Russie

Russie : Le mouvement social a besoin de notre solidarité active dans toute l'Europe!

Après avoir fait condamner les trois punkettes activistes du groupe Pussy-Riot à deux ans de camp de travail à régime sévère, dans une parodie de procès, Poutine entend visiblement préparer un autre procès politique d’envergure contre l’opposition démocratique.

 

Cette fois-ci, il s’attaque à plusieurs activistes du Front de gauche, un des nombreux courants du mouvement social en Russie. Notamment, à Sergueï Oudaltsov, son leader et opposant très connu (par ex. dans le mouvement pour la défense de la forêt de Khimki près de Moscou), à Léonid Razvozjaïev, assistant du député de gauche Ilya Ponomariov (parti Russie Juste), et à Konstantin Lebedev, proche collaborateur d’Oudaltsov.

 

 

Une répression brutalement durcie

Les différents secteurs de l’opposition russe multiplient les appels aux mouvements sociaux et démocratiques en Europe contre le durcissement brutal de la répression depuis la réinvestiture de Poutine comme président, en mai dernier. […] Rappelons les derniers faits.

–  le 17 octobre: une instruction est ouverte par le Comité d’Investigation Russe (lequel dépend directement du président !) contre ces trois activistes et plusieurs autres, tous ayant participé à la grande manifestation contre les massives fraudes électorales le 6 mai 2012 à Moscou, jour de l’investiture de Poutine. On les accuse de : «préparation à l’organisation de troubles massifs», «préparation d’actes terroristes sur le territoire russe», «ils prévoyaient de renverser le gouvernement». Rien de moins ! Cette instruction fait suite à la diffusion, le 4 octobre, sur la chaîne officielle NTV (contrôlée par l’Etat via le géant gazier Gazprom), d’un « documentaire », intitulé « L’anatomie d’une contestation ». […] Ce grossier montage (images de personnages et voix méconnaissables, bandes son et sous-titres divergents), qualifié par Oudaltsov de «délires d’un fou», a été pourtant déclaré authentique par le Comité d’investigation, et sert de base à l’accusation. Les accusés risquent dix ans de camp.

le 19 octobre: Léonid Razvozjaïev a été kidnappé par des hommes masqués à Kiev, en Ukraine, menotté et jeté dans une fourgonnette, au moment où il sortait des bureaux du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (UNHCR). Emmené de force à Moscou, il a été placé en détention provisoire dans la tristement célèbre prison de Lefortovo, sur décision du tribunal prise le 21 octobre. A la sortie du tribunal, il a crié vers les journalistes présents : «J’ai été torturé pendant deux jours, dites-le!». Des militants des droits de l’homme ont pu le voir plus tard en prison. Il leur a raconté qui il avait été torturé quelque part dans une cave, et menacé de mort – lui, sa femme et leurs enfants – s’il n’avouait pas sa participation aux échauffourées (provoquées par la police, selon l’opposition) lors de la manifestation contre Poutine le 6 mai. […]

 

Un Poutine affaibli se vexe et se venge

Il est clair que Poutine est décidé à défendre coûte que coûte son pouvoir, affaibli après les manifestations sans précédent qui avaient eu lieu à Moscou et dans de nombreuses villes de Russie contre les élections truquées, législatives en décembre 2011 et présidentielles en mars 2012, contre « le parti des voleurs et des escrocs » (appellation courante du parti poutinien Russie Unie au pouvoir, inventée par le très populaire blogueur et oppositionnel Alekseï Navalny). De même, Poutine n’a visiblement pas supporté l’affront qu’ont représenté à ses yeux les manifestations du 6 mai, le jour de son intronisation.

     Les défenseurs des droits de l’homme et les différentes structures de l’opposition en Russie sont fortement mobilisés. Leur inquiétude est grande. […]

     Dans une Lettre ouverte pour l’arrêt des répressions politiques en Russie, publiée le 28 octobre dans Médiapart par Alexis Prokopiev de l’Association Russie-Libertés en France, adressée au Conseil d’Europe, l’OSCE et l’UNHCR, plusieurs associations alertent l’opinion internationale sur le cas des trois activistes du Front de Gauche. On y lit entre autres: «L’absence d’une réaction forte et rapide de la communauté internationale face cette nouvelle vague de répressions serait un feu vert définitif aux autorités russes de tous niveaux pour accentuer encore plus les répressions, les généraliser et les rendre banales, faisant basculer le pays dans la peur ou même la terreur.»

 

Stress-test pour le mouvement de contestation

Dans une déclaration du 21 octobre (publiée par Inprecor et reprise par plusieurs sites), le Mouvement Socialiste de Russie explique : « La vague de répression à laquelle nous assistons aujourd’hui est un ‹stress-test› pour le mouvement de contestation: soit nous tiendrons bon, soit nous aurons à traverser une nouvelle période d’apathie et de peur. Face à cette pression policière sans précédent, nous avons besoin de la solidarité de nos camarades d’Europe et du monde entier. Nous demandons la tenue de piquets pour la libération immédiate de Konstantin Lebedev, l’arrêt de l’action pénale contre Sergueï Oudaltsov et Léonid Razvojaev ainsi que la libération des prisonniers politiques ayant participé à la manifestation du 6 mai à Moscou.»

     L’opposition démocratique et le mouvement social en Russie ont besoin de notre solidarité, de la solidarité active des organisations du mouvement social dans toute l’Europe.

 

Stefan Bekier

Militant de la Gauche Anticapitaliste-Front de Gauche (F) 29.10.12
Publié sur www.europe-solidaire.org – coupes et intertitres de notre rédaction