Les idées du Stink-Tank patronal puent l'ancien régime
Le 19 juin la Neue Luzerner Zeitung dévoilait un papier d’Avenir Suisse (AS) proclamant le pays menacé d’une « prise de pouvoir »… des aîné·e·s.
Le « peuple » vieillit et les « vieux » votent plus que d’autres, avec un penchant (sinistre!) à défendre les assurances sociales et leurs rentes. Jusque-là que du banal: présenter tout barrage au néolibéralisme comme réactionnaire, c’est la routine de la propagande patronale. Mais les solutions proposées sont choquantes.
Brecht concluait un poème critique, après le soulèvement de 1953 en RDA, ainsi: «…ne serait-il pas plus simple pour le gouvernement de dissoudre le peuple et d’en élire un autre!» AS va dans ce sens. Le corps électoral ne leur convient pas, qu’à cela ne tienne, on le retaillera « sur mesure », en puisant dans un arsenal de vieilleries antidémocratiques.
Ainsi, AS défend le retour à un vote censitaire: le vote serait ouvert aux étrangers « ayant payé des impôts depuis 5 à 8 ans »! Au bout de ce chemin-là, il y a la privation du droit de vote de Suisses (mais le sont-ils vraiment?) ne payant pas d’impôts, ceux sur lesquels la droite crie haro à Genève, ce « 30 % de la population ne payant pas d’impôt.»
En effet, si on peut discriminer entre étrangers plus ou moins nantis, pour donner ou non des droits politiques, pourquoi s’en priver pour les Suisses? Et si les seniors défendent abusivement leurs rentes en votant, les « pauvres », avides d’aides sociales diverses, ne devraient-ils pas aussi voir l’« abus » consistant à défendre celles-ci dans les urnes être proscrit ou limité?
Autre « innovation » proposée par AS, l’adoption d’une formule familialiste octroyant aux parents un droit de vote qu’ils exerceraient « pour le compte » de leurs enfants mineurs. En croisant les deux propositions, on pourrait d’ailleurs octroyer le droit de vote pour toute la famille à celui qui gagne le plus: avec le retour du pater familas comme seul vrai citoyen…
Pierre Vanek