11e révision AVS: NON à une régression au dépens des femmes !

11e révision AVS: NON à une régression au dépens des femmes !

Au moment où vous recevez ce journal, les Chambres
fédérales ont repris leurs travaux, avec au programme de
la session à Berne, la 11e révision de l’AVS, dont
la présidente de la commission sécurité sociale du
National espérait fin juin qu’elle serait adoptée
« définitivement » cet automne, soit
dans les semaines qui viennent, un accord entre les deux Chambres se
profilant.

    Ce
« définitivement »… est bien
sûr un vœu pieu ! En effet, le
référendum est d’ores et déjà
annoncé par l’USS, et cette 11e révision bis, sera
donc, à n’en pas douter, soumise au peuple, avec
l’espoir des référendaires – dont nous serons
– de lui faire subir un NON aussi sec et sonnant que celui
qu’a subi le projet de 11e révision, premier du nom,
rejeté massivement dans les urnes en mai 2004, par près
de 70 % des votant.e.s, avec des pointes de refus spectaculaires
comme le 86 % atteint dans le canton du Jura !

    Cette révision rétrograde contient
deux « points forts » inadmissibles. Le
premier, c’est l’élévation de
l’âge de la retraite des femmes à 65 ans,
rejetée en 2004 par le peuple et remise en selle
aujourd’hui, au nom de cette prétendue
« égalité de traitement » vers
le bas, qui fait fi des inégalités persistantes au
détriment des femmes, dans le domaine des salaires bien
sûr, mais aussi dans le domaine de la répartition des
tâches ménagères, éducatives, etc., comme
dans l’accès aux postes à responsabilités.

    Sous ce rapport, l’indécence de la
droite ne connaît pas de bornes : n’a-t-on pas
entendu invoquer, à l’appui de cette
élévation de l’âge de la retraite des femmes,
leur « contribution financière
moindre » que celles des hommes à la caisse de
l’AVS, alors que celle-ci découle, évidemment, des
inégalités professionnelles qui les frappent.

    Quoi qu’il en soit, cette
élévation de l’âge de la retraite des femmes
correspond à une « économie »
d’un montant de 800 millions par an, pour lequel on entend les
faire passer à la caisse ! L’UDC, et une partie du
groupe radical-libéral, sont favorables à la
manière brutale : faire payer cette facture aux femmes
sans aucune compensation, avec la possibilité certes de prendre
une retraite avant 65 ans (tout comme les hommes), mais au prix
d’une réduction des rentes, intégralement
supportée par les bénéficiaires, aux taux
dicté par les tabelles des actuaires.

    Un secteur de la droite, qui entend préserver
plus de chances à la révision dans les urnes, accepte la
remise en jeu de 400 millions pour
« modérer » les diminutions de rente
en cas de retraites anticipées… mais, in fine, on se
retrouve toujours avec une AVS dégradée, une situation
des femmes péjorée et des retraites anticipées,
pour celles et ceux qui en ont les moyens financiers.

    Une AVS dégradée, d’autant
qu’un autre volet de cette révision s’en prend
à tous les rentiers AVS, femmes et hommes, en remettant en cause
le mécanisme de l’indexation des rentes, ceci à
hauteur d’une centaine de millions de francs de plus par an
d’économies prévues sur le dos des
retraité.e.s. Ainsi, le rythme de la compensation du
renchérissement serait lié au niveau du fond de
compensation AVS. On indexerait tous les deux ans, mais seulement si le
fonds de compensation atteint 70 % des dépenses
annuelles… en-deçà, il faudrait attendre que le
renchérissement dépasse les 4 % pour qu’il
soit compensé. Or, le Parlement peut lui-même
s’arranger pour faire passer le niveau dudit fond en dessous de
ce seuil, en refusant à l’AVS les recettes
supplémentaires dont elle a besoin.

    Bref, la campagne contre le
démantèlement de l’assurance-chômage 
aura tout juste vu tirer les dernières salves
référendaires, qu’on devra sans doute remonter au
front pour défendre notre AVS. Une succession
d’échéances qui illustre évidemment
l’intensité des coups de butoirs successifs que la droite
patronale porte contre nos droits sociaux. Une preuve aussi que des
victoires référendaires, au coup par coup, comme celle de
2004 sur l’AVS, ou celle de ce printemps en matière de
LPP, ne suffisent pas à endiguer le rouleau compresseur
antisocial, qui poursuit sa marche régressive…

    Pour s’y opposer, il importe de dessiner
d’autres perspectives pour les droits sociaux. Le
référendum nécessaire contre la 11e
révision de l’AVS risque de
« tomber » en même temps que
l’initiative populaire fédérale de l’USS pour
un salaire minimum, lancée dans la foulée des initiatives
cantonales impulsées par solidaritéS. On pourrait
être tentés de repousser l’initiative au-delà
des 100 jours du référendum AVS pour n’avoir pas
à « faire deux choses à la
fois ». Ce serait une erreur ! Au contraire dans
une logique populaire et mobilisatrice, il faut réussir à
construire un discours et une action de terrain qui lient les deux
sujets, comme aspects d’une défense intransigeante des
droits sociaux des salarié.e.s… et récolter les
signatures sur les deux objets en même temps.

    Sans parler du fait qu’une
« défense » sérieuse de
l’AVS, ne peut se contenter de répondre aux attaques
immédiates de la droite patronale, mais qu’il faudrait
être en mesure de proposer un véritable système de
retraites populaires qui fusionne le deuxième pilier avec
l’AVS en préservant l’ensemble des droits acquis.
Nous en avons déjà parlé dans nos colonnes, nous y
reviendrons sous peu : cette proposition étant
l’une de celles que les militant.e.s de solidaritéS ont
porté au récent week-end national de travail de La
Gauche. Affaire à suivre donc… Tout en réaffirmant
l’évidence que seules des batailles menées à
travers des luttes, des manifestations, voir des grèves,
c’est-à-dire portées réellement par des
activités collectives des salarié.e.s, peuvent modifier
durablement les rapports de force sociaux, faute de quoi les combats
institutionnels évoqués ci-dessus, type
référendum et initiative, sont vouées à
l’échec.

Pierre Vanek