Lycées: austérité en force et vives réactions spontanées

Lycées: austérité en force et vives réactions spontanées

Le 10 septembre, le Conseiller
d’Etat Gnaegi a convoqué les professeur·e·s
de lycée pour présenter les mesures proposées par
le gouvernement dans le cadre de son austérité
budgétaire.

Outre le gel des salaires, comme dans le reste de la fonction publique,
des mesures spécifiques sont prévues :
augmentation du temps de travail hebdomadaire (passage à
24 périodes pour tous), augmentation des effectifs de
toutes les classes de maturité (moyenne 22 élèves,
sans plafond), suppression de dédoublement de classes pour
l’enseignement des langues, suppressions des indemnités
pour le travail de corrections (en français et en philosophie),
suppression des décharges pour le travail de préparation
en labo de physique, réduction de l’enseignement en
économie (moins une heure), regroupement
d’élèves pour éviter des classes à
option en-dessous d’un effectif de 16. Un prof de français
engagé à 100 % a calculé que pour lui, cela
représentera 7 heures de travail hebdomadaires en plus.

    Les vives protestations, une heure de
débrayage spontané, rien n’y a fait. Le Conseil
d’Etat est resté de marbre, prétendant que les 5
millions économisés étaient supportables pour les
profs et ne changeraient pas les prestations pour les
élèves.

    Mais ceux-ci ne sont pas dupes : ils ont pris
l’initiative de riposter par une manif le mardi 22 septembre. Le
SSP, de son côté, a appelé à une
assemblée des enseignant·e·s le 17 septembre.
Colère et sentiment d’injustice ont conduit les profs
à rédiger une lettre qui sera remise au Conseil
d’Etat mardi après-midi. Un préavis de grève
va ainsi être déposé assorti d’une triple
demande: retrait immédiat de toutes ces mesures, suspension du
« frein à l’endettement » pour
deux ans (comme le permet la loi), vote sur l’initiative
populaire dormant depuis 2007 dans les tiroirs du Conseil d’Etat
et prévoyant un impôt sur les grandes fortunes rapportant
plus de 50 millions par an. Affaire à suivre !

Henri Vuillomenet


Interview d’Oriah, lycéenne à Blaise Cendrars (La Chaux-de-Fonds)

Suite à l’annonce des
mesures du Conseil d’Etat concernant les lycées du canton,
les élèves du Lycée Blaise Cendrars de La
Chaux-de-Fonds ont pris l’initiative d’organiser une manif
de protestation mardi 22 septembre.

Comment avez-vous pris cette décision ?

Après un entretien entre nos profs et le Conseiller
d’Etat, nous sommes retournés en classe et un de nos
enseignants nous a informés des restrictions et de
l’impact direct que celles-ci auraient pour nous.
Révoltés, nous avons décidé de lancer une
pétition des élèves en défense de la
qualité d’enseignement (qui nous touche directement) et
non les conditions de travail des enseignants.
    En moins de deux heures, nous sommes passés
dans toutes les classes et avons obtenu plus de 500 signatures.
Enthousiastes, on s’est dit qu’il fallait en faire quelque
chose. On a réfléchi et on s’est dit qu’il
fallait la déposer au Château. On a donc convoqué
les élèves dans l’Aula du Collège mercredi
passé (plus de 650 ont participé) et expliqué
pourquoi on faisait cette pétition et ce qu’on comptait
faire. On a fait circuler une feuille ou les élèves
motivés à monter au Château avec nous pouvaient
s’inscrire. Il y a eu plus de 450 inscriptions; on a donc
décidé d’organiser cette manif plus
sérieusement…

Vous avez aussi pris contact avec les
lycéen·ne·s de Neuchâtel, participeront-ils
à votre mouvement ? Et qu’allez-vous faire ?

On a essayé de trouver des élèves motivés
dans le bas. On est donc descendu avec des feuilles de pétition,
on a fait un peu d’information, expliqué ce qu’on
faisait mais on s’est assez vite fait relayer par des
étudiant·e·s des Collèges du bas. Des
élèves font signer la pétition, parlent de la
manifestation, et dans l’ensemble semblaient motivés. On
se retrouve mardi à 9 h 45 dans la cour principale
du DDR, on espère les motiver à amener la pétition
avec nous !

Quelles sont vos revendications ?

On revendique le fait qu’on ne veut pas que la qualité de
l’enseignement baisse. Avec les nouvelles restrictions, il
n’y aura par ex. plus de demi-groupes. C’est difficile pour
nous de comprendre comment on peut apprendre correctement une langue ou
faire des labos en étant 25 élèves par
classe ! On trouve dommage de perdre des choix d’OC, il
faut 16 élèves minimum pour ouvrir une classe, donc
ça veut dire plus d’option complémentaire physique,
plus d’OC maths appliquées, plus d’informatique.
Etre en première année 28 élèves par
classe, on pense que c’est juste infaisable.

Le Conseiller d’Etat, M. Gnaegi, en charge de ce dossier
brûlant, est monté à La Chaux-de-Fonds. Comment
s’est passé cette entrevue ?

On a un peu pris sa montée au Lycée comme contre-attaque
à notre initiative de montée au Château. On a
laissé M. Gnaegi parler et puis on s’est exprimé.
Son discours étant peu clair, on lui a posé beaucoup de
questions. Il nous a presque fait rire. Il a par ex. commencé
son discours en assurant qu’il n’y aurait aucune baisse de
qualité de l’enseignement et l’a terminé en
s’excusant du fait que la qualité serait un peu moins
bonne, en langues par ex., à cause de la suppression des demis
groupes. Mais l’ambiance est restée bon ­enfant.

Qu’espérez-vous obtenir ?

On est jeunes et optimistes, on espère donc que ce nouveau
budget ne sera pas accepté par le Grand Conseil. Notre but
était de nous faire entendre et de faire comprendre à la
population qu’on ne se battait pas juste pour le salaire des
profs, même pas du tout pour ça, mais qu’on se
battait pour la qualité d’enseignement, puisque
matière grise et connaissances sont le futur de notre
société !