Bush a déclaré la guerre… contre les femmes!

Bush a déclaré la guerre… contre les femmes!

Dans les médias, les cow-boys conservateurs jettent leurs chapeaux en l’air et dansent sur les tables pour célébrer la domination écrasante et le pouvoir renouvelé de Georges Bush, tant aux USA qu’à l’échelle du monde entier.



Michele LANDSBERG*


Ils poussent des hourrahs, parce que dorénavant les riches deviendront encore plus riches et Georges Bush ne pourrait pas, selon eux, être stoppé dans ses guerres multiples: guerre contre l’Irak, contre le «terrorisme», guerre sans pitié livrée aux pauvres des USA, et enfin guerre contre les femmes du monde entier!



Ils ne peuvent pas ne pas savoir, s’il leur reste même une parcelle de cervelle, que la croisade religieuse de Bush a déjà engendré des maladies, des souffrances physiques incommensurables, et la mort pour d’innombrables femmes, nouveaux-nés et petits enfants. Bush a donné le ton, quand il a célébré le tout premier jour de son mandat en réintroduisant la «règle mondiale du bâillon», soit le refus arbitraire de toute aide US à tout organisme – où que ce soit dans le monde – qui ose simplement mentionner le mot «avortement». Puis, il a annulé la contribution de 34 millions de dollars au Fond des Nations Unies pour la population, et l’effet oppressant de ces mesures sur les femmes était de nature à réchauffer le cœur des Talibans.

Les alliés de Bush!


Ensuite, lors d’une réunion à Bangkok fin octobre, Bush est allé plus loin encore: des délégué-e-s d’Asie et du Pacifique s’étaient assemblé-e-s pour préparer une conférence des Nations Unies sur la population en décembre. Les USA y ont envoyé – pour menacer le reste du monde – un porte-parole, neuf et sans expérience, mais bardé d’un fanatisme sans failles, associé à John Klink – un dur qui représentait précédemment… le Vatican! Les Etats-Unis, assénèrent-ils aux délégué-e-s stupéfait-e-s, sont prêts à se retirer d’un accord historique de 1994 sur la santé reproductive.



En clair, Georges Bush embraye la mécanique pour faire la police des utérus des femmes du monde entier.



Quelle plaisanterie nauséabonde: cet homme ignorant (salué aujourd’hui comme «rusé» parce qu’il a gagné les élections, sur le dos des victimes du World Trade Center et face à une opposition démocrate au tapis) s’est allié sur le plan moral avec les mêmes Etats qu’il dénonce comme constituant l’«axe du mal». A part le Vatican, absolument déterminé à imposer sa religion sur les corps de toutes les femmes partout, Bush n’a pas de plus solides alliés dans sa campagne réactionnaire que les régimes fondamentalistes islamiques.



Mais qu’a-t-il fait au juste? Revenons en arrière. Voici un échantillon de quelques-uns des programmes sabrés ou suspendus, quand Bush à retiré, l’été dernier, les 34 millions de dollars du programme du Fonds des Nations Unies pour la population:

  • Des programmes de planning familial dans huit districts ruraux du Kenya (informant sur la prévention du sida, la contraception et l’accouchement);
  • Une initiative pour diminuer la mortalité des mères au Mozambique et pour y stopper la propagation du sida chez les jeunes;
  • Un programme de formation en obstétrique, pour les médecins du Bangladesh, pays où une femme meurt toutes les heures de complications durant la grossesse ou au moment de l’accouchement;
  • La première étude de population au Timor Oriental, qui devait servir de base à un programme de prévention du sida parmi les jeunes, les réfugié-e-s, les pêcheurs et les travailleuses-eurs du sexe;
  • Un plan biennal dans l’Etat indien du Maharashtra (99 millions d’habitant-e-s) pour réduire la mortalité des nouveau-nés. Près de 500 bébés de plus y mourront ainsi, cette année, et 200 ou 300 femmes de plus y mourront en cours d’accouchement.
  • Un programme de formation de 4000 travailleurs-euses sanitaires au Vietnam, ainsi que d’équipement – en matériel médical de première nécessité et en médicaments – pour 500 cliniques dans des régions montagneuses reculées de ce pays;
  • Des programmes de distribution de moyens de contraception en Thaïlande, au Népal, en Algérie, au Kazakhstan et au Laos…


Et maintenant, sous le prétexte que l’approche des Nations Unies en matière de santé reproductive se réduirait à «des avortements et rien que des avortements» (une déformation délibérée), les Américains sont sur le point de se retirer du programme d’action du Caire. En effet, lors d’une conférence des Nations-Unies sur la population dans cette ville, en 1994, un tournant mondial décisif avait été pris en direction du soutien aux droits humains pour les femmes. Au lieu de campagnes forcées de limitation de la fertilité, les Etats membres de l’ONU devaient offrir aux femmes elles-mêmes le soutien sur le plan de l’éducation et sur le plan médical, afin qu’elles puissent prendre leurs propres décisions sur la prévention des maladies, les grossesses et les naissances.



Peu connu hors des milieux onusiens, cet accord du Caire a néanmoins marqué un pas en avant important. Les femmes les plus démunies du monde devaient censément avoir accès à la même dignité et à la même liberté que les privilégiées.

La réaction en marche!


Mais, avec la menace de Bush de balancer par-dessus bord les principes du Caire, tout a changé. Les financements de programmes clés en matière de santé à l’échelle mondiale sont menacés. Les droits des femmes du monde entier seront balayés, afin que Bush puisse récompenser ses supporters du côté de la droite fondamentaliste chrétienne.



Il fut un temps où je pensais que les progrès pour les femmes, gagnés tellement durement, ne pourraient jamais faire l’objet d’une marche arrière. Mais Georges Bush va nous montrer jusqu’où l’on pourra nous faire reculer! Au cours des deux – ou peut être six – prochaines années, il va nommer d’innombrables bureaucrates et juges extrémistes pour démonter les lois et institutions des Etats-Unis qui protègent le droit à l’égalité pour les femmes. L’Amérique – qui a été un haut lieu de conquêtes féministes, deviendra un exemple effrayant de ce qui peut arriver quand religion et politique s’accouplent pour nous ramener au Moyen-Age.



Traduction et intertitres de la rédaction.


*Journaliste et féministe canadienne. L’article ci-dessus est paru le 20.11.02 dans le Toronto Star titré Bush Continues His War On Women, l’original est disponible sur le site www.zmag.org