retrouve partout sur l’ensemble de la planète
néolibérale. Elle a largement contribué à
alimenter un courant anti-impôts sur lequel surfe toute la droite
à des degrés divers.

L’initiative du Parti du Travail ressemble donc bien davantage
aux mesures de baisses d’impôts réclamées par
la droite qu’à une mesure de justice fiscale
défendant les prestations publiques en faveur de celles et ceux
qui en ont besoin.

Nulle doute qu’en cas de votation  populaire, cette
initiative serait aussi soutenue par ceux-là même que le
Parti du Travail genevois prétend combattre.

Bernard Clerc