Élections cantonales

Élections cantonales : Dans l'air du temps, maussade

Après les tribulations du vote des élections cantonales, les urnes ont finalement été ouvertes le 28 avril. Deux éléments sont à retenir à nos yeux : d’une part, le score de l’UDC Perrin qui lui permet de se représenter au 2e tour avec de fortes chances d’être élu et, d’autre part, le basculement du Grand Conseil vers une majorité de partis de droite.

La campagne d’Yvan Perrin pour le Conseil d’Etat a entraîné une progression de son parti au Grand Conseil?; l’UDC passe de 14 à 20 sièges. Il est l’expression d’un malaise qui s’installe, de la crainte d’une situation internationale instable et incompréhensible, de l’effarement devant une situation où tout se décide ailleurs qu’en Suisse sans que l’on sache où, le tout mâtiné de xénophobie rendant l’étranger responsable du mal-être général. La progression de l’UDC n’a rien de proprement neuchâtelois et, avec des hauts et des bas, c’est le lot de tous les cantons suisses, pour en rester aux frontières nationales.

Après deux législatures avec une majorité PS-Verts-POP-solidaritéS, le parlement retrouve un visage de droite, avec deux nouveaux venus, les Verts libéraux (+ 5 sièges) et le PDC (+ 1 siège). L’apparition des Verts libéraux s’est faite en partie aux dépens du PLR (qui perd 6 sièges), mais n’était autre qu’une opération libérale destinée à élargir un peu l’assiette électorale de ce courant. Une même tentative avait été faite, en vain, il y a 4 ans?; cette fois, d’importants moyens financiers leur ont ouvert la porte du parlement par une présence très visible tout au long de la campagne. 

Ce retour de la droite n’est pas vraiment une surprise. En effet, durant les huit ans où la gauche a détenu la majorité, elle n’a jamais réussi à créer durablement un minimum d’espoir et de confiance. La règle inscrite dans la Constitution, par la volonté socialiste et radicale, de la nécessité d’une majorité qualifiée des 2/3 pour toute dépense ou recette importantes n’a fait que figer le système en le cantonnant dans une gestion médiocre du quotidien qui exclut tout projet ambitieux. 

Cette gestion du PS avec le PLR, systématiquement et volontairement ancrée au centre, comme la politique néolibérale du Conseil d’Etat – y compris durant la législature 2005–2009 où la gauche bénéficiait de la double majorité parlementaire et gouvernementale – ajoutées aux multiples cafouillages et scandales du Conseil d’Etat (de droite) au cours des 4 ans passés, tout cela a amplement savonné le terrain de la chute de la participation électorale. 

Au cours de la dernière législature, le seul moment où la gauche est apparue unie et à l’offensive, c’est sur la question du salaire minimum, proposition que nous avions initiée au parlement en 2006, et réussi à faire inscrire dans la Constitution cantonale par un vote populaire gagné en novembre 2011. Une loi d’application pour l’introduction d’un salaire minimum à 4000 francs est prête, mais au vu de la composition du nouveau parlement, cette loi ne fera sans doute pas l’économie d’une nouvelle initiative populaire.

Au final, toute la gauche laisse des plumes : le PS perd 3 sièges, les Verts 2, le POP – solidaritéS 1 (à La Chaux-de-Fonds). Les listes communes avec le POP dans les districts de Neuchâtel et Boudry ont conservé leurs sièges à Neuchâtel (élus : François Konrad – solidaritéS et Martha Zurita – POP) comme à Boudry (élu : Thomas Perret – POP). 

 

Que va-t-il se passer maintenant?

Le deuxième tour du Conseil d’Etat devrait donner une majorité au Parti socialiste, les résultats des trois can­didat·e·s au premier tour les ont en effet placé en position 1, 2 et 4, la droite étant représentée par l’UDC (en 3e position) et le PLR (5e position). 

Le parlement à droite, le gouvernement à gauche : un cas de figure déjà vu lors de la législature 1989-1993, à la suite à l’élection de Michel Von Wyss aux côtés de deux socialistes, Pierre Dubois et Francis Matthey. Mais, blanc bonnet, bonnet blanc, la politique continuera de se faire au centre et l’ensemble des problèmes du canton resteront entiers (accueil de la petite enfance, écoles, hôpitaux, politique sociale, transports…) 

Une chose apparaît clairement : le changement ne peut venir que de la rue. Il dépendra, dans les mois et années à venir des mobilisations syndicales et populaires – à l’image de la lutte des ex-grévistes de La Providence qui continue dans la durée – d’actions et d’occupations, à l’instar du squat de la Main, d’actes de résistance à l’encontre du racisme et du sexisme qui s’affichent sans pudeur. Mais le changement dépendra aussi du dynamisme de solidaritéS qui a fait campagne avec de nouvelles forces, jeunes. Un espoir et la certitude que tout est à gagner.

 

Henri Vuilliomenet