100'000 contre le G8. Spoerri ça suffit!

100´000 contre le G8. Spoerri ça suffit!

Nous publions – telle quelle ci-dessous – la prise de position d’un représentant de solidaritéS, rédigée au lendemain des dérapages policiers du mardi 3 et parue dans la Tribune de Genève du 5 juin 2003. Elle exprime d’abord et surtout la fierté d’avoir été au rendez-vous de l’impressionnante manifestation du 1er juin, ensuite aussi une claire condamnation de la «casse» indiscriminée commencée le samedi soir, comme enfin notre soutien à la revendication de la démission de la conseillère d’Etat libérale en charge de la police Micheline Spoerri… (réd)

Dimanche 1er juin, nous étions 100000 pour contester le G8. Ses politiques font primer le profit des multinationales sur les intérêts de la majorité, se traduisent par la marchandisation de toute activité et par le cortège des fléaux imposés par le capitalisme néolibéral: guerres d’agression érigées en système, démantèlement de la sécurité sociale, privatisations, accroissement de la précarité et des inégalités, du racisme et du sexisme, de la destruction de l’environnement, et du pillage du Sud par une dette injuste!


Quarante mille enfants meurent de faim chaque jour. Que font le G8, le FMI ou l’OMC? C’est sur cette violence sourde, soutenue par les missiles et les bombardiers de l’impérialisme US, que les «casseurs» globaux d’Evian fondent leur «gouvernance» mondiale, au mépris du droit international et des droits humains dont Genève se revendique.


La Suisse aurait dû refuser de soutenir ce G8! Genève aurait pu et dû dire qu’il fallait l’annuler, au lieu de jouer les valets obséquieux, mettant l’accueil et les exigences des Bush, Blair & Co. au premier plan en gaspillant des millions publics, soustraits aux tâches sociales du canton.


A défaut d’avoir eu ce courage, les autorités ont refusé de suivre les boute-feux de la droite, qui voulaient jouer plus dur que Berlusconi ne l’a osé à Gênes, avec des conséquences sans doute pires. Ils entendaient interdire la manif de dimanche et frapper d’«illégalité» la plus grande manifestation qu’ait connue Genève depuis la Seconde guerre mondiale…


Ainsi, la manif de dimanche a été exubérante, imposante et pacifique. Genève peut s’enorgueillir d’être un jalon dans la longue marche vers un «autre monde», commencée à Seattle… On doit remercier le Forum social lémanique qui y a travaillé dur, sur le terrain, en négociant avec les autorités…


Pourtant Genève déplore aujourd’hui des vitrines brisées et des commerces ravagés. Les dégâts se monteraient à 3 millions, y compris dans des petites entreprises locales qui ne sont nullement des symboles du capitalisme mondialisé. Cette «casse» doit être condamnée sans réserve. Ses victimes doivent être indemnisés par l’Etat. Honorer cette facture coûtera d’ailleurs moins cher que les policiers allemands, importés sans l’aval du parlement et lâchés en Ville sans l’accord du Conseil d’Etat.


Cette casse – commencée samedi soir par une poignée d’individus, sans relation avec la grande manif anti-G8 – constitue une provocation visant à accréditer l’idée fausse selon laquelle la mobilisation du lendemain serait violente, incontrôlée, etc. Elle résulte d’un engagement non tenu par les autorités – Mme Spoerri en particulier – envers le Forum Social Lémanique.


En effet, le 23 mai, la cheffe du DJPS signait un accord selon lequel «le FSL prend acte qu’elle [la police] protégera physiquement les zones interdites de manifestation, comme la Rive droite, les Rues basses, ainsi que tout bâtiment ou site à risque.» Promesse non tenue! Pourquoi? Incompétence ou laxisme volontaire, pour répondre à la «demande» libérale de discréditer une mobilisation dérangeante?


Par la suite, sous les ordres de Mme Spoerri, la police investira brutalement l’«Usine» – opération insensée où un journaliste sera gravement blessé – enfermera des centaines de très jeunes manifestant-es pacifiques, des heures durant, dans une «nasse», à l’entrée du pont du Mont-Blanc, n’hésitant pas à asperger ses «prisonniers» de gaz et à leur tirer dessus à coups de balles en caoutchouc…


Ce «rattrapage» policier ubuesque sera couronné mardi par la soumission du Conseil d’Etat à la ligne «libérale» dure (et à un syndicat de policiers déboussolés). Les autorités suspendent sine die la liberté fondamentale de se rassembler en public et lâchent en ville des agents cagoulés, déguisés en casseurs, qui ont brutalisé journalistes et passant-e-s…


Il faut que ça cesse! On a importé Bush à Cointrin l’autre jour, ce n’est pas une raison pour importer sa politique de restriction des libertés et de violation du droit… Mme Spoerri a renoué avec l’esprit du dérapage policier du 29 mars, qui avait vu une mère de famille blessée par une balle de marquage en gare de Cornavin, couvert ensuite par trois jours de mensonges! Il est temps qu’elle s’occupe d’autre chose…


Pierre VANEK